Les acteurs du phénomène de la mendicité sont en conclave pour trouver un remède miracle à l’endiguement de ce drame des rues. Mais ils ne s’entendent pas sur le diagnostic.
A vouloir les énumérer, on risque d’en perdre le souffle. Les conventions internationales et régionales ratifiées, les dispositions politiques et réglementaires internes ainsi que les organisations intervenant dans le domaine de la traite des enfants sont tellement nombreuses qu’il serait hasardeux de tenter de dresser une liste exhaustive. Et pourtant, les enfants exploités, ceux dans la rue en particulier, restent une réalité plus que jamais banale.
«Les études, analyses, séminaires et conseils interministériels n’ont pas permis d’éradiquer ce fléau récurrent qui s’amplifie de manière particulièrement inquiétante», avoue, impuissant, le président de la Cellule nationale de lutte contre la traite des personnes, El Hadji Malick Sow.
Partant de ce constat, l’ONG Plan-Sénégal a donc mis en place le projet ABRIS visant à renforcer la capacité des communautés et gouvernants dans la prévision et la lutte contre cette pratique. Dans cette optique, des acteurs et experts sont en conclave pour identifier les obstacles à l’application des lois et politiques. Ils devront aussi trouver les moyens de passer des discours et commentaires à des actions décisives.
En attendant d’arriver à une vision commune sur cette lancinante question, des pistes ont été identifiées. Responsable à Plan, Fallilou Seck estime qu’il est nécessaire d’instaurer un dialogue sur ce sujet aussi sensible que complexe. D’où l’importance que tous les acteurs se retrouvent pour en parler.
Quant à Alioune Tine, président du Conseil sénégalais des droits de l’Homme, il a invité tout le monde à être attentif au phénomène de la pauvreté. A ses yeux, l’impossibilité de se nourrir, l’absence d’éducation et de santé sont des facteurs potentiels de provocation ou d’aggravation du drame de la mendicité. C’est pourquoi «il faut veiller au respect des droits économiques, sociaux, culturels qui sont fondamentaux», suggère-t-il. Tout en rappelant la situation actuelle au Nord-Mali, favorisée, selon lui, par la déliquescence sociale.
Mais pour le président de la Fédération nationale des daaras, il y a une autre explication. Cheikh Tahir Fall estime en effet que l’exclusion dont les daaras font l’objet de la part des pouvoirs publics est la raison essentielle qui explique la persistance du phénomène. «La mendicité est de situation et non de principe. Il n’y a pas un franc du budget de l’éducation pour les écoles coraniques. Le choix de l’enseignement coranique ne doit pas exclure l’enfant de l’assistance de l’Etat dans un pays à 95% musulmans. Si l’école publique n’était pas assistée, elle chercherait elle aussi les moyens de survivre. C’est ce que font les daaras», relève-t-il.