Le Mouvement Sahraoui pour la Paix (MSP) a clôturé ce vendredi la « 1ère Conférence Internationale pour la Paix et la Sécurité » par la publication du Manifeste des Canaries, un document qui comprend ses demandes et propositions pour débloquer le conflit qui bloque la stabilité au Sahara Occidental depuis plus de quatre décennies.
La plateforme, dirigée par le premier secrétaire général, Hach Ahmed Baricalla, et soutenue entre autres par les chefs de tribus sahraouis, a exposé dans le document politique sa vision de la résolution du conflit par le dialogue. L’objectif est finalement d’élargir le spectre de représentation du peuple sahraoui, dont les revendications historiques ont été capitalisées par le Front Polisario.
Le MSP affirme avoir envoyé le manifeste aux Nations unies et aux autres organismes internationaux impliqués dans le conflit, ainsi qu’au Front Polisario et au Maroc, les principaux acteurs. A travers cette feuille de route, le mouvement cherche à obtenir l’autonomie du peuple sahraoui.
Lisez le document complet :
Manifeste des Canaries
Chers amis et frères,
Pendant ces deux jours, nous sommes réunis ici pour parler de notre cher Sahara, non pas à cause du long et difficile chemin parcouru jusqu’à aujourd’hui, mais à cause de l’avenir passionnant qui se présente devant nos yeux, sans doute plein de bien-être et de prospérité. Un avenir de tous et pour tous les Sahraouis. Un avenir qui ne saurait tarder, à condition que nous ne tournions pas le dos au vent de changement qui se fait jour sur cette question.
Un avenir qui, en définitive, servira à laisser derrière nous les jours sombres, pleins de souffrance et de chagrin, qui ont assombri notre horizon, dans ce voyage permanent vers le néant dans lequel nous ont un jour embarqués ces personnes qui ont fait passer leur intérêt personnel avant l’intérêt général des Sahraouis, perpétuant ce conflit jusqu’aux limites de l’épuisement.
Aujourd’hui est un jour historique. C’est un jour spécial. Nous sommes réunis ici, dans la belle Grande Canarie, sur la rive opposée, des membres de l’autorité traditionnelle sahraouie, des politiciens et des universitaires de renom et, en bref, ceux d’entre nous qui sont du côté de la solution et non du problème. En bref, nous sommes confrontés à une vague de raisons de croire et à une vague de raisons de changer.
En effet, nous avons la possibilité de contribuer à ce changement. Mais pour ce faire, nous pensons qu’il est nécessaire et essentiel de promouvoir les mécanismes nécessaires à travers lesquels ce différend peut être rapproché d’une résolution plus rapide. Ce sont :
1.Renforcer la confiance dans le rôle de l’ONU comme colonne vertébrale d’une solution de compromis. À cet égard, nous pensons qu’il est essentiel à court terme d’augmenter les espaces de dialogue avec la participation de nouveaux leaders, tels que les notables sahraouis ou le Mouvement sahraoui pour la paix lui-même, afin d’intensifier les efforts dans la recherche d’un accord sur cette question. Nous devons également soutenir l’envoyé spécial de l’ONU, Staffan de Mistura, et lui demander de redoubler les efforts de l’ONU pour réaliser des progrès constructifs dans la résolution de cet interminable processus politique et éviter un retour à l’impasse traditionnelle. Enfin, nous vous demandons instamment d’être plus disposé à faire respecter le cessez-le-feu afin d’éviter de nouvelles victimes.
2. d’applaudir et d’accueillir comme un développement très positif la nouvelle position du gouvernement espagnol sur cette question, reconnaissant la proposition d’autonomie pour la région comme la plus sérieuse, crédible et réalisable. En ce sens, le fait que l’Espagne s’écarte de sa traditionnelle « neutralité négative » renforce cette proposition et favorise son rôle de principal intermédiaire dans une dynamique Espagne-UE, en vue d’une plus grande implication de cette dernière afin de progresser plus rapidement dans la résolution de cette question. Nous espérons que le gouvernement espagnol ne cédera pas aux pressions de ceux qui veulent perpétuer cette situation et qu’il restera ferme. À cet égard, nous appelons également les partis d’opposition espagnols à adopter une attitude plus constructive et moins égoïste sur cette question, au-delà des règlements de compte personnels et des calculs électoraux, surtout lorsqu’il s’agit d’une question aussi sensible que celle qui nous occupe.
3. Valoriser et renforcer le rôle de l’autorité traditionnelle sahraouie, représentée par ses notables ou shiujs, dont l’autorité tribale a été remise en cause par une autre qui prétend s’arroger perpétuellement la représentativité de la population sahraouie comme un « titre éternel », sans aucun processus démocratique qui la légitime périodiquement. Nous pensons également que la participation de cette autorité traditionnelle sahraouie au processus de paix dans le cadre des Nations Unies est essentielle, ouvrant ainsi le processus à la participation de nouveaux acteurs.
Mettre en garde contre les effets négatifs de la persistance de cette situation au fil des ans. Il ne fait aucun doute que la tension permanente dans la région est néfaste pour les deux côtés de l’axe Atlantique-Méditerranée. Il est absolument nécessaire de mettre fin à cette situation le plus rapidement possible, car cela contribuerait à réduire cette tension et à stabiliser la région dans le monde d’aujourd’hui, qui est plein de bouleversements et de scénarios de guerre. Les îles Canaries bénéficieraient également de cette stabilité, notamment en termes d’échanges culturels et économiques avec nos voisins et frères.
5. Enfin, et d’une manière toute particulière, nous devons nous souvenir de toutes ces familles qui ont été déchirées pendant des décennies par l’intransigeance de quelques-uns. Il est donc essentiel de trouver une solution qui permette un regroupement familial immédiat, qui conduise à une vie digne, à une progression sociale et, en somme, à pouvoir profiter des ressources offertes par son propre pays, en laissant derrière soi les difficultés de l’exil dans le désert. Nous comprenons que la proposition d’autonomie est le point de départ qui inaugure une nouvelle ère dans laquelle il y a de la place pour tout le monde, et dans laquelle chacun peut prospérer dans la paix et l’harmonie.
Ce sont les fondements sur lesquels nous pensons que le changement doit être construit. Et nous sommes ici aujourd’hui pour donner le coup d’envoi de ce changement. Un changement qui vise à construire un Sahara meilleur, conçu par et pour le peuple. Le moment est venu de réaffirmer notre engagement à cet égard.
Notre histoire est celle d’une lutte contre l’adversité, d’une victoire sur l’adversité. C’est une histoire d’effort collectif dans laquelle le travail de tous doit servir à construire un avenir meilleur, une histoire qui doit être éloignée des dirigeants toxiques et inquisiteurs, dont l’échec en tant que dirigeants a été démontré par les faits. C’est l’histoire d’un peuple, le peuple du désert, qui a des raisons de croire qu’il est encore temps.
Ils ont le temps de mettre fin à cette disgrâce, avant que cette disgrâce ne les achève.