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Enquête Plus N° 957 du 23/8/2014

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DR Massamba Guèye, manager de la Maison de l’oralité et du patrimoine du Sénégal: ‘’Quand le mariage devient CDD, "kleneex", ‘’face 2 face’’ ou "stage à court terme"…
Publié le lundi 25 aout 2014   |  Enquête Plus




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On le surnomme ‘’La bouche de l'Afrique’’. Détenteur du Micro d'or du meilleur conteur, le Manager général fondateur de la Maison de l'Oralité et du Patrimoine du Sénégal Kër Leyti et ancien Directeur général de la Compagnie du Théâtre national Daniel Sorano du Sénégal, le Dr Massamba Guèye, souligne, entre autres, que ‘’ si le mariage est banalisé, c'est aussi parce que tout ce qui en fait la vraie base est rejeté. Le professeur, conteur, écrivain, dramaturge s’explique dans cette interview.



La plupart des couples sont en difficulté dans notre pays, le nombre de divorces va crescendo, qu'est-ce qui l'explique à votre avis?

C'est vrai qu'on n’a pas besoin d'aller loin pour constater que les divorces vont crescendo. Le caractère éphémère des couples se voit à travers le langage populaire, car le mariage est assimilé à un CDD (contrat à durée déterminé). A défaut on entend parler de mariage "kleneex", ou de ‘’face 2 face’’, ou encore de "stage à court terme". Les raisons en sont nombreuses, mais, parmi elles, on peut citer l'impréparation des jeunes couples avant d'attaquer les manigances familiales. Le plus souvent, la relation préconjugale est fondée sur le bonheur et le plaisir (aller à la plage, en boîte, au restaurant, célébrer la saint Valentin, etc.).

C'est pour cette raison que les deux conjoints ne se découvrent mutuellement que pendant les conflits, dans un appartement coupé des parents, alors qu'avant, le jeune couple vivait avec des tuteurs qui savaient interpréter les faits et gestes pour prendre en charge le règlement du conflit. Les nombreux divorces sont souvent aussi causés par un manque d'accompagnement des adultes. Souvent aussi les jeunes se marient contre l'avis des parents, de façon tranchée. Une fois le mariage fait, ces derniers se lancent des quolibets à l'occasion des cérémonies de sorte à créer des tensions ingérables qui finissent par casser l'harmonie du couple. Il y a enfin le fait que beaucoup de mariages sont calculés et l'argent est mis en avant.

Qu'est-ce qui s'est passé pour que le mariage ait perdu ses lettres de noblesse?

Si le mariage est banalisé, c'est aussi parce que tout ce qui en fait la vraie base est rejeté. L’aspect spectaculaire est mis en avant. On ne réfléchit pas profondément le projet de vie et l'idéal familial qu'on a, mais on s'épouse en mettant en avant le fait de s'aimer, alors que, comme on le dit souvent, c'est un respect de la différence qui enrichit le couple fondé sur l'amour. En plus de cela, je constate que les jeunes couples sont souvent surpris par le premier enfant. Notre société a perdu l'habitude de laisser la femme aller vivre le terme de sa première grossesse et les premiers mois de la vie de son premier bébé chez sa mère. Cela permettait de stabiliser les couples et aux familles de faire le point des difficultés du couple.

La vie de couple n’apporte plus réconfort et paix, mais elle s’est transformée en foyer de tensions. Votre avis?

Les tensions on toujours existé dans les couples mêmes les chants traditionnels le disent "le mariage n'est pas un lieu de plaisir" "sey neexul" en wolof. Les jeunes filles étaient préparées à cela par les mères et tantes, alors que les jeunes garçons qui entraient dans le bois sacré ou la case de l'homme recevaient les rudiments de la gestion familiale. Mais aujourd'hui rien ne prépare les couples à gérer ces tensions. Ces dernières peuvent naître des causes matérielles ou alors du problème de caste mal compris, ou enfin d'un manque d'autorité régulatrice des problèmes du jeune couple.

Que faudrait-il, à votre avis, pour pallier une telle situation?

Je ne connais pas de solution miracle, mais je suppose que la supination est tellement grave que nous devons revoir notre système d'éducation familiale globale. Je souhaite que les jeunes couples identifient, chacun de son côté, une personne morale qui est le référent pour les aider à sortir des problèmes. Les jeunes couples doivent être accompagnés les dix premières années de leur vie conjugale. La vie urbaine a certes ses contraintes, mais il est temps que les deux conjoints cessent de raconter l'intimité de leurs problèmes aux membres de leurs familles qui en font le relais et aggravent souvent les problèmes. A ce titre, je dois rester modeste, mais il faut que chacun, dans un couple, prenne la décision ferme qu'il n'y aura pas de divorce. Nous voulons vivre en Occidentaux, mais notre structure mentale est très africanisée, c'est pourquoi je déconseillerai au jeune couple de mener un mode de vie à l'européenne.

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