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Deuxième session extraordinaire de l’année 2024: rapport de la Commission des Lois, de la Décentralisation, du Travail et des Droits humains sur le projet de loi N°11/2024 portant révision de la Constitution
Publié le mardi 3 septembre 2024  |  aDakar.com
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Monsieur le Président,
Messieurs les Ministres,
Chers Collègues,

La Commission des Lois, de la Décentralisation, du Travail et des Droits humains s’est réunie le samedi 31 août 2024, sous la présidence de Monsieur Moussa DIAKHATE, Président de ladite Commission, à l’effet d’examiner le projet de loi n°11/2024 portant révision de la Constitution.

Le Gouvernement était représenté par Monsieur Ousmane DIAGNE, Ministre de la Justice, Garde des Sceaux et Monsieur Yankhoba DIEME, Ministre du Travail, de l’Emploi et des Relations avec les Institutions, assistés de leurs principaux collaborateurs.

Ouvrant la séance, Monsieur le Président a, d’abord, au nom de la Commission, souhaité la bienvenue à Messieurs les Ministres et à leurs collaborateurs. Il leur a, ensuite, adressé ses félicitations et encouragements, avant d’inviter Monsieur le Ministre de la Justice, Garde des Sceaux à présenter l’exposé des motifs justifiant l’élaboration dudit projet de loi.

À l’entame de son propos, Monsieur le Ministre a adressé ses chaleureuses salutations à Monsieur le Président et à tous les membres de la Commission. Il s’est, ensuite, réjoui d’être devant les Représentants du peuple, pour aborder la réforme proposée par le Gouvernement.

Relativement à l’exposé des motifs, Monsieur le Ministre a indiqué que la transformation systémique voulue, dans la mise en œuvre du « Projet pour un Sénégal souverain, juste et prospère », nécessite de réviser la liste des Institutions de la République.

En effet, la rationalisation, dira-t-il, des charges publiques et l’optimisation des ressources de l’État exigent la dissolution de certaines Institutions constitutionnelles.
Monsieur le Ministre a clos sa lecture de l’exposé des motifs en précisant que la dissolution du Haut Conseil des Collectivités territoriales (HCCT) et du Conseil économique, social et environnemental (CESE) vise, dans le cadre de la consolidation d’un pragmatisme institutionnel, l’amélioration du système de prise de décision des pouvoirs publics et la réduction notable du train de vie de l’État.

Intervenant à leur tour, vos Commissaires ont adressé leurs félicitations et encouragements à Messieurs les Ministres, avant de faire part de leurs préoccupations et suggestions qui, pour l’essentiel, se résument aux points ci-après :
D’emblée, certains Commissaires ont rappelé qu’à l’occasion de la dernière élection présidentielle, le Chef de l’État, Bassirou Diomaye Diakhar FAYE, avait pris l’engagement de rationaliser les institutions, notamment, en supprimant celles jugées budgétivores. En soumettant à la Représentation nationale cette présente réforme qui vise la suppression du HCCT et du CESE, il respecte sa parole et honore ainsi son engagement.

Ils ont, dans la même veine, déclaré que les députés issus de l’inter coalition Yewwi-Wallou avaient considéré que ces deux (02) institutions étaient non seulement budgétivores, mais socialement rejetées et politiquement inutiles.

Selon eux, celles-ci n’ont jamais produit un avis sur lequel le Chef de l’État s’est appuyé, pour engager une réforme majeure en vue d’améliorer les conditions socio-économiques des populations. D’ailleurs, beaucoup de sénégalais ignorent le rôle ou l’apport de ces institutions qui coûtent cher à l’État et ne servent qu’à caser une clientèle politique.

S’agissant du HCCT, diront-ils, il n’est pas parvenu à apporter une solution appropriée permettant de mettre fin à la grève des travailleurs des collectivités territoriales qui dure depuis des années. En outre, ils ont mentionné l’existence d’un chevauchement entre les missions du HCCT et celles dévolues à certains services de l’État tels que l’Agence de Développement municipal (ADM), l’Agence de Développement local (ADL) et l’Agence nationale de l’Aménagement du Territoire (ANAT).

Sous ce regard, ils ont affirmé n’avoir jamais voté le budget du CESE et du HCCT et ont toujours refusé de participer aux élections des haut-conseillers.

Par conséquent et dans un souci de cohérence et de constance, ils ont prôné leur suppression qui permettra d’économiser 15,3 milliards de FCFA chaque année, soit plus de 70 milliards de FCFA au bout de cinq (05) ans. Ces montants, préconiseront-ils, pourraient être investis dans des secteurs prioritaires tels que la santé, l’éducation, l’artisanat, la lutte contre l’émigration irrégulière et l’insécurité, notamment, dans la banlieue.

