Les populations de Mbour ne vont pas oublier de sitôt les évènements qui se sont déroulés, ce samedi, dans la capitale de la Petite Côte. Un Guinéen a échoué dans le braquage d’un bureau de change au marché central de Mbour. Il a abattu deux commerçants et tiré sur la foule pour battre en retraite.
Le marché central de Mbour a vécu l’une des journées les plus sombres de son existence, ce samedi. En début d’après-midi, un individu a voulu braquer un bureau de change. C’est vers midi qu’Ali Kouyaté, né le 2 février 1985 à Nzérékoré, en Guinée, de teint clair et de taille moyenne, conduisant une moto neuve, est entré dans un bureau de change sis au marché central de Mbour. Sur place, il a tenu en respect le gérant et lui a ordonné de vider sa caisse et de lui remettre les billets de banque qui y étaient. Ce dernier, Ndiaga Ndiaye, a refusé catégoriquement et lui opposé une résistance.
Comprenant son échec, Ali Kouyaté a sorti son pistolet automatique de marque Browning et a appuyé sur la gâchette, pour atteindre à bout portant l’abdomen de Ndiaga Ndiaye qui s’est affalé sur le sol. Son voisin, gérant d'un magasin, a entendu le coup de feu et s’est précipité dans le bureau de change. Dès qu’il a fait irruption, Ngagne Cissé a, lui aussi, reçu une balle au niveau du pied, alors qu’il tentait de maîtriser le tireur venu de Thiès pour commettre son forfait.
Malgré la balle reçue, Ngagne Cissé n’a pas lâché prise. Il a opposé une farouche résistance qui a poussé Ali Kouyaté a tiré un nouveau un coup qui, cette fois, a atteint le thorax du commerçant. Il a agonisé sous les yeux de ses collègues qui, au début, croyaient à un petit problème opposant le commerçant à un client, comme il est de coutume dans le marché.
Pendant ce temps, voyant que la situation lui avait totalement échappé, Ali Kouyaté s’est employé à sauver sa peau. Le bandit a pris la poudre d’escampette, direction le marché de Dioabe. Dans sa folle retraite, il n’a pas hésité à ouvrir le feu sur ceux qui tentaient de s’interposer. Dans cette partie du marché, quatre personnes ont été atteintes par les balles d’Ali Kouyaté.
Pris en chasse par des jeunes en furie, il n’a dû son salut qu’à l’intervention des mareyeurs qui l'ont protégé de la foule prête à l’écharper. La police est venue dare-dare s’emparer du braqueur.
Les jeunes de Mbour réclament sa tête
Quelques heures plus tard, lorsque la population mbouroise a su que le meurtrier avait été arrêté par la police, les jeunes ont pris d'assaut le commissariat central. Pendant des heures, le centre-ville de Mbour a été le théâtre de vifs affrontements entre les policiers et jeunes qui voulaient appliquer la loi du talion.
Ainsi, les hordes de jeunes ont livré une vraie Intifada aux limiers en faction devant le commissariat qui ont finalement répondu par des grenades lacrymogènes pour disperser la foule.
Mais rien n’y fit. Les jeunes ont continué à acculer les policiers qui étaient au bord de la rupture, malgré les renforts des éléments venus de la police de Saly et du commissariat de Diamaguene, ainsi que des éléments du GMI. Ils ont finalement reçu le soutien d’un escadron de la gendarmerie qui a aidé à tenir bon jusqu’à l’arrivée de renforts venus de Dakar. Un policier a été blessé et évacué à l'hôpital.
A signaler que l’assaillant s’est procuré l’arme, les balles de calibre de 7.65 mm, ainsi que deux chargeurs à Touba, pour la modique somme de 150 000 F CFA.
FUSILLADE DE MBOUR
La désolation des familles des victimes
La fusillade du marché central de Mbour va longtemps laisser des traces. Le dernier rapport fait état de 6 victimes dont un policier qui a été touché par les projectiles des manifestants qui réclamaient le meurtrier pour le lyncher. Les autres blessés sont liés à la fusillade. Ils ont tous reçu des balles du tireur Ali Kouyaté. Parmi eux, il y a eu deux morts : Ngagne Cissé 30 ans et Ndiaga Ndiaye 40 ans.
Le premier était un commerçant qui avait beaucoup d’ambitions dans sa vie. D’ailleurs, il avait une fois tenté l’aventure étrangère avant de revenir au bercail pour y ouvrir son commerce. Mais, l’idée de voyager ne l’avait jamais quitté. Selon sa maman, Ngagne était sur le point de repartir hors du pays pour trouver un avenir meilleur, mais, le destin tragique en a décidé autrement. « Il devait partir la semaine prochaine au Canada », informe Mbathio Mboup, mère du défunt. Marié et père d'un enfant, Ngagne était le soutien d’une famille démunie dont le père est un handicapé visuel. « Son père est devenu aveugle et j'ai pris en main les charges familiales. Ngagne m'aidait à faire face aux dépenses de la maison. Il me soutenait beaucoup et je nourrissais beaucoup d'espoirs en lui », déclare difficilement la maman remplie de chagrin.
L’autre victime, Ndiaga Ndiaye, habite le quartier Thiocé Est. Il est présenté comme un jeune très respectueux, courtois et plein de vie, par les membres de sa famille qui n’arrivent toujours pas à comprendre le destin tragique qui lui a été réservé. Il était marié et deux fois papa.
Au lendemain de leur mort, les familles éplorées sont toujours dans l’attente de leurs dépouilles pour leur donner les sépultures qu’ils méritent, avant de les accompagner à leur dernière demeure.
En ce qui concerne les trois blessés par balle, l’un a été atteint à l’épaule. Un autre a reçu deux balles : une au bras droit et une autre au niveau de la cage thoracique postérieure. Le troisième blessé a reçu une balle au niveau de l’aine. Pour ces deux cas, il faudra faire un scanner abdominal et un scanner du bassin.
Concernant le meurtrier, il a été transféré pour des raisons de sécurité. Certaines indiscrétions soulignent qu’il a été amené dans une autre ville.