Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Femmes    Pratique    Senegal    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Education
Article



 Titrologie



Enquête Plus N° 952 du 18/8/2014

Abonnez vous aux journaux  -  Voir la Titrologie

  Sondage



 Nous suivre

Nos réseaux sociaux



 Autres articles


Comment

Education

Volonté inavouée du gouvernement: La suppression des bourses en marche
Publié le mardi 19 aout 2014   |  Enquête Plus


Le
© aDakar.com par DF
Le Sénégal s`engage à l`élaboration de son Histoire générale
Samedi 29 mars 2014- Séminaire de planification et de programmation du projet d`élaboration d`une "histoire générale du Sénégal des origines à nos jours". Photo: Mary Teuw Niane, ministre de l`enseignement supérieur et de la recherche


 Vos outils




 Vidéos

 Dans le dossier

Un petit retour sur les anciennes sorties du ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et une comparaison avec les actes qu’il pose renseigne sur la volonté secrète que nourrit Mary Teuw Niane : supprimer, par des subterfuges, une bonne partie des bourses des étudiants

La volonté reste jusqu’ici inavouée, mais le train est bien en marche. En revisitant la littérature sur les Bourses de ces deux dernières années, singulièrement depuis que Mary Teuw Niane est à la tête du ministère de l’Enseignement supérieur, l’on se rend compte de l’évidence : on va vers la suppression drastique des bourses des étudiants.

La révélation du professeur Abdou Salam Sall en est une illustration. L’ancien recteur de l’UCAD a fait savoir que la suppression des bourses était à l’ordre du jour depuis 2007. Président de l’assemblée de l’Université à l’époque, il se dit bien placé pour le dire. Avant-hier encore, réagissant à la mort de l’étudiant Bassirou Faye tué par une arme à feu, le Pr Sall a déclaré clairement que la politique actuelle des bourses n’est pas soutenable pour un pays comme le Sénégal. Il demande alors à ce que l’autorité soit franche sur les décisions à prendre. ‘’On ne peut pas engager les réformes, en jouant au plus malin. Il faut dialoguer et dire ce qui se passe’’, invite-t-il.

La fin des «largesses»

Un peu moins de deux ans avant, le journal l’As avait révélé que le gouvernement s’était engagé auprès des institutions de Bretton Woods à mettre fin à la généralisation des Bourses. Le journal écrivait : «Dans le Mémorandum de politique économique et financière que le ministre de l’Economie et des Finances, Amadou Kane, a envoyé à la directrice générale du Fonds monétaire international (Fmi), Christine Lagarde, le 22 juin dernier (ndlr : dont le journal détient une copie), les nouvelles autorités n’ont pas caché leur impuissance à continuer les largesses accordées aux étudiants».

Aujourd’hui, il faut voir la synergie parfaite qui existe entre d’un côté les autorités sénégalaises et de l’autre le FMI et la Banque mondiale. Les contrats de performances en sont une illustration parfaite. Or, ces institutions n’ont jamais caché leur allergie vis-à-vis des sommes directement versées aux acteurs de l’enseignement supérieur, qu’ils soient étudiants ou enseignants. D’ailleurs, en mars dernier, la directrice des opérations de la BM au Sénégal, Vera Songwe, avait créé la polémique en déclarant : ‘’Les professeurs sénégalais à l’Université gagnent cinq fois plus que les professeurs d’Université aux Etats-Unis’’. Une façon d’inviter l’Etat à baisser les salaires. Mais en attendant, la machine pour supprimer un grand nombre de bourses d’étudiants est mise en branle.

Mais son application étant difficile et risquée, le ministre passe par des subterfuges. Le premier a été la forclusion de tout étudiant âgé de 30 ans et plus. Une fois cette pilule avalée, on passe à une autre. Après les 30 ans, le ministre a décidé de ne plus revaloriser automatiquement les bourses en cas d’admission en classe supérieure. Or, lors de la signature des protocoles avec les étudiants, il n’a jamais été question, nulle part, de laisser le taux de la bourse inchangé en cas d’admission en classe supérieur. Parallèlement à cette mesure, le ministre décide de changer les conditions de conservation de la bourse.

