La 25e édition du rapport Africa’s Pulse de la Banque mondiale, publiée hier, prévoit une croissance de 3,6 % pour 2022 en l’Afrique subsaharienne, en baisse par rapport aux 4 % enregistrés en 2021. Selon l’étude, plusieurs facteurs dont la pandémie de Covid-19 et le conflit entre la Russie et l’Ukraine freinent la dynamique de croissance dans cette région.
Un ralentissement de la croissance de l’Afrique subsaharienne pour cette année, dans un environnement mondial marqué par des chocs multiples (et nouveaux), une forte volatilité et des incertitudes. C’est ce qu’indiquent les prévisions économiques de la Banque mondiale.
Ainsi, alors que les économies d’Afrique subsaharienne peinent à se relever de la récession de 2020 induite par la pandémie du coronavirus (Covid-19), la région est maintenant confrontée à de nouveaux défis économiques, exacerbés par l’invasion russe de l’Ukraine. La dernière édition du rapport Africa’s Pulse de la Banque mondiale, une analyse semestrielle des perspectives macroéconomiques à court terme de la région, prévoit une croissance de 3,6 % pour 2022, en baisse par rapport aux 4 % enregistrés en 2021. Ce ralentissement s’inscrit dans un contexte régional marqué par la persistance de nouveaux variants de la maladie à coronavirus (Covid-19), l’inflation globale, la perturbation des chaînes d’approvisionnement et les chocs climatiques.
La montée des cours mondiaux des matières premières, qui s’est accélérée depuis le début du conflit entre la Russie et l’Ukraine, vient s’ajouter aux autres défis économiques de la région. ‘’Principaux exportateurs mondiaux de denrées alimentaires, la Russie – qui est aussi le plus grand exportateur d’engrais au monde – et l’Ukraine, représentent une part importante des importations de blé, de maïs et d’huile de graines, et celles-ci pourraient s’interrompre, en cas de poursuite du conflit’’, souligne-t-on dans la 25 e édition du rapport Africa’s Pulse.
Ainsi, alors que les économies d’Afrique subsaharienne risquent fort d’être touchées elles aussi par le durcissement de la conjoncture mondiale et une réduction des flux financiers étrangers vers la région, l’analyse relève que la hausse des prix du carburant et des denrées alimentaires se traduira par une inflation à la hausse dans les pays africains.
Selon le rapport, les personnes pauvres et les populations vulnérables seront les plus touchées, en particulier dans les zones urbaines. Dans le contexte actuel d’instabilité politique accrue, ‘’on peut craindre que davantage de troubles civils n’éclatent, du fait de l’inflation entraînée par les prix de l’énergie et de l’alimentation’’.
Économiste en chef de la Banque mondiale pour l’Afrique, Albert Zeufack appelle ainsi à une libre circulation des produits de première nécessité. ‘’Alors que les pays africains se trouvent confrontés à une incertitude persistante, à la perturbation de l’approvisionnement et à la flambée des prix des engrais et des produits alimentaires, les politiques commerciales peuvent changer la donne, en garantissant la libre circulation des denrées alimentaires à travers la région’’, dit-il.
‘’Avec des marges budgétaires limitées, les décideurs doivent se tourner vers des options innovantes comme la baisse ou la suppression temporaire des droits à l’importation sur les denrées alimentaires de base, pour venir en aide à leurs concitoyens’’, a-t-il poursuivi.
Performance économique pour les pays riches en ressources
En ce qui concerne la reprise, l’étude note qu’elle demeure inégale, incomplète et à géométrie variable à travers la région. S’agissant de l’Angola, du Nigeria et de l’Afrique du Sud, les trois principales économies régionales, la reprise restera lente, selon l’étude. L’Afrique du Sud devrait voir son niveau de croissance reculer de 2,8 points de pourcentage en 2022, ralenti par des contraintes structurelles persistantes. L’Angola et le Nigeria devraient, quant à eux, poursuivre sur leur trajectoire de croissance de 2022, en progrès de respectivement 2,7 % et 0,2 %, grâce notamment aux prix élevés du pétrole, ainsi qu’à une bonne performance du secteur non-pétrolier.
D’ailleurs, les pays riches en ressources, en particulier dans le secteur extractif, enregistreront une meilleure performance économique, du fait de la guerre en Ukraine, tandis que les pays ne disposant pas de ressources naturelles abondantes connaîtront un ralentissement de leur activité économique.
Si l’on exclut l’Angola, le Nigeria et l’Afrique du Sud, la croissance régionale est projetée à 4,1 % pour 2022 et 4,9 % en 2023. L’Afrique de l’Est et australe affiche une reprise soutenue après la récession, avec 4,1 % en 2021, mais elle devrait baisser à 3,1 % en 2022 et se situer aux alentours de 3,8 % en 2024. À court et moyen terme, la République démocratique du Congo et la Zambie devraient bénéficier de la montée du prix des métaux et profiter de la transition vers les combustibles non-fossiles sur le long terme. Le Rwanda et les Seychelles devraient connaître la plus forte contraction en 2022, avec une baisse de respectivement 4,1 % et 3,3 %.
En Afrique de l’Ouest et centrale, on s’attend à une croissance de 4,2 % en 2022, et de 4,6 % pour 2023. Si l’on excepte le Nigeria, la sous-région devrait croître de 4,8 % en 2022, et de 5,6 % en 2023. L’évolution de la croissance pour le Cameroun, dont l’économie est relativement diversifiée, affiche de solides performances dans la durée, pour atteindre 4,4 % en 2024. Au Ghana, l’économie devrait connaître une croissance accélérée en 2022, pour atteindre 5,5 %, avant de ralentir progressivement à 5 % en 2024, toujours en retrait par rapport aux 7 % de croissance d’avant la pandémie.
Le rapport souligne également l’importance du développement des programmes de protection sociale au-delà des filets de protection sociale, pour renforcer la résilience économique et la capacité de faire face aux chocs, en particulier pour les ménages pauvres et vulnérables.
Parmi les recommandations, on notera l’importance de développer les programmes d’assurance sociale, d’épargne et d’emploi, qui contribuent à la résilience économique en protégeant les employés urbains du secteur informel et en aidant les populations à investir dans leur santé et leur éducation.