Ibrahima Thierno Barry risque la réclusion criminelle à perpétuité. Il faisait face aux juges de la Chambre criminelle du tribunal de grande instance de Dakar, hier. L’homme est accusé d’avoir tué la dame Awa Ndiaye à l’auberge Golden Sun de Liberté 6, le 18 septembre 2017. Son coaccusé Mbaye Woré Paye, qui comparaissait pour vol et non-dénonciation d’un crime, risque 6 mois ferme. Peine qu’il a déjà purgée avant de bénéficier d’une liberté provisoire.
Le 18 septembre 2017, aux alentours de 18 h, les policiers du commissariat de Grand-Yoff reçoivent un coup de fil faisant état d’un meurtre à l’auberge Golden Sun, sis à Liberté 6. La victime, Awa Ndiaye, venait d’être doublement poignardée. Le présumé auteur de ce crime, Ibrahima Thierno Barry, s’était, lui, évanoui dans la nature. Mais sur place, les images de la caméra de surveillance ont permis aux limiers d’en savoir plus sur ce crime crapuleux, avant de mettre la main sur le principal suspect.
En effet, c’est au cours d’une altercation qu’Ibrahima Barry alias ‘’Thier’’ a mis fin aux jours d’Awa Ndiaye. La victime a reçu un coup de couteau à la joue et un autre au-dessus du sein. Mais c’est suite à l’arrestation du susnommé que les policiers auront des détails précis.
Après avoir reconnu les faits à l’enquête et devant le juge d’instruction, Ibrahima Barry ‘’Thier’’ avoue à nouveau son crime devant les juges de la chambre criminelle de Dakar, hier. Accusé d’assassinat, il revient difficilement sur le déroulement des faits qui lui ont valu 4 ans de détention préventive.
Vêtu d’un jalaba jaune, Thier raconte : ‘’J’étais assis au bar quand, tout à coup, j’ai reconnu un ancien camarade détenu, Mbaye Woré Paye. Après les salamalecs, on a pris ensemble plusieurs verres. Mais quand Awa Ndiaye est arrivée, elle a gâché toute l’ambiance conviviale qu’il y avait au bar. En effet, quand elle a voulu me serrer la main, j’ai refusé et elle s’est emportée.’’
D’après lui, la victime était une fille belliqueuse qui avait l’insulte à la bouche. D’ailleurs, à ce propos, il précise qu’Awa, dans sa colère, lui proférait des injures et jurait être plus forte que lui.
Mais calmé par son ami Mbaye Woré, le comparant soutient qu’il a quitté le bar. ‘’Même en partant, elle m’a suivi en m’insultant de mère. Je me suis rendu chez le charcutier d’à côté, j’ai acheté de la viande pour mon chien’’, poursuit l’accusé, avant de prétendre qu’il a oublié ce qui s’est passé après. ‘’Je ne me souviens plus de la suite. Je me rappelle que je me suis retrouvé dans un taxi qui était pris d’assaut par une foule hystérique.
Quand le chauffeur m’a demandé si j’ai tué quelqu’un, j’ai remarqué que je détenais un couteau dégoulinant de sang. C’est ainsi que j’ai quitté le véhicule et j’ai regagné le bar qui était vide. J’ai emprunté les marches pour me réfugier sur la terrasse avant de prendre la poudre d’escampette’’, dit-il. Tout en sautant l’étape où il a poignardé sa victime, Ibrahima Barry dit ‘’Thier’’ lâche en sanglots : ‘’Je reconnais avoir tué Awa Ndiaye. Je regrette mon crime. Je n’avais pas l’intention de la tuer. Je ne sais pas ce qui m’a pris.’’
En outre, il a précisé que ce jour-là, il a dormi avec son chien à la plage avant de prendre, à l’aube, un car pour rejoindre Diourbel, sa ville natale.
Mais si Ibrahima Thierno Barry est incapable de dire comment il a ôté la vie à Awa Ndiaye, Mbaye Woré Paye, son coaccusé, a retracé le film de l’horreur. Venu répondre du chef de vol et de non-dénonciation d’un crime, il plaide non coupable et raconte : ‘’Quand Awa est arrivée, j’étais au bar avec Thier. On était ensemble à la prison de Diourbel. Quand j’ai réussi à les séparer, Thier est parti et Awa, en me taquinant, m’a demandé de lui offrir un verre. Ce que j’ai fait. Par la suite, elle m’a confié son téléphone portable, car elle se rendait aux toilettes. C’est par la suite qu’elle a quitté le bar pour aller acheter une cigarette. C’est à son retour que Thierno l’a poignardée.’’
Se rappelant de ce jour comme si c’était hier, Mbaye Paye renchérit : ‘’J’avais les yeux rivés sur mon portable, quand j’ai entendu ma petite amie crier : ‘Il l’a poignardée !’ J’ai sursauté et j’ai vu Awa qui tentait de se sauver. Elle s’est réfugiée derrière moi. Thier, comme possédé par le diable, revient à la charge et lance un autre coup qui aurait pu m’atteindre. J’ai esquivé et c’est Awa qui l’a reçu au-dessus du sein, avant de s’effondrer.
C’est en ce moment que j’ai ramassé son portable et un mouchoir pour essuyer les taches de sang sur mes chaussures.’’ D’après lui, il n’avait nullement besoin de voler ce téléphone qui coûtait sept fois moins que le sien. Si l’on se fie à ses déclarations, il était sous le choc et étant sous l’emprise de l’alcool, il n’était plus maître de ses actes. Après avoir passé 7 mois derrière les barreaux, pour le chef de vol, il a obtenu une liberté provisoire. Mais au parloir, il s’est confessé sur le tournant qu’a pris sa vie, après cette tragédie. ‘’Depuis lors, j’ai cessé de fréquenter certains lieux de débauche. Je ne bois plus et je m’efforce de mener une vie saine’’, assure-t-il.
Dans son réquisitoire, la représentante du ministère public a soutenu que rien ne justifie la fin dramatique d’Awa Ndiaye. ‘’Elle ne méritait pas de mourir de la sorte. Peu importe son caractère belliqueux’’, regrette la procureure qui a requis la réclusion criminelle à perpétuité pour Ibrahima Thierno Barry et 6 mois d’emprisonnement ferme contre Mbaye Woré Paye.
A la suite des avocats de la défense qui ont chacun sollicité une application bienveillante de la loi pour leurs clients, la chambre a mis l’affaire en délibéré. Le verdict sera rendu le 10 mai prochain.