Les parlementaires ont adopté, hier, à une écrasante majorité, le budget du ministère de l’Economie numérique et des Télécommunications. Le ministre Yankhoba Diattara a été interpellé sur trois épineuses questions : la couverture téléphonique et numérique dans les terroirs, l’avenir de la SN/La Poste et la concurrence entre les opérateurs Wave et Orange dans le domaine du paiement mobile.
Les députés ont adopté, hier, le projet de budget du ministère de l’Economie numérique et des Télécommunications. Ce budget dudit a été arrêté à 24 milliards de F CFA. Au fil des interventions, les parlementaires ont soulevé quelques inquiétudes concernant les difficultés de La Poste, en proie à d’énormes difficultés financières et les lenteurs dans le processus de numérisation et d’informatisation des services publics. Par ailleurs, les députés ont aussi émis une kyrielle de griefs à l’endroit du ministre Yankhoba Diattara, pour l’insuffisance de la couverture numérique et de téléphonie mobile dans beaucoup de localités dans le monde rural.
Le député de l’opposition, Cheikh Mbacké Bara Dolly, a dénoncé les limites du plan de sauvetage de l’entreprise publique. ‘’Les fonds de soutien pour La Poste sont insuffisants pour redresser la structure. Je dois rappeler que les recrutements massifs et inefficaces opérés par La Poste ne visaient qu’à répondre à des besoins politiques. Ils sont le fruit d’une mauvaise gestion de l’Etat. Il est grand temps d’auditer La Poste pour connaître tous les goulots d’étranglement qui entravent son développement’’, affirme le député de Bokk Gis Gis de Mbacké. Son collègue Marième Sow Ndiaye de lui emboîter le pas, en affichant son scepticisme quant au renforcement de notre écosystème numérique à travers l’informatisation des services publics et des structures de l’Etat.
‘’Vous avez comme ambition de réaliser le Stratégie Sénégal numérique SN 2025 (NDLR : Un programme qui vise à garantir un accès ouvert et abordable aux réseaux et le développement d’une industrie du numérique), alors que les structures étatiques et les services de l’Etat ont du mal à numériser et renouveler leurs données informatiques. Il est plus qu’urgent de redynamiser ce processus de dématérialisation de nos services, en définissant les missions de l’ADIE pour assurer une meilleure informatisation de nos structures d'état civil, des ministères et des services de la présidence’’, indique-t-elle.
Les députés appellent à plus de protection pour l’opérateur de téléphonie Orange face à Wave
De leur côté, les députés de la mouvance présidentielle Abdou Mbow et Abdou Aziz Diop ont appelé le ministre des Télécommunications à mettre en œuvre une politique de protection pour l'opérateur de téléphonie Orange face à la concurrence de Wave. ‘’L’entreprise Orange appartient à l’Etat du Sénégal qui en détient près de 26 % et il injecte des milliards dans notre économie. Cette contribution dans notre économie nous permet de financer les services publics de base. Donc, il est de la responsabilité de l’Etat de veiller à ce que cette structure ne souffre d’aucune distorsion de concurrence’’, a indiqué le vice-président de l’Assemblée nationale Abdou Mbow.
Prenant la parole, Yankhoba Diattara a salué la pertinence des réformes entreprises par l’Etat du Sénégal dans le secteur du numérique, avec des programmes comme ‘’Sénégal Numérique 2025’’ et la concrétisation du programme quinquennal ‘’Liggeyal Elleuk’’ (NDLR : Travailler pour l’avenir) qui a pour but d’édifier une société numérique inclusive dans le but de promouvoir une société apparente et une économie de l’innovation. Ce programme a pour but de garantir un accès ouvert et abordable aux réseaux et le développement d’une industrie du numérique innovante et créatrice de valeurs. Cette stratégie Sénégal numérique permettra, à l’horizon 2025, la création de plus 35 000 emplois directs et une contribution du PIB de 10 % ; le secteur du numérique et des télécommunications sera porteur d’environ 140 000 emplois directs et 235 000 emplois indirects.
Par ailleurs, le changement de statut de l’ADIE, en cours d’exécution, va nous permettre d’offrir une large couverture numérique à travers différents projets comme ‘’Smart territoires’’ avec la création de maisons numériques. Un programme qui a été initié en 2016 afin de favoriser un meilleur accès aux services administratifs et la sécurité publique, avec l’installation de plus de 500 caméras dans cinq villes du pays. Le niveau de pénétration d’Internet et de la téléphonie mobile, poursuit-il, a fait que notre pays est bien doté en infrastructures de qualité, avec 14 000 km de fibres optiques et est desservi par quatre câbles sous-marins avec une bande passante de 450 gigabits depuis juillet 2021. Un dispositif qui nous offre un niveau de pénétration de l’Internet estimé à 92 % et de la téléphonie estimée à 117 %.
12 milliards pour apurer totalement la dette de La Poste d’ici la fin de l’année
Concernant les difficultés financières de La Poste, le ministre a tenu à rassurer les parlementaires sur le sort de la structure postale. ‘’Le processus de restructuration de la SN/La Poste est en cours. L’Etat du Sénégal a apuré la quasi-totalité de sa dette envers La Poste. En effet, sur les 42 milliards que l’Etat devait à La Poste, près de 30 milliards ont été déjà soldés et les 12 milliards restants le seront avant la fin de l’année. La Poste est en train de mettre en œuvre son plan de relance et nous comptons travailler pour la finalisation du processus de transformation institutionnelle de Postefinances en banque postale ainsi que son adaptation aux nouveaux besoins des usagers. Des projets de modernisation du Centre national de tri et de Poste femme seront aussi mises œuvre pour la permettre de remplir normalement sa mission de service public’’, soutient le responsable ‘’rewmiste’’.
Abordant la question de la concurrence entre Orange et Wave, le ministre s’est voulu rassurant, en appelant à la concertation entre les différents opérateurs de paiement mobile. ‘’Le système des télécommunications, de manière globale, est très réglementé et l’économie numérique est en train d’être encadrée. La réflexion est en cours pour encadrer ce secteur. Il faut avoir une synergie permanente d’actions pour qu’on puisse réguler de manière permanente ce secteur. Maintenant, il s’agira de construire un cadre viable qui permettra à chaque acteur d’évoluer dans le secteur tout en préservant les intérêts des uns et des autres’’, renseigne-t-il.