Dans un entretien accordé au Journal Le Quotidien le 27 août 2013, Mary Teuw Niane donne quelques détails sur les critères et conditions d’attribution. «Dans la dynamique de bourses, le renouvellement va dépendre des résultats. Quand quelqu’un a une bourse et ne réussit pas, il doit s’attendre, s’il avait une demi-bourse, à la perdre, s’il avait la bourse entière, à perdre la moitié. Si quelqu’un qui n’avait pas de bourse ou qui a une demi-bourse réussit, il doit s’attendre, s’il le demande, à ce que sa bourse soit revalorisée’’. Il a fallu que les étudiants se dressent contre une telle mesure pour qu’il fasse marche arrière

Toujours déterminé à faire appliquer sa politique, le ministre a révélé l’existence de 2 800 bénéficiaires non-ayants droit, et a bloqué l’ensemble des bourses. Au grand dam de milliers d’étudiants dont la bourse demeure l’unique source de revenus.

Absentéisme : comment le prouver

Par ailleurs, cette option de réduire ou de supprimer la bourse est une grande porte ouverte aux abus. Si on prend le cas de l’Ucad, elle renferme l’écrasante majorité des étudiants au Sénégal. Or, dans cette Université, le taux de réussite est estimé à 20%. Si on retient le principe de la perte de la demi-bourse et de la division en deux de la bourse entière, cela veut dire qu’après une année, 80% des étudiants de l’Ucad vont se retrouver avec une demi-bourse ou rien. Dans cette politique, ce sont surtout les facultés à grand nombre, particulièrement les départements populeux avec de faibles taux de réussite qui vont en pâtir.

Pourtant, cela n’a rien de surprenant. Car dans ce même entretien, le ministre a fait savoir qu’il y aura dans les allocations «une discrimination positive en faveur des étudiants qui ont des bacs scientifiques». Or, à l’état actuel de l’éducation, le ré-profilage des élèves vers les sciences n’a pas encore démarré. Il n’existe pas assez de professeurs de maths, physique et chimie et d’équipements pour réorienter les élèves vers les sciences. Ce qui veut dire que les vagues de bacheliers dans les prochaines années seront majoritairement littéraires. «Cette discrimination positive» pourra être donc un bon prétexte pour éliminer le grand contingent de littéraires à l’aspiration à la bourse.

Toujours dans cet entretien, il déclare : « Quelqu’un qui a une bourse et qui n’est pas assidu en classe, dès lors qu’il a atteint le nombre d’absences qui fait qu’il ne fera pas d’examen, il doit s’attendre à ce qu’on lui coupe la bourse. » Il faut se demander dans quelle université et comment une telle décision sera appliquée. A l’Ucad par exemple, il y a des facultés qui n’ont aucun registre de présence. L’étudiant peut s’absenter pendant toute l’année, sans qu’il y ait une trace de son absentéisme. Le ministre devra peut-être préciser les conditions d’application d’une telle mesure.

Mary Teuw poursuit en annonçant la suspension de la bourse à tout étudiant coupable d’une infraction suivie d’une traduction en conseil de discipline. « S’il est fautif, sa bourse sera supprimée, et si bien sûr il n’est pas fautif, sa bourse sera rétablie. » Autrement dit, l’étudiant est déjà sanctionné alors que la preuve de sa culpabilité n’est pas établie. Aux yeux des autorités, il mérite non pas la présomption d’innocence, mais de culpabilité.

Les affrontements à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar durant ces deux dernières années, ainsi que ceux de jeudi dernier ayant abouti à une mort d’homme, ne sont que la suite logique du bras de fer entre un ministre déterminé à appliquer sa réforme par les muscles et des étudiants qui tiennent à leurs bourses comme à la prunelle de leurs yeux.

 Commentaires