Et rebelote! Hier encore, ce sont les fameuses exceptions qui ont eu la part belle en s’étirant sur la quasi-totalité de l’audience, la dernière heure étant la seule concédée au Parquet spécial à des fins de réponse… Une journée morne, en conclusion, heureusement marquée par un coup de théâtre humoristique, en toute fin.
Des exceptions, toujours des exceptions ! C’est encore elles qui, hier, ont prévalu toute la journée avec le monopole de la barre par la défense de Karim Wade et coïnculpés ! On en aurait presque assez, si ce dire n’était évidemment pas de nature à porter atteinte à la solennité de la présente Cour ! Après deux jours complets d’un pareil traitement cependant, il semble qu’on en arrive enfin à bout…
Jusqu’à nouvel ordre, en tout cas, connaissant les avocats de Wade Jr ! Le parquet spécial, en l’occurrence Felix Antoine Diome et son patron Alioune Ndao, a même eu la latitude de glisser furtivement, en fin de journée, une réponse avant qu’on ne referme ce procès jusqu’à lundi prochain. Un long week-end qui prend tous les airs d’une sortie de tunnel !
La journée d’hier s’est ouverte sur un rythme non soutenu : Me Clédor Ly, le ‘’pénaliste maison’’ du barreau si on en croit les dires du Procureur spécial de la CREI, a ouvert les hostilités avec une (très longue) matinée de plaidoirie. De cette diatribe aux faux airs d’inventaire exhaustif de toutes les lois et conventions ratifiées par le Sénégal, depuis les Indépendances, personne, excepté les juristes, n’a évidemment compris un traître mot. Le reste des mortels, c’est-à-dire l’essentiel du public, s’est juste contenté (non sans trépidation) d’attendre que la chose se passe… Pour ceux qui ne se sont pas tout bonnement endormis, bien sûr.
Fatigue
Pénible, laborieuse, l’audience d’hier pour être honnête, n’a pas non plus été une partie de plaisir pour les avocats. Me Clédor Ly, toujours lui, s’est notamment plaint d’être épuisé, peu avant la reprise des débats, à 15h… Et, à peine l’audience commencée, Alioune Ndao a levé trois doigts et soufflé un ‘’3h heures !’’ à l’intention de l’avocat, parlant de sa plaidoirie fleuve de la matinée. Heureusement pour lui (ou pour nous), l’audience, après la reprise, a vu Mes Cassart, Seydou Diagne et Moustapha Pouye suppléer Me Ly. Aussi prolixes bien que plus rapides à développer leurs arguments, les deux robes noires vont à leur tour tenter de convaincre la Cour du bien fondé de leurs arguments respectifs. L’ensemble des exceptions de la Défense épuisées, ce fut au tour du Parquet spécial de prendre la parole.
Felix Antoine Diome, dans le style assez gigotant qui est le sien, a été le premier à se lever… Son intervention, plus que d’habitude, a eu pour vocation de démonter chaque argument avancé par la défense. Cela d’autant plus qu’il est, lui même, le sujet d’une exception plaidée par Me Ly et qui voudrait que sa nomination à la CREI soit en fait inexistante. Bien déterminé à montrer, au contraire, qu’il existe, le substitut du procureur a enchaîné la lecture de textes de loi soutenant son point de vue à un débit tel qu’on a presque eu l’impression qu’il était en train de rapper. Il a fini, néanmoins, par passer le témoin à Alioune Ndao qui, à son habitude, a provoqué une levée de boucliers chez la défense de par ses propos… Jusque-là, rien de nouveau sous le soleil.
Perturbateurs
La grande surprise de la journée viendra, en vérité, en toute fin d’audience. En effet, avant même qu’il ait pu renvoyer la suite du procès à la semaine prochaine, le Président de la Cour a été interrompu par un cri strident. Dans la rangée de sièges faisant face au box des officiers, un petit homme s’est levé d’un bond et, brandissant un bras au-dessus de sa tête en soutien à Karim Wade, s’est écrié ‘’Président !’’ presque aussitôt suivi par les acclamations d’une bonne dame. Furieux, Henry Grégoire Diop a donné l’ordre qu’on lui amène les deux ‘’perturbateurs’’ d’audience et fait injonction, dans le même moulinet de manche, aux greffiers de dresser un procès-verbal.
De l’autre côté de la salle, Karim, qui a sans doute pris en pitié ses deux ‘’supporters’’ (pour reprendre des propos tenus en début d’audience par le ‘’vrai’’ Président de la salle), a demandé la parole…, en vain. Là, on s’est un peu inquiété, lorsqu’un bon nombre d’avocats de la défense se sont portés volontaires pour défendre les deux malheureux dont la bouche est allée plus vite que la pensée… Fort heureusement, les deux fautifs ont prouvé par la suite n’avoir pas besoin de défense. La dame, qui a dû ressentir la peur de sa vie, s’est très vite (et assez comiquement) confondue en excuses devant la cour : ‘’Ay waay baaleen ma. Yen ay samay nijaay !’’ a-t-elle couiné à la barre, s’adressant aux juges… Ces derniers, non sans quelques éclats de rire, ont laissé repartir les deux trouble-fête chez eux. Ouf !
