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D’hier à aujourd’hui : Idrissa Seck, la fin d’un temps ?
Publié le mercredi 24 mars 2021  |  senenews.com
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© aDakar.com par DR
Riposte contre le Covid-19: Idrissa Seck reçu au palais
Dakar, le 24 mars 2020 - Le président de la République a entamé les consultations avec les leaders politiques. Il a reçu, ce mardi, Idrissa Seck, président du parti Rewmi.
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Un géant au pied d’argile, voila en quelque sorte ce qu’est devenu Idrissa Seck ,le président de Rewmi. Jadis très influent sur la scène politique, ses déclarations étaient courues après du fait qu’il s’était forgé une personnalité presque mythique. Même s’il garde toujours son charisme et sa maitrise du verbe, les pans du mythe qu’il fut s’effondrent progressivement puisque l’homme perd de plus en plus de son influence. Les récentes décisions qu’il s’est permis de prendre ont porté un coup énorme sur son personnage et, se perdant dans ses calculs de fin tacticien politique, il est quasiment devenu la risée d’un monde qui l’adoubait et le coltinait pour le hisser au sommet.

Idrissa Seck présente l’une des carrières les plus dignes d’intérêt sur la scène politique sénégalaise. En vérité, le parcours de ce leader a pendant longtemps été ce dont pourrait rêver tout jeune qui embrasse l’activité politique. Son génie créateur, qui a été à l’origine des marches bleues en tant que directeur de campagne de Wade en 1988 et en 2000, l’aura sorti du lot des hommes politiques les plus aguerris. Depuis lors, Idy n’a cessé de faire des émules et d’intéresser les plus grands analystes politiques. Hélas, serait-on tenté de dire, au regard de ce qui se dessine sous nos yeux avec un « Ndaamal Kadior » moins percutant et presque honni. Idrissa Seck, c’est malheureusement et à l’image de la plupart des politiciens de chez nous, un mélange réussi de Grandeur et décadence.

Idrissa Seck: hier, un monstre politique redoutable
Chez le jeune libéral de l’époque, la grandeur n’a pas attendu le nombre d’années. Tête bien faite, Idrissa Seck a tapé dans l’œil des acteurs de la scène politique sénégalaise grâce à sa loyauté à Me Abdoulaye Wade et son ingéniosité. Hier, Idy était l’homme-machine dont seule l’intelligence au-dessus de la moyenne permit de côtoyer l’un des plus fins renards politiques du Sénégal. Politicien aguerri, assagi par son long parcours dans l’opposition, Wade ne pouvait placer la plus petite parcelle de charge sur des épaules frêles. Si Seck a donc bénéficié dune écoute attentive de la part de son mentor, c’est parce que celui-ci l’a jaugé et jugé son QI politique extrêmement élevé. L’histoire lui donnera raison d’avoir placé son avenir entre les mains d’un si jeune homme, dévoué et circonspect.

Idrissa Seck, hier, c’était aussi l’homme de main d’une figure politique persécutée mais jamais démissionnaire face aux obstacles. Cette ténacité, Idy l’héritera de Wade et la portera comme une deuxième peau. La participation à l’élection de 1988, en tant que directeur de campagne du Sopi, est une illustration de la clairvoyance du jeune qu’il fut. Malgré toutes les défaillances notées dans l’organisation du scrutin, Seck aida Wade à obtenir un score jamais atteint de 25,80%. La suite de cette présidentielle sera notamment marquée par l’arrestation de Wade et d’autres pontes de l’opposition.

Bras droit de Wade, après un retrait de la scène politique, Idrissa Seck saura trouver les mots pour revigorer ce dernier qui était sorti de la présidentielle de 1993 avec un moral des pus bas. Découragé et dépité par les échecs répétitifs, malgré son score qui grandissait d’élection en élection, il sera pourtant convaincu par son « fils spirituel » de lancer un énième assaut pour le palais présidentiel. Manque de moyens oblige, Idy invente les marches bleues et dirige avec succès la campagne de Wade, qui sera consacrée par l’avènement de la première alternance, le 19 mars 2000. Au pouvoir aux côtés de Wade, dont il fut le premier directeur de cabinet, Idrissa Seck devient très vite l’un des barrons du régime avec un capital de sympathie énorme. Au sein du PDS, telle une araignée, il réussira à tisser sans tambours ni trompettes des relations solides et construire un projet autour de sa personne. D’ailleurs, c’est ce qui sera à l’origine de son divorce d’avec Wade qui, jaloux de son aura, décidera tout simplement de le liquider.

Idrissa Seck, c’était aussi un chef de parti adoubé et très bien entouré. Dans le Rewmi, mis en place le 2 octobre 2006, soit sept mois après sa sortie de prison en février, il se fera assister par des personnes d’une loyauté inestimable. Déjà en prison, au paroxysme de sa popularité, on ne comptait plus ses soutiens dont les mouvements MSIS (Mouvement de soutien à Idrissa Seck), FIDEL entre autres. Son résultat à la présidentielle de 2007 où il s’est classé 2e avec un score de 17% finira par le placer sur un piédestal. Cependant, Le plus difficile a été pour lui de se maintenir au sommet et de garder intact son capital de sympathie à défaut de l’augmenter. Depuis février 2007, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et Idrissa Seck est devenu aujourd’hui un leader contesté, abandonné par ses plus fidèles et perdu.

