Ce 26 septembre, le Peuple sénégalais s’est replongé dans les terribles souvenirs du naufrage du Joola, qui a fait 1863 morts, selon les chiffres officiels. Avec la commémoration du 20ème anniversaire de la plus grande tragédie maritime mondiale, Le Quotidien vous raconte, à travers une série de papiers, les drames qui ont frappé ce pays ces 30 dernières années.
PASSE/PRESENT Crash des Jambaars en 1991 : Les martyrs d’Arabie
En 1991, l’avion, qui transportait quelque 93 Jambaars sénégalais sur une cohorte de 496 soldats, se crashe en ratant la piste de la base aéronavale de Ras Meeschab, à une soixantaine de kilomètres de la frontière koweitienne. Puis… l’implosion. Bilan : 91 soldats sénégalais, qui revenaient du petit pèlerinage, et six membres de l’équipage saoudien périssent sur le coup. Quelques jours plus tard, deux soldats décédérent.
C’est une date qui rappelle de douloureux souvenirs. 22 mars 1991. C’était une matinée des plus calmes et puis… boum. Crash. Au retour d’un petit pèlerinage à la Mecque, l’avion, qui transportait quelque 93 Jambaars sénégalais sur une cohorte de 496 soldats, déverse tout son contenu. Atterrissage forcé pour l’appareil de type C-130. Qui rate la piste de la base aéronavale de Ras Meeschab, à une soixantaine de kilomètres de la frontière koweitienne. Puis… l’implosion. Bilan : 91 soldats -pèlerins sénégalais- et six membres de l’équipage saoudien périssent sur le coup. Cinq autres Jambaars grièvement blessés. De quatre-vingt-onze (91) décès au départ, le nombre de soldats morts passe brutalement à 93 suite au décès de deux autres. Qui rendent ainsi les armes face à l’oppresseur ange de la mort. Seuls les soldats Ibrahima Biaye, Ibrahima Makalou Cissé et Boubacar Sané survivent. Avec des séquelles. Partis défendre les Etats du Koweït et de l’Arabie Saoudite contre l’envahisseur irakien, les soldats sénégalais faisaient partie d’une coalition internationale menée par les Etats-Unis. Au-delà de l’invasion irakienne, il y avait aussi l’opération dénommée «Bouclier du désert», qui devait protéger le Koweït et l’Arabie saoudite, avec l’appui des alliés, contre la menace des missiles de Bagdad.
Ancien Commandant du contingent sénégalais, Général de corps d’Armée (2s), aujourd’hui à la retraite, Mouhamadou Keïta, interrogé par Weekend Magazine en 2012, était revenu sur les circonstances du crash. «Le secteur était caractérisé par un manque de visibilité notoire et un microclimat humide dus, respectivement, aux fumées des puits de pétrole brûlés par l’Armée irakienne dans son repli et la proximité du Golfe arabo-persique. Les actions terrestres de la Guerre du Golfe étant achevées, l’avion Hercules C130 n°469 de l’Armée de l’air saoudienne, qui ramenait des soldats sénégalais sur leur zone de déploiement, après le petit pèlerinage à la Mecque (Oumra), s’est écrasé à proximité de la piste d’atterrissage. C’était au cours de la première semaine du mois de Ramadan, plus précisément le cinquième jour, dans la nuit du jeudi 21 mars 1991, à 04h 45.»
Si à l’époque, certains avaient parlé d’un appareil inadapté, de la surcharge pour justifier le crash, lui réfutait ces allégations. «Le pilote saoudien de l’avion était très expérimenté, car ayant précédemment servi au sein de l’escadrille de Sa Majesté le défunt Roi Fahd», détaillait le Général Keïta.
A travers cette tragédie, le monde découvrit la participation du Sénégal à la Guerre du Golfe. Il était dans la coalition des alliés, composée de grandes puissances comme les Etats-Unis, la France, l’Angleterre et beaucoup d’autres. Après un regroupement de courte durée, le contingent atterrit en Arabie Saoudite les 18 et 19 septembre 1990. Le Sénégal devint ainsi le premier pays de l’Afrique subsaharienne à s’engager dans le conflit. «La base d’attente était au camp King Fahd military city, près de Dhahran, Quartier général du Général commandant la Province-Est. Le choix avait porté sur l’envoi d’un bataillon d’environ 500 hommes aguerris, avec une configuration privilégiant la souplesse et la rapidité dans l’action, ainsi qu’une bonne puissance de feu.
Il fut articulé autour d’un escadron d’Aml 90, d’une Compagnie motorisée et d’une forte Compagnie de commandement, d’appuis et des services (Ccas).»
Après la mise en condition, raconte-t-il, des hommes et du matériel, le bataillon se déploie au Nord, vers la frontière koweitienne, jette un dispositif de défense ferme de zone, se tient prêt à participer à une opération de contre-offensive, après avoir noué des contacts, et diverses formes de coopération opérationnelle ont été développées avec les forces américaine, française, marocaine, nigérienne, etc. «Après la période des bombardements et dans la foulée des opérations terrestres, un élément du bataillon a immédiatement coiffé l’ambassade du Sénégal à Koweït City, assurant ainsi sa sécurité jusqu’au retour de l’ambassadeur à son poste», dit-il. Ce drame cache un accident spectaculaire qui n’avait pas eu beaucoup d’échos médiatiques : la chute d’un Scud (Silk Worm) irakien, le 20 février 1991 à 02h 30, dans la zone d’intérêt opérationnel du contingent, entraînant divers dégâts matériels et la blessure de huit militaires dont un grièvement.
Après 7 mois de présence, le reste de la troupe rentre à Dakar en laissant derrière elle 93 Jambaars. Ces soldats reposent désormais à Nasiriya, à la frontière avec le Koweït. La première Guerre du Golfe s’est terminée ainsi pour le contingent sénégalais. La douleur marquée au fer rouge. A jamais !