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Enquête Plus N° 941 du 4/8/2014

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Accusations du colonel Ndaw sur le verger du Général Fall: La part de vérité de Niagua
Publié le mardi 5 aout 2014   |  Enquête Plus


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© Autre presse
Le Général Abdoulaye Fall quitte son poste d`ambassadeur du Sénégal au Portugal


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Dans son livre sur la Gendarmerie nationale, le colonel Abdoulaye Aziz Ndaw accuse le Général Abdoulaye Fall de disposer d’un verger ultramoderne destiné à l’élevage de vaches d’origine étrangère. Pour une production laitière de type industriel. Mais sur place à Niagua, la réalité est tout autre. La ferme acquise dans les années 1985 par le Général Fall est plutôt tournée vers l’agriculture et l’aviculture. Reportage.


Destination Niagua, à 45 km au Nord Ouest de Dakar. En cette fin d’après-midi estivale, une chaleur d’étuve règne sur la localité. Pourtant, l’océan Atlantique est à seulement 3 kilomètres. Aux vergers et autres fermes agricoles qui meublent le décor du village, il faut désormais ajouter la présence d’autres cités construites il y a quelques années par des sociétés immobilières, dont Socabeg, en partenariat avec l’Etat. Pour recasser les populations de la banlieue victimes des inondations. A quelques encablures de ces constructions en dur, se trouve la fameuse ferme ou le verger du Général Abdoulaye Fall, ancien Haut commandant de la gendarmerie nationale.

A l’entrée, un préposé à la sécurité veille au grain. Taille moyenne, mine sérieuse, Ndoye, c’est son nom, semble surpris par notre présence. Alors, il faut montrer patte blanche avant qu’il ne daigne ouvrir la porte métallique de cette ferme agricole vaste de 7 hectares 661 ares. A l’intérieur, se dresse une imposante serre vaste de 2 hectares. D’une hauteur de 5 mètres, la tente permet de protéger les plantations des intempéries et offre aux plants un environnement idéal. ‘’C’est la dernière acquisition de la ferme suite à un contrat passé avec une entreprise espagnole’’, explique El Hadji Ndoye, le responsable de la serre. Taille d’athlète, look sport, il dit connaître l’histoire de cette serre comme les 5 doigts de sa main.

Général Abdoulaye Fall et la vérité sur la serre

Aussi pense-t-il que, contrairement à une idée répandue, la serre n’a pas été achetée rubis sur ongle par le Général Abdoulaye Fall. ‘’Keur Farba (le nom de l’entreprise qui exploite la ferme) a obtenu un prêt de 150 000 000 millions de la Cncas. Et c’est la banque même qui a payé les Espagnols pour son installation. Nous avons signé un contrat en bonne et due forme et tous les papiers sont disponibles’’, tient-il à préciser, dégoulinant de sueur.

Lui emboîtant le pas, Ndèye Coumba, administratrice de la société Keur Farba, d’ajouter : ‘’Les gens ne cessent de parler du verger du Général Fall, mais il y a longtemps que cette ferme agricole est devenue un GIE avant de se transformer en SARL le 21 novembre 2013. Nous sommes une entreprise qui s’active dans l’agriculture, le maraîchage et l’aviculture. Et comme toute entreprise, nous connaissons des hauts et des bas. Le prêt de la Cncas s’étale sur 5 ans et parfois nous avons des problèmes de trésorerie pour honorer notre versement de 4 100 000 F CFA par mois. Nous avons même eu à solliciter un différé de 6 mois’’.

A cet instant de la conversation, un jeune vient ouvrir la porte de la serre. Ousmane, c’est son nom, travaille dans la ferme depuis des années. Mais depuis 2013, il fait partie du groupe de 7 travailleurs agricoles qui s’occupent uniquement du bon fonctionnement de la serre. A l’intérieur de celle-ci, des rangées de tomates, piments et concombres s’étendent sur des centaines de mètres. ‘’Actuellement, c’est la période de récolte du concombre. Un légume très prisé par les consommateurs’’, renseigne Ousmane, la mine joyeuse.

’’Dehors, un groupe de femmes, des seaux en plastique et autres ustensiles de cuisine en main, sont en train d’acheter du concombre. ‘’La production est d’abord proposée aux femmes de Niagua et des villages environnants, qui s’activent dans le commerce des légumes. C’est seulement après les avoir servies que le surplus est transféré à Dakar pour y être écoulé’’, explique El Hadji Ndoye. Qui au passage s’inquiète du retard de la saison des pluies, même si la ferme dispose d’un système de goutte à goutte bien outillé.

