Le chef de l’Etat Macky Sall a annoncé avant-hier une série de 11 décisions destinées à réduire immédiatement les prix de certains produits alimentaires. Mais lui comme les autres acteurs des secteurs concernés sont conscients que le pays ne pourra vraiment faire face aux risques de pénurie de certains produits et à la hausse des prix que s’il est en mesure de produire ce qu’il consomme.
Plusieurs acteurs qui se trouvaient à la cérémonie de restitution des concertations sur la vie chère avant-hier au Palais, tout en saluant les décisions prises par le chef de l’Etat en vue de la réduction des prix de certains produits de première nécessité, ont rappelé un devoir de vigilance.
Le chef de l’Etat a annoncé ce qu’il a détaillé comme 11 décisions, «qui vont être traduites en 55 mesures, entraînant des baisses immédiates sur les prix des produits et services de consommation. Et ce, dès lundi», à savoir aujourd’hui. Lesdites mesures vont avoir 112 mesures d’accompagnement, a assuré Macky Sall, en indiquant qu’elles vont renforcer la politique d’accompagnement de la souveraineté alimentaire.
Le mot magique prononcé par le chef de l’Etat avait été dit par différents acteurs dans la Salle des banquets. Beaucoup se sont rendu compte qu’il ne s’agissait pas seulement de la part de l’Etat, de prendre des mesures et d’imposer des décisions pour la réduction des prix des denrées de première consommation. Il s’agissait également de faire en sorte que l’embryon de production locale ne souffre pas de l’entrée de certains produits ou que la politique de renonciation des taxes, destinée à maintenir les tarifs à la baisse, n’ait pas un impact négatif sur les finances publiques.
Parlant ainsi de certains produits horticoles comme l’oignon et la pomme de terre, M. Serigne Mansour Guèye, de la Copasen, la Coopérative pour la promotion des produits horticoles au Sénégal, a déclaré que le Sénégal ne connaissait pas de déficit de production en oignon et en pomme de terre, et ce depuis plusieurs années. Il assure que le véritable problème du pays se situe en déficit d’infrastructures de stockage. Ce problème engendre le fait que «les pertes poste-récoltes au Sénégal sont chiffrés à 18 milliards pour l’oignon et 15 milliards pour la pomme de terre». D’énormes quantités qui passent à la poubelle, et que l’Etat est obligé de combler en ouvrant les frontières aux produits venant de pays européens principalement.
M. Guèye a assuré que si les producteurs avaient des capacités de stockage, ils réaliseraient non seulement l’autosuffisance du pays en ces produits, mais pourraient même s’offrir le luxe d’en exporter dans la sous-région.
Il est dommage que ce problème traîne, parce que, quelque part, ce déficit d’infrastructures gêne les progrès accomplis dans le secteur horticole. Serigne Mansour Guèye a révélé que l’Etat devait dépenser environ 6 milliards de francs par an en subvention de semences de qualité pour la pomme de terre et l’oignon. Et ces semences ne peuvent pas être conservées longtemps, au risque de décomposition. Mais avec le concours de la recherche sénégalaise, la Direction de l’horticulture, sous la houlette de Dr Macoumba Diouf, a trouvé le moyen de produire sur place des semences de qualité, afin de suppléer aux importations. Mais ces avancées ne se ressentent pas encore vraiment du fait que l’oignon sénégalais s’avère souvent rare et cher sur le marché local.
Un problème quelque peu différent se pose dans le secteur du riz, où la cacophonie entre les producteurs locaux et les importateurs n’a pu être calmée malgré la présence du chef de l’Etat. Ici, il s’agit d’abord d’améliorer les circuits de distribution du riz local et le contrôle strict des importations qui, par ailleurs, risquent de devenir encore plus difficiles, du fait des restrictions imposées par certains pays comme l’Inde, à la sortie de leurs produits, que consomment encore en grosse quantité les Sénégalais.
Par Mohamed GUEYE – mgueye@lequotidien.sn