A l'heure de l'entrée en vigueur des mesures du Conseil présidentiel sur les Concertations nationales sur l'Avenir de l'Enseignement supérieur (Cnaes), une année invalide plane à l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar. En effet, à la considération des grèves répétitives qui ont secoué l'année universitaire, l'assemblée des facultés hormis celle de Médecine, a décidé la tenue d'une session unique des évaluations. Pour l'année 2013-2014, pas de sessions de rattrapage. Une décision que les étudiants voient comme une politique visant la réduction drastique du nombre d'étudiants et n'entendent pas l'accepter. Ils ont décrété hier un mot d'ordre de 72 heures de grève renouvelable. Mais pour le Syndicat autonome de l'Enseignement supérieur (Saes) il s'agit d'une décision scientifique dans une année anormale.
L’Assemblée des facultés de l’Université Cheikh Anta Diop a décidé d’organiser une session unique pour les examens de l’année académique 2013-2014 pour respecter les 30 semaines de cours et attendre par ricochet la qualité de l’enseignement au regard des exigences du système LMD (Licence, Master et Doctorant). Cette décision fait suite en effet aux grèves répétitives des étudiants, liées notamment à des revendications pour le paiement des droits d’inscriptions, les bourses, le master pour tous et l’orientation des nouveaux bacheliers. Rappelons que cette année inaugure l’application des mesures du Conseil présidentiel sur les Concertations nationales sur l’Avenir de l’Enseignement supérieur (Cnaes).Les différents responsables des facultés réunis autour de l’assemblée de l’université soutiennent mordicus que cette décision est motivée par les mouvements d’humeur des étudiants qui ont fini par plomber le quantum horaire.
A l’Université de Dakar, les étudiants opposent un niet catégorique à la session unique qui est sur toutes les lèvres. Devant la faculté des Lettres et Sciences humaine dont le doyen, Amadou Abdoul Sow, n’a pas voulu se prêter aux questions de la presse, prétextant que les journalistes attisent le feu, l’ambiance est au rendez-vous en cette fin de matinée très ensoleillée.
Les effets de la forte canicule et ceux de la période de Ramadan se lisent sur les visages de la plupart des étudiants présents dans le hall. C’est la période des préparatifs des examens. Chacun se rapproche des tableaux d’affichage, stylo et feuille à la main, pour relever les dates d’examens. Un étudiant, d’un ton sérère, vêtu d’une tenue traditionnelle d’une couleur marron assortie d’une écharpe de même couleur, engage une discussion avec son camarade étudiant dans le hall du bâtiment où siègent les professeurs d’histoire. Il laisse entendre sans ambages que « nous allons payer les pots cassés. Les autorités essayent de sauver l’année. C’est anormal ».
C’est le même son de cloche pour cette étudiante en master 1 au département d’Anglais qui presse le pas pour aller à la rencontre de son encadreur. Pour Mlle Tine, « voilà une décision aux conséquences graves. Ils sont entrain de sacrifier les étudiants. Et de poursuivre : ils veulent accélérer la politique de réduction des étudiants dans les différentes facultés. Nous sommes déjà en surnombre en master au département d’Anglais ».
Admettant que c’est une décision inopportune que les étudiants n’entendent pas accepter, Saer Diop parle de la mise en branle d’une politique de réduction drastique des étudiants à l’Université de Dakar. L’étudiant au département de Géographie a estimé que «malgré les deux sessions, le nombre de redoublants et de cartouchards restent élevé dans les facultés».
«La majeure partie des étudiants valide leur unité d’enseignement après le rattrapage. Un département peut se retrouver avec seulement 100 admis», a t-il ajouté.
SAES : c’est une décision pédagogique scientifique puisque l’année est anormale
Le Syndicat autonome de l’Enseignement supérieur (Saes) parle d’une décision scientifique et pédagogique.Car, renseigne le professeur Moustapha Sall, cette année est anormale.
Le chargé des revendications du Saes a laissé entendre que les assemblées de département se sont rendu compte qu’avec le système LMD l’année devait être invalidée à l’heure actuelle. C’est pourquoi, dit-il, que la décision scientifique qui sied le plus est d’invalider l’année, en termes de pédagogiques.
«Il suffit que les étudiants fassent une semaine encore de grèves pour que l’année soit déclarée invalide. Il y va de la crédibilité de l’Université sénégalaise, a t-il ajouté.
Indexant du coup la responsabilité de l’Etat, notamment le ministre tutelle face à l’application des directives de la Cnaes, source de problèmes à l’Ucad, le professeur Sall s’interroge : faut-il sacrifier les jeunes qui payent pour une politique pas assez planifiée et consensuelle ?