Et si la Justice sénégalaise avait failli ?
A l’origine de la vieille affaire judiciaire opposant l’ex-député Alcaly Cissé à l’industriel saoudien Aly Mohamed Azouze, une gigantesque « opération » de vente de bois. Une transaction de plus de deux milliards fcfa. Le principal appât utilisé à l’époque par le député Alcaly Cissé avait consisté à faire croire à sa victime qu’il était l’ultime fils héritier d’un royaume qui s'étend sur une vaste forêt riche en bois à l’est du Sénégal. Ce royaume forestier riche en bois de venn dont parlait l’homme d’affaires Alcaly Cissé, n’était autre que la forêt de Casamance.
Jouissant de tous les privilèges de la République, l’homme d’affaires Alcaly Cissé, grâce à des complicités, avait fait passer son hôte saoudien au salon d’honneur de l’aéroport de Dakar-Yoff, histoire de lui montrer qu’il n’était pas n’importe qui dans ce Sénégal ! Lui, le fils de roi ; lui, le propriétaire d’une immense forêt de bois composée d’espèces précieuses ; lui, l’influent homme politique ; lui, le conseiller spécial du président de la République ; lui, l’honorable chef religieux etc… Encore, encore, pour mieux ferrer le milliardaire saoudien, Alcaly Cissé avait loué un hélicoptère pour lui faire visiter son « royaume ».
Aux cotés d’Aly Mohamed Azouze, et avec son complice Lamine Ndiaye, à l’époque époux de la défunte veuve du milliardaire Djily Mbaye, Aminata Sourang, ils avaient fait survoler la forêt casamançaise à leur partenaire ébloui qui n’en revenait pas de tant de bois. Normal, on était en Casamance ! Ils lui avait fait croire que toute cette forêt leur appartenait. Avant cela, Lamine Ndiaye l’avait séjourner au château de Djily Mbaye à Louga où la vue de tout cet or jusque dans les salles de bain, les lustreries et bois précieux, les lambris, les nombreux domestiques… tout cela lui avait fait tourner la tête.
Pas de doute, il avait affaire à de richissimes hommes d’affaires. Dans la contrée des « Cissé » où l’homme Alcaly Cissé et son hôte saoudien s’étaient posés en hélicoptère, parents et villageois, fascinés par l’engin volant, se mettaient pieusement à genoux pour les saluer.
Ayant un large aperçu de l'immensité de la forêt et de la dimension de l’homme sénégalais, Mohamed Azouze tomba dans le panneau ! Ce qui était dramatique et émouvant, c’est que l’homme d’affaires saoudien Mohamed Azouze avait investi tout l’héritage financier de sa famille dans cette « opération » de bois qui n’était que du toc ! Une opération sur fond d’escroquerie et d’abus de confiance à grande échelle que « Le Témoin » avait révélée à l’époque. A Dakar comme à Paris, les deux hommes d’affaires s’étaient plusieurs fois retrouvés pour l’exécution de l’opération de vente de bois. Face à l’exigence d’Alcaly Cissé, Mohamed Azouze aurait décaissé plusieurs sommes jusqu’à la hauteur de plus de deux milliards fcfa. Ce sans compter les montres en or et en diamant que le saoudien avait offertes à l’ex-député pour l’encourager dans l’exécution du marché.
Hélas, à l’arrivée, le Saoudien n’avait rien vu et avait été roulé dans la farine ! Flairant trop tard avoir affaire à un escroc, Mohamed Azouze avait déposé une plainte auprès des juridictions sénégalaises pour les délits de faux, usage de faux et abus de confiance portant sur plus de deux milliards fcfa. C’était le début d’un long bras de fer judiciaire dénommé « dor marteau » (rouler dans la farine).
Condamné en première instance par la justice sénégalaise, Alcaly Cissé avait interjeté appel. Et là, on ne sait pas encore jusqu’ici comment Alcaly Cissé avait réussi la prouesse judiciaire de renverser la tendance pour se faisait « blanchir ». « Blanchi » par la justice de son pays, notre pays ! Les avocats sénégalais du plaignant saoudien s’arrachaient les cheveux, s’étranglaient de rage devant une telle décision. Pour sauver la fortune familiale en passe de se volatiliser au pays des « dor marteau », Mohamed Azouze avait saisi la justice de son pays, laquelle avait lancé un mandat d’arrêt international contre Alcaly Cissé.
Lequel était devenu entretemps un honorable député sénégalais, malgré les multiples mises en garde du « Témoin » à l’époque disant que le Pds avait investi sur sa liste un escroc. Mais le parti de Wade avait besoin d’un homme très riche pour financer sa campagne dans la région de sédhiou et des sous, Alkaly en avait !
