KEUR MATABARA (Sénégal), 31 mai 2014 (AFP) - Le comédien Jacky Ido est né au Burkina Faso, a grandi dans la banlieue parisienne et vit aujourd'hui entre la France et les Etats-Unis, où il a joué dans la série "Taxi Brooklyn". Cela fait "une espèce de triangle identitaire qui me convient assez", résume-t-il.
Ce grand Noir au physique d'athlète - il mesure près de 1m90 - et au large sourire a séjourné cette semaine au Sénégal avec les chanteurs français Cali et Christophe Mali en compagnie de l'ONG One dans le cadre d'une campagne contre une réduction de l'aide publique au développement de la France.
Dans un entretien avec une journaliste de l'AFP à Keur Matabara, petit village de l'ouest du Sénégal, il se présente simplement comme "un Franco-Burkinabè qui a grandi entre Ouagadougou et Stains", en Seine-Saint-Denis, près de Paris, et est devenu "comédien et réalisateur".
"Mon vrai prénom, c'est Jean-Jacques, mais moi-même je l'ai découvert en arrivant au primaire, lorsque mon institutrice a fait l'appel" des élèves au premier jour d'école, raconte-t-il, assis dans le sable à l'ombre d'un arbre.
"Mes grands-mères avaient du mal à prononcer Jean-Jacques, on m'a appelé Jacky dès le berceau" à Ouagadougou.
C'est dans cette ville qu'il est né le 14 mai 1977. En 37 ans, il a fait du chemin, croisant sur sa route des cinéastes de renom qui l'ont fait jouer dans certains de leurs films: l'Allemande Hermine Huntgeburth dans "La Massaï blanche", l'Américain Quentin Tarantino dans "Inglourious Basterds", les Français François Dupeyron dans "Aide-toi, le ciel t'aidera" et Claude Lelouch dans "Ces amours-là" et "Salaud, on t'aime".
Polyglotte - il parle notamment français, anglais, allemand et n'a pas oublié le moré et le bambara de son enfance au Burkina Faso - il a aussi joué dans plusieurs films et séries pour la télévision, dont "Engrenages", "Tropiques amers", la dernière série en date étant "Taxi Brooklyn", une superproduction franco-américaine tournée à New York. Elle est diffusée
actuellement en France, en attendant de l'être en juin aux Etats-Unis.
Pour Jacky Ido, le cinéma est également une affaire de famille: il a tourné sous la direction de son frère cadet, Cédric Ido, comédien-réalisateur ("Hasaki ya suda", "Twaaga"), dont il parle avec affection.
Jacky Ido ne fait pas que jouer et réaliser (seul, comme avec "La descente", ou au sein d'un collectif créé avec son frère), il écrit aussi: pour le cinéma et comme slameur sous le pseudonyme de John Pucc'Chocolat. Il a régulièrement partagé la scène avec son ami Grand Corps Malade, avec lequel il a fondé "Slam'Aleikoum", forum pour amateurs et professionnels du slam en France.
- "Tous les métiers du monde en un" -
Formé à Paris en langues étrangères appliquées au commerce, puis en littératures et civilisation américaines, il a toujours eu les mots et le cinéma au coeur.
"Petit, je faisais des concours littéraires pour gamins. J'adorais écrire! Je voulais en faire un métier. Mais comme on me pressait de choisir une filière, à 12 ans, j'ai dit: +Je veux être cinéaste!+, parce que là, au moins, je peux faire tous les métiers du monde en un", explique-t-il.
"Je me suis toujours employé, dans mon temps libre, en dehors de l'école, à apprendre, à lire, à faire des courts métrages pour m'exercer, apprendre de mes erreurs, faire le +rat de plateau de tournage+ pour glaner des infos..." Une persévérance payante pour ce fils d'immigrés burkinabè --un infirmier anesthésiste cinéphile, aujourd'hui décédé, et une biologiste amatrice de cinéma indien.
Aujourd'hui, "j'ai la chance d'être entre l'Europe et les Etats-Unis avec, de plus en plus, une présence en Afrique. (...) Je suis dans une espèce de triangle identitaire qui me convient assez", dit-il.
Jacky Ido a plusieurs ambitions et projets intéressant son continent d'origine, mais préfère ne pas les dévoiler dans l'immédiat. "Il y a plein de choses à raconter, qui peuvent transcender notre condition d'Africains et parler à tout le monde. (...) Et le fait d'être présent sur les trois
continents me permet aussi de pouvoir drainer un peu plus de fonds pour faire de belles épopées en Afrique aussi", affirme-t-il.
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