A ce niveau, ils ont fait noter que le Sénégal traverse actuellement une situation financière difficile qui exige aux acteurs politiques, de toute obédience confondue, de prendre leurs responsabilités en s’affranchissant de leur manteau politicien. Les sénégalais, souligneront-ils, ont décidé de confier au Président de la République, Bassirou Diomaye Diakhar FAYE, les destinées du pays en validant l’offre politique proposée qui vise la transformation systémique, avec 54,28% des voix au premier tour.

Ils en appellent ainsi au sens des responsabilités de tous les députés qui doivent faire l’effort de s’élever au-dessus des clivages partisans, pour mettre en avant l’intérêt du Sénégal en votant favorablement ce projet de loi.

Cette posture républicaine permettra de tirer les conséquences de l’élection présidentielle, d’autant plus que, depuis l’indépendance, chaque Président de la République nouvellement élu opère des réformes institutionnelles majeures en parfaite cohérence avec sa vision politique, ont-il rappelé.

Toutefois, d’autres Commissaires ont estimé que le décret pris par le Président de la République portant convocation de l’Assemblée nationale tranche tant dans sa forme que dans son contenu, ainsi que ses motivations profondes avec l’élégance républicaine et l’impératif du respect mutuel entre les institutions. Pour preuve, les Honorables Députés, y compris le Président de l’Assemblée nationale, ont appris cette réforme sur les réseaux sociaux au même moment que les sénégalais, à travers le communiqué de la Présidence de la République en date du jeudi 26 août 2024.

L’élégance républicaine, ont-ils précisé, aurait voulu que l’initiateur de ce texte, en l’occurrence le Chef de l’État, puisse engager en amont des discussions avec le Président de l’Assemblée nationale, la majorité parlementaire et les personnes morales des deux (02) institutions concernées, avant de saisir officiellement la Représentation nationale, étant entendu qu’au Sénégal le dialogue est inscrit au cœur de notre système démocratique. La récente réforme du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale, fruit du dialogue entre les différentes entités parlementaires administrativement constituées, l’illustre parfaitement.

Parallèlement, ils ont fait remarquer que la présentation du présent texte devait être précédée par la tenue de la Déclaration de Politique générale (DPG) du Premier ministre, pour décliner les grandes orientations politiques du nouveau Gouvernement.

En lieu et place, il est proposé la suppression du HCCT et du CESE, deux institutions majeures qui jouent un rôle extrêmement important dans la vie socio-éco de notre pays.

Ils ont rappelé, à ce propos, que la mise en place du HCCT est inspirée par les conclusions des Assises nationales afin de servir de passerelle de communication entre les collectivités territoriales et le Gouvernement. Cette dernière institution, diront-ils, a beaucoup travaillé pour parfaire les réformes sur la Contribution économique locale/Valeur ajoutée (CEL VA), le Partenariat public-privé (PPP) et sur la territorialisation des politiques publiques, entre autres.

En ce qui concerne le CESE, la plupart de ses membres n’ont aucune coloration politique. Il s’agit d’experts et spécialistes issus, notamment, de l’Ordre des avocats du Sénégal, de l’Ordre des Architectes du Sénégal, de l’Association des Handicapés (sourds-muets), des syndicats, du Conseil national de la Jeunesse, des organisations des femmes rurales et des écologistes, ont-ils informé.

Relativement aux sénégalais ayant porté au pouvoir le Chef de l’État avec 54,28% des voix au premier tour, il a été précisé que ce pourcentage concerne uniquement les électeurs et non la population sénégalaise prise dans sa globalité. En effet, lors de la dernière élection présidentielle, 4 485 128 bulletins ont été valablement exprimés. Sur ces bulletins, le Président Bassirou Diomaye Diakhar FAYE a obtenu 2 485 128 voix et les autres candidats réunis ont enregistré 2 050 377 voix, soit une différence de 384 374 voix au profit du Président Bassirou Diomaye Diakhar FAYE.

Ces chiffres, ont-ils révélé, montrent que, sur une population de plus de 18 millions d’habitants, seuls 2 485 128 sénégalais ont effectivement adhéré au projet politique du Président de la République.

Poursuivant leurs propos, ils ont souligné que, compte tenu du fait que cette réforme relève d’une promesse de campagne électorale, le Chef de l’État aurait dû y inclure la suppression des fonds communs, des fonds politiques logés à la Présidence et à la Primature, mais surtout la criminalisation de l’homosexualité qui étaient également des promesses de campagne.

