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Sud Quotidien N° 6376 du 2/8/2014

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El Hadj Barry Kamara, enseignant à la FSJP sur la constitution d’avocat des ministres et premier ministre dans le procès de Karim Wade: "Ils ne peuvent plaider contre l’Etat"
Publié le dimanche 3 aout 2014   |  Sud Quotidien


Le
© aDakar.com par DF
Le procès de Karim Wade s`est ouvert à Dakar
Dakar, le 31 Juillet 2014 -Karim Wade, le fils de l`ex- président de la république du Sénégal, a fait face aux juges de la Cour de Répression de l`Enrichissement Illicite (CREI). Ancien ministre durant le règne de son père, Karim Wade est accusé de s`être enrichi de façon illicite.


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Le procès de Karim Wade est suspendu à l’appréciation des exceptions soulevées aussi bien par les avocats de la défense que ceux de la partie civile. Pendant que la cour est attendue sur l’irrecevabilité ou non de la constitution de certains avocats de la défense et celle de la partie civile de l’Etat du Sénégal, El Hadj Iba Barry Kamara, enseignant à la faculté de droit (Ucad) donne son avis. Dans l’entretien qu’il nous a accordé, il revient sur les exceptions soulevées, la compétence de la cour à statuer sur cette question, ainsi que sur l’éventualité de faire témoigner les présidents Abdoulaye Wade et Macky Sall etc.

Me El hadj Diouf a fait référence à l’article 11 de la loi relative à l’ordre des avocats pour récuser la constitution d’avocats de Karim Wade qui ont rempli les fonctions de ministres et Premier Ministre. Quelle est votre appréciation ?

Les fonctionnaires ou tout agent quelconque de l’Etat n’est pas habilité, durant trois ans, après cessation des activités, à exercer un acte de profession contre l’Etat. Ce sont des dispositions qui sont très claires. En l’espèce, il se pose une question claire consistant à savoir si les anciens ministres et Premier Ministre peuvent se constituer contre l’Etat. Si on se réfère à l’article 11 de la loi relative à l’ordre des avocats, on se rend compte qu’ils ne peuvent plaider contre l’Etat, les collectivités publiques territoriales ou décentralisées ou les administrations relevant de l’Etat. Il y a manifestement une interdiction de constitution d’avocat de leur part.

Croyez-vous à la compétence de la cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) pour se prononcer sur la légalité de cette constitution d’avocats, si l’on sait que les manquements à cette disposition sont sanctionnés sur le plan disciplinaire par le bâtonnier ?

Nous avons affaire à une loi. Elle s’applique à tout le monde. Si l’on réfère à la loi 2009-25 relative à l’ordre des avocats, il apparait que les sanctions prévues sont disciplinaires. Mais la sanction disciplinaire ne signifie pas rester inerte et attendre la commission de l’infraction. Parce que la violation de la loi est constitutive d’une infraction. Est-ce que la cour devrait pouvoir donner aux avocats la possibilité de se constituer ? Je ne crois pas, dans la mesure où il y a une interdiction manifeste clairement définie par la loi. Si la cour n’en savait rien, c’est en ce moment que l’on songerait à la sanction. Puisqu’a priori, la cour est informée. Normalement, elle ne devrait pas admettre la constitution d’avocats.
Ce qui est bizarre, c’est que la cour devrait se prononcer depuis longtemps sur cette question. En réalité, il y a un problème. Parce que la constitution d’avocats doit être portée à la connaissance du greffe. A partir de là, des constitutions pourront être acceptées ou rejetées.

Au procès de Karim Wade, les avocats de la défense ont soulevé l’impossibilité de la constitution de partie civile de l’Etat du Sénégal en se basant sur certaines dispositions de la cour de répression de l’enrichissement illicite qui ne prévoient pas la possibilité pour l’Etat de demander des dommages et intérêts des condamnés.
Au regard de la loi sur l’enrichissement illicite, l’Etat du Sénégal peut-il se constituer partie civile ?

L’Etat peut bel et bien être partie au procès. L’Etat est une personne morale et c’est lui qui a eu à subir les préjudices de ces actes que l’on qualifie d’enrichissement illicite. Qu’est-ce qui subit les préjudices ? C’est tout à fait normal que l’Etat se constitue en tant que personne morale pour demander des dommages et intérêts à cause des préjudices subis. Au terme de la loi portant cour de répression de l’enrichissement illicite, l’Etat n’ira pas jusque- là. Il ne pourra demander qu’une seule chose prévue par la loi : la condamnation des auteurs, mais également la restitution de tous les biens déclarés mal acquis. En clair, tout ce que l’Etat peut faire, c’est de constater la commission de l’infraction d’enrichissement illicite avec les conséquences qui en découlent, c’est-à dire la restitution de tous les biens mal acquis. Il faudrait que l’on remette l’Etat dans ses droits du point de vue pécuniaire.

Du côté des avocats de la défense, on récuse le député Me El hadj Diouf et le Président du conseil départemental, Me Moustapha Mbaye la possibilité de se constituer pour l’Etat du Sénégal. L’article 11 leur est-il également opposable ? Qu’en est-il en réalité ?


Il est vrai que la loi n’est pas très claire, mais si on se réfère aux articles reformés régissant l’Assemblée nationale et à l’article Lo 164 du code électoral, il apparait clairement que ce qui est interdit à l’avocat inscrit au barreau ayant un mandat électif, c’est simplement de ne plaider ou de constituer contre l’Etat. Donc, à contrario les deux avocats constitués par l’Etat ne sauraient être frappés par cette interdiction.
Au-delà du caractère restrictif de ces dispositions, parce que la loi dispose qu’elles ne peuvent accomplir des actes de profession à l’occasion desquelles les poursuites pénales sont engagées devant des juridictions répressives pour crime ou délit contre la chose publique en matière de presse ou d’atteinte de crédit et à l’épargne. il est interdit à l’avocat dans les mêmes conditions de plaider contre l’Etat. Là où il y aurait un problème, c’est lorsque ces deux avocats se seraient constitués au profit de la partie poursuivie.
Par conséquent, au regard de la loi, il n’y a aucune interdiction si l’on se réfère au règlement intérieur de l’Assemblée nationale et la loi ordinaire relative au code électoral. Il y a manifestement rien qui s’oppose à ce que les avocats se constituent pour l’Etat.

Quid des convocations de Macky Sall et d’Abdoulaye Wade comme témoins. Est-ce possible ?

C’est possible, mais on est dans une démocratie exigeante. En réalité est-ce qu’ils sont convoqués ? C’est une chose que de demander la comparution de personnes en qualité de témoins, c’est également une autre chose que de les convoquer pour s’assurer de leur présentation à l’audience. Aussi pour la partie demanderesse, il faut un motif sérieux de présentation qui pourrait rencontrer la conviction du juge.

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