Si la situation du Sénégal est bien meilleure que celle de la Côte d’Ivoire en matière de maîtrise des prix de produits de consommation courante, une étude sur la question a révélé bien des failles, notamment dans le cadre juridique.
Bien que les résultats ne soient que provisoires, l’étude sur les circuits de distribution au Sénégal réalisée par la délégation de l’Union européenne à Dakar sur recommandation du ministère du Commerce renseigne à bien des égards sur le phénomène de la distribution en général. Cette enquête vise à identifier les leviers d’action possibles pour une maitrise des prix de produits de consommation courante. Elle s’est donc basée sur une analyse du fonctionnement des réseaux d’acteurs, juridiques et économiques, de dix produits de consommation courante.
Le premier constat révèle que toutes les catégories fonctionnent avec un fournisseur principal. Le schéma se présente de deux façons. Dans un premier temps, l’importateur négocie avec les traders avant d’alimenter directement les supermarchés ou les industries agroalimentaires en tant que premier relais. Mais ce même importateur peut aussi alimenter les industries agroalimentaires qui collaborent avec les grossistes. Et ces derniers, à leur tour, coopèrent avec les demi-grossistes avant que ceux-ci ne desservent les boutiques ou étals. Le même procédé est également constaté avec l’agriculteur, fournisseur de base au même titre que l’importateur.
Imperfection du cadre juridique
Cependant, il est constaté une forte déréglementation des circuits de distribution consécutive à l’adoption d’une série de textes normatifs entre 1994 et 1995. L’étude révèle aussi une faiblesse du dispositif de régulation mis en place pour superviser l’organisation de la distribution. Par exemple, la loi 94-63 du 22 août 1994 sur les prix, la concurrence et le contentieux économique dispose en son article 2 que les prix des biens, produits et services sont librement déterminés par le jeu de la concurrence. Selon l’étude de l’UE, cette loi traduit autant l’imperfection du dispositif de contrôle et de surveillance des prix que l’ensemble des difficultés pour apprécier si les prix n’ont pas été artificiellement fixés par les opérateurs, en clair leur sincérité.
A ce niveau, il est déploré une faiblesse du mécanisme mis en place pour le contrôle du respect des prix autoritairement fixés ou homologués et le manque de coordination entre les diverses instances intervenant dans la collecte de l’information sur le prix. Il n’y a pas de dispositif de mise en cohérence des informations collectées par la Direction du commerce intérieur (DCI), l’Agence de régulation des marchés (ARM), l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD) ou encore le Comité de suivi des prix des denrées de première nécessité.
Position politique de principe
Un constat en matière de distribution, c’est l’absence d’un cadre (législatif) cohérent et intégré de son organisation et l’encadrement des grandes surfaces. A noter entre autres la non-réglementation des relations entre les divers acteurs de la distribution et la faiblesse du contrôle de la concurrence. Néanmoins, en attendant de recueillir des compléments de proposition, les initiateurs de cette étude ont prôné la transparence, la concertation et la responsabilisation entre acteurs et gouvernants pour arriver à établir un cadre sain. Il est nécessaire, selon eux, de dégager une position politique de principe sur le régime des prix et une production de l’information pour la surveillance du marché. C’est pourquoi la création d’un observatoire au sein de la DCI, l’élargissement et le renforcement du comité de suivi des prix des produits de première nécessité sont fortement recommandés.
Les dix produits concernés par l’enquête sont : riz importé ordinaire, huile, concentré de tomates, sucre cristallisé, oignon local et importé, savon de ménage, lait en poudre, pain, carotte locale et importée.