L’analyse du nouveau projet de loi n°18/2014 relatif aux universités publiques du Sénégal impose un constat : le ministère de l’Enseignement supérieur entend tout centraliser, au détriment de l’autonomie si chère aux universitaires.
Comparé à la loi cadre du 21 décembre 2011 portant statuts et organisation des universités publiques du Sénégal, le nouveau projet de loi est un sosie beaucoup plus subtil. Il vise au final une centralisation de la gestion universitaire autour du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche chargé de le présenter à l’Assemblée nationale pour adoption. Dans le projet de décret n°2014-984 du 21 août 2014 du président de la République, l’exposé des motifs souligne : ‘’l’absence d’un cadre législatif et réglementaire unifié a entrainé des disparités et des incohérences dans la gouvernance institutionnelle et académique du système universitaire.
La conséquence qui en découle est que le ministère chargé de l’Enseignement supérieur, en raison de sa faible capacité technique de coordination du système, a peu de contrôle sur les universités’’. Compte tenu de leurs spécificités, souligne-t-on, le nouveau projet de loi exclut, curieusement, l’Université virtuelle du Sénégal (UVS) et les Instituts supérieurs d’enseignement professionnel (ISEP).
Le recteur, désormais un organe
Dans le titre 1 intitulé ‘’Statut, missions et principe d’organisation’’, le nouveau texte stipule que l’administration de l’université comprend trois organes, notamment un conseil d’administration, un conseil académique et le recteur. A la place de ce dernier, le texte sur la loi cadre de décembre 2011 mentionne le conseil de gestion. Dans le nouveau texte donc le recteur devient un organe. Le nouveau projet de loi de poursuivre : ‘’Les facultés, les unités de formation et de recherche, les écoles et les instituts sont créés par décret, en fonction des besoins et des capacités internes et externes de chaque université’’.
Si on se réfère à l’ancien texte qui précise que les universités du Sénégal sont dirigées par un recteur, on pourrait s’interroger sur le réel dirigeant de l’université dans le nouveau texte. Par rapport au conseil d’administration, il est dit dans le nouveau projet de loi qu’il est l’instance de validation des orientations stratégiques, pédagogiques et scientifiques de l’université. Le terme stratégique étant inexistant dans l’ancien texte. Le conseil d’administration est aussi chargé dans le nouveau texte de l’évaluation et du contrôle de la gestion administrative et financière. Il ne gère plus la mise en œuvre comme prévu antérieurement.
Le président et le vice-président du conseil d’administration ne sont plus élus, mais choisis par le ministre de l’Enseignement supérieur…
Le nouveau conseil d’administration examine et adopte le code d’éthique et de déontologie applicable aux membres du personnel de l’université et non aux membres du conseil d’administration comme le stipule le texte antérieur. La procédure de proposition de nomination des recteur n’est plus du ressort du conseil d’administration dans le nouveau projet. Un fait nouveau cependant, le recrutement des personnels de l’université est désormais du ressort du nouveau conseil d’administration. Le président et le vice-président du conseil d’administration sont nommés par décret sur proposition du ministre chargé de l’Enseignement supérieur.
Ils ne sont donc plus élus comme le prévoit le dispositif antérieur. Il est dit dans le nouveau texte que les membres issus du milieu professionnel sont nommés par arrêté du ministre chargé de l’Enseignement supérieur. Conformément à la loi cadre de 2011, ils ne sont plus nommés par décret et l’avis des instances délibérantes ne compte plus. Sur les prérogatives du conseil académique, le nouveau projet dit qu’il est chargé de proposer les mesures et les listes d’aptitude pour la promotion des enseignants. La question qui s’impose à ce niveau, c’est le rôle et la place réservés au CAMES dans ce dispositif ? Toujours dans cette partie, le règlement intérieur ne figure plus.
Le recteur n’est plus élu, mais choisi par le ministre de l’Enseignement supérieur
Le nouveau projet de loi introduit un représentant du personnel administratif, technique et de service parmi les membres du conseil académique. Désormais, le recteur doit être de nationalité sénégalaise, ce qui n’était pas le cas dans le projet de 2011 où seuls le choix des pairs, la compétence, le grade et les capacités comptaient. Le recteur est nommé désormais par décret sur proposition du ministre chargé de l’Enseignement supérieur, pour un mandat de 4 ans, renouvelable 1 fois. Si le mandat reste inchangé, on constate ici que le recteur n’est plus élu mais choisi par le ministre de l’Enseignement supérieur.
L’équation UVS
Un fait nouveau, le secrétaire général est maintenant placé sous l’autorité du recteur. Comme disposition finale, le nouveau projet souligne que le fonctionnement et l’organisation de l’Université virtuelle du Sénégal et des Instituts supérieurs d’enseignement professionnel ne sont pas régis par la présente loi. La question qui taraude à ce niveau c’est comment comprendre que les bacheliers soient obligés de choisir 3 options d’université y compris l’UVS alors que cette dernière n’est pas concernée par la nouvelle loi ?