Kunti Kamara, un ancien commandant rebelle soupçonné d’actes de barbarie, de viols et d’exécutions sommaires lors de la première guerre civile au Libéria a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, mercredi, à l’issue d’un procès inédit en France.
La cour d’assises de Paris a condamné mercredi 2 novembre l’ex-commandant rebelle Kunti Kamara à la réclusion criminelle à perpétuité pour des actes de barbarie pendant la première guerre civile au Liberia et pour s’être rendu complice de crimes contre l’humanité en facilitant des viols.
À l’issue d’un procès inédit en France, cet ancien milicien libérien de 47 ans a été reconnu coupable d’une série d’exactions contre les civils en 1993-1994, dont le supplice infligé à un instituteur dont il aurait mangé le cœur et sa passivité face aux viols répétés de deux adolescentes par des soldats placés sous son autorité.
À l’énoncé du verdict, rendu après neuf heures de délibéré, l’accusé, crâne chauve et moustache fournie, est resté impassible.
La cour a ainsi suivi les réquisitions du ministère public qui avait réclamé à son encontre la prison à vie, fustigeant des crimes ayant « porté atteinte à l’humanité tout entière ». La défense avait, elle, plaidé l’acquittement sur l’ensemble des faits, dénonçant des « lacunes » dans un dossier reposant sur des témoignages anciens.
Un jugement au titre de la « compétence universelle »
Arrêté à Bobigny en septembre 2018, Kunti Kamara comparaissait à Paris au titre de la « compétence universelle » exercée, sous certaines conditions, par la France pour juger les crimes les plus graves commis hors de son sol. C’est la première fois que ce mécanisme était utilisé pour des faits commis dans un autre pays que le Rwanda.
Au moment de la première guerre civile libérienne (1989-1997), Kunti Kamara faisait partie du Mouvement uni de libération pour la démocratie (Ulimo) qui luttait contre la milice rivale du redouté Charles Taylor et a fait régner la terreur dans le district de Foya (nord-ouest).
Pendant les trois semaines de procès, des plaignants et témoins venus du Libéria ont décrit d’indicibles atrocités : des habitants assassinés en ingurgitant de l’eau bouillante, le commerce de la viande humaine, des intestins utilisés en guise de checkpoints.
Kunti Kamara, qui avait obtenu l’asile politique aux Pays-Bas après avoir menti sur son passé, avait été arrêté en septembre 2018 à Bobigny après la plainte de l’ONG Civitas Maxima, qui lutte contre l’impunité. Son nom avait surgi au milieu des années 2010 dans le cadre d’une procédure engagée en Suisse contre un autre cadre de l’Ulimo, Alieu Kosiah, qui a été condamné à Genève en 2021 à vingt ans de prison dans le tout premier procès des crimes de guerre libériens.
Les crimes de ce sanglant conflit, qui ont fait au total 250 000 morts, n’ont jamais été jugés au Liberia où d’anciens chefs rebelles occupent aujourd’hui de hautes fonctions dans l’appareil d’État.