Heureusement que la justice saoudienne et des organisations comme Interpol existent qui permettent de limiter les risques d’impunité pour certains escrocs ou faussaires internationaux. Et surtout quand il s’agit d’affaires d’escroquerie transnationale comme celle opposant le Sénégalais Alcaly Cissé au Saoudien Mohamed Azouze. A preuve, l’intouchable « roi » Alcaly a été rigoureusement condamné par la justice saoudienne pour escroquerie. Une justice qui a lancé un mandat d’arrêt international contre l’ex-député sénégalais par le biais d’Interpol. Arrêté au Maroc et ré-extradé vers l’Arabie Saoudite, il risque la peine de…mort ! Alcaly Cissé sera-t-il décapité par la Charia ? Va-t-il mourir dans les prisons saoudiennes ? Autant de questions qui ont eu à soulever une véritable levée de boucliers démagogiques.
Toute une chaîne de solidarité « internationale » s’est mise en place pour sauver la tête ou les mains d’Alcaly Cissé, quitte à laisser mourir de faim les Azouze ! Tout se passe comme si Alcaly était un citoyen extraordinaire alors qu’il est un justiciable comme tous les citoyens du monde. Cela nous donne l’occasion de reparler du cas d’Alioune Petit Mbaye « exilé à perpétué » alors qu’il n’avait commis que le tort d’avoir pris trop de risques dans une simple affaire commerciale. Une petite somme de 40 millions fcfa qui l’avait poussé à fuir le Sénégal et s’exiler à jamais !
Le cas de Petit Mbaye n’intéresse pas les activistes de la République alors que lui, au moins, est un vrai homme d’affaires et créateur d’emplois… Et les centaines de migrants sénégalais qui croupissent dans plusiers prisons du monde ? Le cas Alcaly Cissé devrait être une occasion ou jamais de donner un signal fort aux nombreux escrocs et autres petits marabouts qui s’activent dans les pays arabes pour faire du « dor marteau » sur fond de charlatanisme, de multiplication de billets, de transactions de faux or etc…!
Au lieu d’aider la justice internationale ou saoudienne à faire son travail afin de décourager d’autres « Alcaly » à commettre des méfaits dans ces pays, on tente de le sauver pour des raisons politiques. Franchement, il faut être juste et clair. D'un point de vue moral, cette affaire Alcaly fait « honte » à la justice sénégalaise. Une justice qui aurait failli !
On vous renvoie dans les différentes éditions du « Témoin » de la fin des années 90 où l’ancien député Alcaly Cissé avait régulièrement eu les honneurs de notre une pour des scandales d’escroquerie et autres abus de confiance. Juste pour vous rappeler que cette récente histoire l’opposant à l’homme d’affaires saoudien Azouz n’était que l’affaire de trop ! Et si la justice sénégalaise avait fait correctement son travail, Alcaly Cissé ne serait pas, aujourd’hui, entre les mains d’une autre justice du monde. Car il avait été mystérieusement et miraculeusement « blanchi » par la cour d’Appel de Dakar !
Dans cette affaire, même un non-policier ou un non-juge aurait pu faire preuve de discernement ou de logique. Tenez ! Imaginez un jour que, par exemple, notre pauvre Abdoulaye Wilane ou Mbaye Pékh national se lève pour dire que l’Américain Bill Gates l’a escroqué d’une somme de deux milliards fcfa… Et ce alors que tout le monde sait que cet Américain est l’homme le plus riche du monde ! C’est exactement le même scénario qui s’est produit dans l’affaire qui nous intéresse puisque l’on voit mal un milliardaire saoudien poursuivre un pauvre Sahélien comme Alcaly Cissé jusqu’à Dakar pour lui réclamer des fonds sans avoir des raisons solides — et des preuves ! — pour le faire.
Surtout s’il s’agit d’un Sénégalais qui n’a aucune activité commerciale connue. Waay, waay… ! Revenons sur terre et faisons la part des choses dans cette affaire Alcaly Cissé. Car s’il est souhaitable que tout le monde se mobilise pour sauver notre compatriote de la « guillotine », il ne convient quand même pas de le « blanchir » à ce point ! Parce qu’il est loin d’être blanc comme neige… Et ce même s’il a l’habitude de rouler des gens dans la farine.
Le ministre des affaires étrangères, M. Makeur Ndiaye, a eu raison de dire que le dossier Alcaly Cissé doit être géré avec beaucoup de « délicatesse », oui ! Mais aussi avec beaucoup de « diplomatie » et de « sociabilité humaine » puisque nul n’ignore qu’il existe, dans ce contentieux, toute une famille plaignante en situation de détresse sociale et pour qui justice devait être faite…