Selon eux, en initiant ce projet de loi, le Président de la République cherche à la fois à camoufler certains scandales du Gouvernement comme celui impliquant l’ONAS et à mettre, par la même occasion, les députés élus sous la bannière de la coalition du Benno Bokk Yaakaar en mal avec les sénégalais en cas de rejet du texte, pour en faire un argument de campagne lors des prochaines élections législatives.

La nomination récente, soutiendront-ils, du Haut Représentant du Président de la République qui bénéficie de privilèges jugés inutiles aux frais du contribuable sénégalais met à nu l’argument de la rationalisation des charges publiques et de l’optimisation des ressources qui sous-tend la réforme proposée.

Ils ont, sur ce point, déclaré que si bon nombre de députés de la Législature en cours n’ont pas de véhicule, c’est parce que l’ancien régime avait opté pour la rationalisation des charges publiques. Il en est de même de l’économie sur la facture téléphonique, sans oublier les injonctions données à l’Administration pour effectuer des achats groupés.

De leur avis, la suppression de ces deux (02) institutions est inopportune et ne constitue pas une priorité car les sénégalais attendent urgemment des réformes sur le logement, l’habitat, le crédit-bail, la sécurité routière, la Justice, singulièrement le Conseil supérieur de la Magistrature, et des mesures appropriées pour mettre fin à l’émigration irrégulière, entre autres.

Enfin, pour faciliter davantage la compréhension de cette réforme, une proposition d’amendement a été annoncée visant à améliorer la rédaction des dispositions. De même, il a été demandé à Monsieur le Ministre si la dissolution de certaines institutions mentionnée dans l’exposé des motifs renvoie à la même réalité que la suppression des institutions.

Reprenant la parole pour faire suite aux interpellations de vos Commissaires, Monsieur le Ministre les a vivement remerciés pour la qualité des débats et le sens élevé des responsabilités dont ils ont fait montre en exprimant leur point de vue en toute liberté, avant d’apporter les éléments de réponse ci-après :

Dans ses propos liminaires, Monsieur le Ministre a précisé que sa qualité de magistrat lui exige de s’abstenir à aborder les questions portant sur des considérations politiciennes, quand bien même les fonctions ministérielles demeurent éminemment politiques. Il a, dans ce sens, indiqué que les principes éthiques, le respect des divergences d’idées, ainsi que le débat contradictoire font le charme de la démocratie et réconfortent le droit à la différence qu’il promeut en permanence dans ses actions.

Réagissant sur l’interpellation relative à la différence entre la dissolution et la suppression des institutions, il dira que la dissolution traduit l’action de dissoudre, tandis que la suppression renvoie à l’action de supprimer. Néanmoins, l’utilisation de l’une ou l’autre notion dans le texte vise tout simplement la disparition de certaines institutions dans l’ordonnancement institutionnel, a-t-il précisé.

De surcroît, le caractère succinct, indiquera-t-il, de la teneur de l’exposé des motifs témoigne de sa clarté suffisamment établie permettant de lever le doute sur une quelconque ambiguïté supposée ou réelle du projet de loi. Pour conclure sur ce sujet, Monsieur le Ministre a fait comprendre que la révision de l’article 6 de la Constitution a pour objet de supprimer le CESE et le HCCT de la liste des Institutions de la République du Sénégal.

En outre, il dira que cette réforme n’a d’autres fondements et objectifs que la rationalisation des charges publiques et l’optimisation des ressources de l’État.
Par ailleurs, Monsieur le Ministre a rappelé que, conformément à ses prérogatives constitutionnelles, le Président de la République est dans son rôle de soumettre à la Représentation nationale des projets de loi qu’il estime nécessaire. Parallèlement, le Parlement est aussi investi des mêmes pouvoirs qui lui reconnaissent la latitude d’apprécier souverainement les projets de loi qui lui sont soumis.

Par conséquent, ajoutera-il, autant le Président de la République est fondé à soumettre ledit projet de loi aux Honorables Députés, autant ces derniers sont fondés à donner la réponse qui leur semble la plus opportune et la plus conforme à leurs convictions.

En guise de conclusion, Monsieur le Ministre informera que, quelle que soit la décision qui ressortira des débats, il se pliera à la volonté des Représentants du peuple. Toutefois, le Gouvernement qu’il a l’insigne honneur de représenter en tirera toutes les conséquences qu’il juge appropriées, a-t-il ajouté.

Suite aux réponses apportées par Monsieur le Ministre, vos Commissaires ont rejeté, à la majorité, le projet de loi n°11/2024 portant révision de la Constitution. Ils vous demandent d’en faire autant, s’il ne soulève, de votre part, aucune objection majeure.

PAR
M. Abdoulaye DIAGNE
RAPPORTEUR
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