Samuel Sarr a été inculpé hier, mercredi 20 août et placé sous mandat de dépôt par le juge du deuxième cabinet, pour offense au chef de l’Etat et acte de nature à inciter les citoyens à enfreindre les lois du pays. L’«éternel wadiste», est sous le coup de l’article 80 du code pénal et risque six mois de prison.
Placé sous mandat de dépôt par le juge Samba Sarr, du deuxième cabinet, Samuel Sarr qui est poursuivi pour offense au chef de l’Etat et acte de nature à inciter les citoyens à enfreindre les lois du pays, un délit puni par l’article 80 du code pénal, a passé hier mercredi, sa première nuit à la maison d’arrêt et de correction de Rebeuss. L’ancien ministre de l’Energie sous l’ère Wade y rejoint ainsi son ami Karim Wade qui est poursuivi pour enrichissement illicite par la Cour de répression par la Crei. A la suite de Bara Gaye, ancien patron de l’Union des Jeunesses Libérales et Travaillistes (Ujtl), inculpé pour ce même délit, il y a de cela quelques mois, Samuel Sarr risque une peine d’emprisonnement de six mois.
«L’éternel wadiste», comme il se nomme lui-même, a été arrêté par les gendarmes de la Section de Recherches de Colobane dans la soirée du mardi 19 août dernier. Placé en garde à vue, l’ancien ministre de Wade a ainsi passé la nuit dans les locaux de cette unité de la Gendarmerie nationale. Samuel Sarr a été cueilli par les éléments de la section de recherches après avoir accusé dans un article publié sur sa page facebook, le chef de l’Etat de détenir des «comptes bancaires pleins d’argent mal acquis». Il l’accuse également de loger des milliards de francs Cfa dans des banques américaines».
Rappelons que Samuel Sarr fait partie des dignitaires de l’ancien régime d’Abdoulaye Wade soupçonnés par la par le procureur spécial de la Cour de répression de s’être enrichis illicitement. Il est même sous le coup d’une interdiction de sortie du territoire national. Certaines informations font par ailleurs état de son audition imminente par le procureur spécial une fois qu’il aura bouclé le dossier de l’ancien directeur de l’Agence nationale pour l’organisation de la Conférence islamique (Anoci) et actuel maire de Ziguinchor, Abdoulaye Baldé.
DEVANT LE JUGE DU 2ème CABINET - « Je me considére comme un otage »
Avant qu’il ne soit placé sous mandat de dépôt hier mercredi, Samuel Sarr aurait fait, selon Mayoro Faye du Pds , devant le juge du 2ème cabinet cette déclaration que nous reproduisons in extenso.
«J’ai la sensation et la désagréable impression d’avoir été enlevé par le pouvoir pour m’empêcher de parler et d’exercer mes droits de citoyen libre.
Je n’ai jamais offensé qui que ce soit. Je ne me suis jamais adressé à Macky Sall.
Je suis un citoyen et je suis interloqué par la déclaration de patrimoine du président de la République qui se trouve à la tête d’une fortune colossale alors que nous savons tous qu’à la veille de l’alternance survenue en 2000 il était simple locataire qui peinait à payer ses loyers.
Je ne suis pas le seul sénégalais qui s’interroge sur l’origine de sa fortune.Je me suis également interrogé lorsque j’ai appris qu’un compte bancaire serait ouvert au nom de Macky Sall dans une banque américaine, accusant un solde créditeur en sa faveur d’un montant de 14 millions de dollars américains, soit environ 7 milliards de francs CFA.
Je ne me suis pas limité à m’interroger sur l’impérieuse nécessité pour Macky Sall de nous éclairer et de nous convaincre qu’il exerce ses fonctions avec vertu et délicatesse.
Je me suis également interrogé sur ces donneurs de leçons de la trempe de William Bourdon qui prétendent traquer les biens mal acquis de nos dirigeants.
J’ai rappelé que ce Bourdon est aujourd’hui mandaté par Macky Sall et que manifestement de sa part il n’y aura pas d’investigations le concernant.
Je n’ai pas tort parce que je considère Bourdon comme un mercenaire.
Si c’est cela qu’on me reproche je le réitère.
Je me considère dans ces conditions comme un otage.
Macky Sall est le seul responsable de cette prise d’otage.
Je voudrais, Monsieur le juge, être édifié sur le sens de ma comparution aujourd’hui devant vous : suis- je là parce que je ne suis plus libre de parler comme un démocrate, ou est-ce que Macky Sall ne peut plus et ne veut plus être critiqué et veut substituer un régime de terreur à notre système démocratique.