‘’Tissu de mensonges’’ à propos de l’électrification

Par contre, le verger ne dispose pas d’électricité. ‘’Et pourtant, un célèbre avocat (Me Ousmane Sèye) a déclaré lors d’une émission télé que la ferme a été électrifiée par l’Aser’’, s’indigne le jeune homme, pour qui tout un tissu de mensonges a été dit sur la ferme de Niagua. Il en veut pour preuve cette histoire d’électrification de la ferme par l’Aser, alors que c’est un prêt obtenu en 2007, toujours avec la Cncas, qui a permis d’acheter les premiers groupes électrogènes. ‘’En 2007, après la constitution du GIE Keur Farba, la banque nous a accordé un prêt de 70 000 000 F CFA remboursable sur une période de 5 ans et avec un taux d’intérêt de 13%. Et c’est avec cet argent que nous avons pu fructifier les investissements’’, confie l’administratrice de la société. De ses explications, il ressort que Keur Farba a contracté plusieurs prêts au niveau des banques pour diversifier les investissements dans la ferme. ‘’En 2002, le Général Fall a fait un prêt de 6 000 000 en son nom personnel mais, depuis lors, tous les prêts ont été faits au nom du GIE’’, explique Ndèye Coumba, le regard avenant.

Le soleil ne cesse de darder ses rayons, un vent chaud et sec souffle sur la ferme. A côté de la serre espagnole, se dressent fièrement une pépinière et une serre de construction locale à l’intérieur desquelles différentes variétés de tomates et poivrons sont cultivées. Mais ici, pas d’épandeurs à fumier, ni de semoirs, encore moins de moissonneuses batteuses ou de tracteurs agricoles ou fruitiers. Et pour cause, la production agricole se fait dans des vergers avoisinants. ‘’Nous dépensons beaucoup dans l’achat d’aliments de bétail. Ainsi, pour réduire les dépenses, nous prenons en location pendant l’hivernage des vergers pour y cultiver du maïs destiné à l’alimentation de la volaille’’, renseigne M. Ndoye.

En effet, l’aviculture constitue l’une des activités principales de la ferme. Et les principaux fournisseurs de Keur Farba sont les entreprises Ceric et Sedima. D’ailleurs, à la droite de la serre, une batterie de pondeuses est érigée sur plusieurs rangées. Dans un vieux bâtiment. Chaque bande peut contenir entre 3500 et 5000 unités. Le caquetage des poules se fait entendre de partout. Des hommes s’affairent à ramasser les derniers œufs.

Quelques mètres plus loin, une autre batterie de poulettes. ‘’C’est la première batterie achetée par le Général Fall, dans les années 1990, après son retour d’Irak. Et c’est Madame Diao épouse du patron de Itoc qui le lui a cedée’’, informe Talla, responsable du département avicole. En cette veille de fête de Korité, il est trop sollicité. D’ailleurs la ferme ne désemplit plus. Les acheteurs viennent de tous les coins. Conséquence, la demande est supérieure à l’offre. Certains achètent sur patte, d’autres exigent la version déplumée. Mais la ferme ne dispose pas de ‘’déplumeuse’’. Par conséquent, ‘’après avoir égorgé les poulets aux hormones ou poulets de chair, on est obligé de les déplumer ailleurs, moyennant 100 F CFA par unité’’, renseigne le responsable du secteur avicole.

Les vaches brésiliennes et hollandaises

A en croire ce dernier, entre ce qui se dit et s’écrit sur le verger de Niagua et la réalité, il y a un grand fossé. Il en est ainsi de l’histoire des vaches brésiliennes et hollandaises. ‘’Si dans la ferme nous faisons de l’élevage, c’est surtout à caractère familial. En bon Djolof-Djolof, Abdoulaye (Général Fall) élève un troupeau de moutons et de vaches’’, fait remarquer Talla. Dans un enclos tenu tout prêt du bâtiment servant de locaux administratifs au personnel de la société Keur Farba, une vingtaine de ruminants broutent tranquillement de l’herbe que vient de déverser sur les lieux un vacher. Dans ce troupeau, l’on dénombre facilement en ce jour 6 vaches d’origine étrangère.

En réalité, elles sont de races brésilienne (4) et hollandaise (2), le reste étant constitué de vaches locales. Dans ces conditions, pas de machine à traire ni de tank à lait. ‘’Ils sont nombreux ceux qui pensent que nous élevons des centaines de vaches de race brésilienne ou hollandaise dans la ferme. Mais la réalité est tout autre. Nous produisons à peine 30 litres de lait par jour. D’ailleurs, cette quantité est achetée sur place par les villageois. A ce que je sache, il n’y a rien d’extraordinaire à cela’’, fulmine le mandataire de Keur Farba qui a du mal à cacher sa colère ‘’face à tant de contrevérités distillées sur la ferme de Niagua’’.

Un verger qui dispose d’une cinquantaine de plants de citron comme unique arbre fruitiers. Même si au gré des saisons la fraise y est aussi cultivée, mais pas en quantité industrielle. Le vent ne cesse de souffler. De loin, l’on aperçoit quelques palmiers et autres arbres. ‘’Keur Farba’’ à l’image du village de Niagua est dans l’effervescence à quelques jours de la fin du mois béni de Ramadan. Rideau !

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