Le retard constaté dans la publication du décret d’application de l’Acte III de la décentralisation et la non-disponibilité des fonds de dotation ont poussé les communes de la ville de Dakar à adopter désormais un régime particulier. Privés de budget de fonctionnement, les maires des communes ont réduit leurs actions à la seule collecte des taxes municipales et au paiement des salaires d’agents municipaux. Un service minimum qui plombe le fonctionnement normal des communes de Dakar, surtout celles dirigées par l’opposition qui crie à la « cabale » et au « double jeu » du pouvoir en place, initiatrice de la nouvelle réforme des collectivités locales.
Paiement des salaires d’agents municipaux : telle est la nouvelle mission que se fixent en exclusivité les patrons des 19 communes de la ville de Dakar.
Privés de fonds de dotation d’une part et bloquées d’autre part par l’absence de décret d’application de la nouvelle réforme des collectivités locales, depuis près de quatre mois maintenant, les maires des communes de la ville de Dakar ont adopté un régime particulier. Ils ont limité leur action à la seule collecte de taxes municipales et au paiement des salaires d’agents municipaux. Les travaux publics, l’entretien de certains lieux publics et certaines activités sociales comme la subvention aux associations sportives et culturelles ou encore l’appui aux cas sociaux, notamment lors des grands événements comme la fête de la Tabaski, célébrée il y a juste trois jours, ont tout simplement été mis entre parenthèses à cause du statu quo lié à la mise en œuvre de l’Acte III de la décentralisation.
Un tour au siège de la commune de Médina et des Parcelles assainies a permis de constater un service minimum qui revient à la collecte des taxes et au paiement des agents. «Nous n’avons pas pu apporter l’aide aux indigents, lors de célébration de la Tabaski, à cause du blocage que tout le monde constate dans la mise en œuvre de l’Acte III de la décentralisation. Sauf pour le paiement des salaires des agents municipaux, l’Etat nous interdit de faire d’autres dépenses», explique le maire des Parcelles assainies, Moussa Sy. Ce dernier n’a pas manqué par ailleurs de fustiger cette restriction qui bloque quasiment le fonctionnement de toutes les communes du département de Dakar, y compris celle de la ville dirigée par Khalifa Sall.
Dans le même sillage que l’édile des Parcelles assainies, Abdoulaye Martin Sambe, deuxième adjoint au maire de la Médina, n’est pas allé par quatre chemins pour dénoncer de son côté un «soubassement» politique dans la mise en œuvre de l’Acte III de la décentration, à l’origine de cette situation qui les empêche de travailler depuis bientôt quatre mois. «Dans tout le Sénégal, seules les mairies contrôlées par des militants non membres de l’Apr sont confrontées à ce problème lié à la fois à la disponibilité des fonds de dotation et l’absence de décret d’application de l’Acte III de la décentralisation.
Le président Macky Sall doit savoir qu’on a compris son double jeu. On ne peut mettre à la disposition des villes de Saint Louis, Pikine, Guédiawaye et Kaolack leurs fonds de dotation pendant qu’on bloque le fonctionnement des communes du département de Dakar. Pour nous, tout est évident, cette cabale est menée contre le maire de Dakar et ses autres collègues».
Pour trouver une solution à cette situation, Moussa Sy et Abdoulaye Martin Sambe disent abonder dans le même sens que le ministre conseiller du président de la République, le professeur Ismaila Madior Fall. Pour rappel, dans sa dernière sortie, le Pr Fall par ailleurs président du Comité de pilotage de cette réforme de la politique de décentralisation, avait fait état de a nécessité de renvoyer l’Acte III devant les parlementaires pour son relookage.
Dans la même optique, Moussa Sy et Abdoulaye Martin Sambe ont aussi plaidé pour le retour de la loi devant le Parlement en vue de complément. «Il y a beaucoup de choses qui ne sont pas claires dans cette loi. Il y a certains dispositions qui sont confuses comme les taxes allouées en même temps à la ville et aux communes. Le débat sur la participation des communes au budget de la ville n’est pas défini», argumente de fait le maire des Parcelles assainies. Avant d’indiquer : « Il est temps que le chef de l’Etat se ressaisisse. Depuis qu’il est à la tête ce pays, aucune des réformes qu’il a initiées n’a abouti. De la réforme foncière à celle des institutions en passant par l’Acte III de la décentralisation. Il doit apprendre à discuter avec les acteurs et mettre de côté les velléités politiques dans ce qu’il propose aux Sénégalais sinon ça ne passera pas », a averti pour sa part le deuxième adjoint au maire de la Médina.