Je vous remercie.»
ARRESTATION DE SAMUEL SARR - «Un bouc émissaire», selon Babacar Gaye
Babacar Gaye, porte-parole du Parti démocratique Sénégalais (Pds) n’adhère pas à l’arrestation de Samuel Sarr. Il soupçonne les autorités d’en avoir fait «un bouc émissaire».
«Le pouvoir aux abois face à de multiples crises est à la recherche d’un bouc émissaire pour faire oublier la mort de Bassirou Faye, les difficultés dans le monde rural et l’impasse dans laquelle se trouve le procès de Karim Wade». Ainsi s’est exprimé Babacar Gaye,porte-parole du Parti démocratique sénégalais (Pds), pour s’indigner contre l’arrestation de Samuel Sarr, pour offense au Chef de l’État.
Aussi a-t-il prévenu: «Si Samuel est en garde à vue parce qu’on lui reprocherait d’avoir offensé le Chef de l’État, tous les démocrates sont en danger». Et cette situation est d’autant plus grotesque, selon l’ancien Président du Conseil régional de Kaffrine, que «Samuel Sarr n’a pas tenu des propos offensants à l’égard du président de la République. Il n’a pas porté d’accusations outrageantes à l’endroit du président de la République, il a juste rappelé que celui qui aujourd’hui défend les intérêts du Sénégal est un homme peu recommandable». Il explique que Samuel Sarr «ne comprend pas que l’État du Sénégal, dont le Chef est le président de la République, qui est aujourd’hui le Chef de l’Exécutif, ait accepté, ou choisi de commettre un avocat, naturellement de lui payer des honoraires, alors que ce dernier n’est pas quelqu’un de fréquentable, compte tenu de son passé».
Le porte-parole du Pds, s’est aussi prononcé sur l’information selon laquelle, Samuel Sarr est aussi poursuivi pour avoir divulgué des informations à «Xibaru.com». «Si c’est le cas, si Samuel Sarr est complice de la publication «des fausses informations», a-t-il indiqué, alors “le journaliste ou l’organe de presse qui est à l’origine de la publication de ces dites informations devrait être auteur principal et certainement Samuel Sarr serait un des complices».
Babacar Gaye est aussi d’avis que le texte qu’il a vu sur la page facebook de Samuel Sarr « ne mérite pas qu’on s’acharne sur un citoyen parce que nous sommes dans un régime démocratique où l’expression des opinions est encadrée par les lois et règlements de notre pays».
Babacar Gaye assure par ailleurs à Samuel Samuel «le parti démocratique sénégalais lui apporte tout son soutien”, tout en relevant que ce combat est le leur.
ME SIDIKI KABA, SUR L’ARRESTATION DE SAMUEL SARR - LE SENEGAL EST UN ETAT DE DROIT
Le garde des Sceaux, ministre de la Justice, est formel. La justice tirera les conséquences des écrits de Samuel Sarr, si ce sont des affabulations, a-t-il déclaré hier, mercredi 20 août 2014, sur les ondes de la RFM.
D’emblée, l’ancien président de la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) a tenu à rappeler que le «délit d’offense au Chef de l’Etat est une disposition qui existe dans notre législation».
«Vous êtes un citoyen, vous avez votre honneur. Si on vous atteint dans votre honneur parce qu’on vous diffame, la justice doit vous protéger, peut vous entendre. Si vous avez raison, les décisions seront prises dans ce sens”. Mais, s’est-il empressé d’ajouter, si l’on estime que le chef de l’Etat est impliqué dans des choses qu’on le dise et qu’on ait la possibilité de les prouver, alors là, il va de soi, que la justice s’active dans ce sens, de même que la justice tirera les conséquences, si ce sont des affabulations».
Et Me Sidiki Kaba d’ajouter : «je voudrais qu’on sache que l’Etat du Sénégal a le souci des libertés individuelles. C’est un Etat de droit».
«Je veillerai à ce que les libertés fondamentales soient respectées. Mais, il faut aussi veiller à ce que le principe qui gouverne un Etat de droit soit aussi respecté», a-t-il martelé.
Revenant sur l’affaire Karim Wade, le Garde des Sceaux a demandé à la défense de se conformer à la décision rendue par la Cour suprême.
«La Cour a pris sa décision. C’est une haute juridiction. Nous pouvons nous conformer à cela», a indiqué Me Kaba.