Idrissa Seck, aujourd’hui: un leader esseulé
L’entourage fait les hommes politiques et mieux on est entouré, plus on peut prétendre à de bonnes performances. Ce qui est commun aux hommes politiques, c’est leur incapacité de garder leurs hommes de confiance, ceux qui ont cru en eux quand personne ne les connaissait ou ne leur accordait de l’importance. Comme son « père » Wade et moins que son « frère » Macky Sall, Idrissa Seck a fait le vide de ses plus fidèles autour de lui. Une petite photographie de son entourage actuel montrera que la plupart de ses hommes, qui l’accompagnaient entre 2005 et 2012, ont quitté le navire de Rewmi.

Idrissa Seck, aujourd’hui, est un leader aux démarches contestées. Son image mythique s’écroulant avec les dernières décisions politiques qui se trouvent être des erreurs énormes pour qui prétend à la confiance populaire, l’ancien maire de Thiès est délaissé un après un par des valeurs sures qui faisaient l’image du parti. En effet, personne ne peut contester le rôle qu’ont joué à ses côtés des identités politiquement remarquables comme Pape Diouf, Oumar Sarr, Oumar Guèye lesquels avaient fini par rejoindre Macky Sall aux premières heures de la brouille entre le président de Rewmi et le président de l’APR.

Si ces départs ont été pénibles, ils ne l’ont pas été plus que ceux qui seront enregistrés entre 2017 et maintenant. Se limitant presque à l’aura de son créateur, il est quasiment impossible d’imaginer le Parti Rewmi sans le concours de Seck. Depuis 4 ans, cette formation a enregistré des d’émissions et pas les moindres. Avec les départs de Thierno Bocoum, Abdourahmane Diouf, Badara Gadiaga qui a jeté l’éponge la semaine dernière, c’est presque la jeunesse de Rewmi qui s’en va. Une mauvaise publicité du parti, quand des jeunes qui ont défendu Idrissa Seck becs et ongles choisissent de faire leur deuil politique de ce parti.*

Une perte de vitesse et des choix politiques controversés
Depuis quelques années donc, Idy tombe de Charybde en Scylla. Renaissant de ses cendres, tel un phénix, Il a su tenir tête à la liquidation programmée de Wade avec le terrible dossier des chantiers de Thiès et la grave accusation d’atteinte à la sûreté de l’Etat en 2005. Cette épreuve dépassée, Seck se reconstruira une seconde jeunesse politique en restant dans l’opposition jusqu’en 2012. Cependant, son image restera écornée aux yeux de beaucoup de Sénégalais qui persistent à penser qu’il s’est enrichi sur le dos du peuple. Les deux non-lieux obtenus sur les dossiers où il est incriminés ne réussiront pas à le blanchir au niveau du tribunal populaire.

Après avoir résisté à la tentation du pouvoir, pendant 7 ans, Idrissa Seck prend l’incompréhensible décision de le rejoindre en début de novembre 2020. Un choix controversé puisque d’aucuns voient derrière un éventuel « deal » pour 2024 tandis que les autres parlent tout simplement de dédit, de reniement à sa conviction. Ses détracteurs n’ont pas tort si l’on se réfère au VAR, puisque dès son acceptation du poste du président du Conseil économique social et environnemental, des tonnes de vidéos étaient sorties des archives pour montrer au président de Rewmi combien ses actes d’aujourd’hui vont à l’encontre de sa parole d’hier.

Pis encore, la mise à l’écart de son président, le député Déthié Fall, pour les positions hostiles au régime, ne sera pas bien interprétée. Idrissa Seck, si prompt à parler de justice et de liberté, se découvre comme un homme qui ne tolère pas la divergence des points de vue. Pourtant, ses retrouvailles avec Macky Sall lui ont fait perdre beaucoup de militants, des cadres de surcroît. Pour ne rien régler, son intervention malencontreuse sur l’affaire Sonko-Adji Sarr vient mettre en exergue son image de « marchand » politique- on persiste de croire qu’il a marchandé son adhésion à la majorité présidentielle.

C’est en ces moments où la pente de sa popularité a emprunté l’axe descendante que la saignée continue de plus belle. Après la démission de Badara Gadiaga la semaine passée, l’ancien vice-président de Rewmi Déthié Fall vient d’officialiser son départ en créant son parti. Considérant que presque tous les mouvements qui composaient la coalition de « Idy 2019 » l’ont laissé, ces quelques démissions ne font qu’exacerber une réalité que certains des partisans d’Idrissa Seck continuent de négliger: politiquement parlant, Idrissa Seck, c’est du passé. Aucun génie communicationnel ou politicien ne pourra le replacer dans le cœur de la majorité des Sénégalais, fût-il candidat désigné de Macky Sall en 2024.
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