Une foule en furie s’est déversée, samedi, dans les rues de Richard Toll. Des populations et travailleurs de la CSS, tenaillés par la peur de voir ce poumon économique de cette partie du pays à terre. Ils interpellent le chef de l’Etat sur la question des déclarations d'importation de produits alimentaires (Dipa).
"Les Dipa frauduleuses, une menace contre les emplois" ; "Touche pas à mon sucre" ; "Non à la contrebande" ; "Mon emploi, ma vie" ; "Assome veut nous assommer". Tels sont, entre autres messages portés haut sur les pancartes, délivrés par les manifestants, ce samedi à Richard Toll. Toute la ville a vu rouge. Une foule immense est sortie, malgré la forte canicule. Durant des heures, ces populations ont occupé la route nationale pour montrer leur désaccord à la délivrance de Dipa, par le ministère du Commerce, à de tierces personnes. Une situation qui plonge ainsi la Compagnie sucrière sénégalaise (CSS) dans un déficit financier, car plus de 30 000 t de sucre sont en souffrance dans leurs magasins.
Ainsi, pour faire face, les machines ont cessé de tourner à la CSS, le temps d'une marche de contestation. Coupeurs, glaneurs, planteurs à canne, aggloméreurs, électriciens, chaudronniers, mécaniciens, chauffeurs, laborantins, magasiniers et cadres ont déserté la fabrique pour battre le macadam, mettant en demeure le chef de l'État Macky Sall.
Le DRH de la CSS, Louis Lamotte, s’est ainsi montré véhément contre ceux-là qu’il considère comme des ‘’faussaires’’. Il leur promet des poursuites judiciaires, si l'Etat ne le fait pas. "Nous demandons au chef de l'État d'identifier ces commerçants véreux, car en complicité avec des fonctionnaires du ministère, ils sont en train de mettre à genoux une industrie réalisée par des fils du pays avec Mimran et qui, aujourd'hui, pourvoit 8 500 emplois au Sénégal et à la sous-région", a-t-il fulminé.
Très en verve, Louis Lamotte a décrit ce qui se passe comme du vol et pense que Macky Sall n'a jamais ordonné cet acte. "Il faut qu'on sauvegarde ce legs. Et si on ne fait pas attention, ces gens-là vont faire comme ils ont fait avec la SNTI de Dagana", a-t-il prévenu.
De ce fait, il demande à toute la région de se mobiliser, car la CSS est le poumon de l'économie du Nord. Dopé par la foule immense drapée de rouge, avec des slogans hostiles au gouvernement, et surtout au ministre de tutelle, Louis Lamotte a poursuivi qu'il est temps que le chef de l'État siffle la fin de la récréation car, à l'en croire, les travailleurs de la CSS ne vont pas reculer d'un iota.
Escortée par la police, la foule a marché du stade municipal à la porte de la mairie, en présence de toutes les organisations syndicales et de quelques figures politiques de la région. Une déclaration commune des syndicats a été lue par le porte-parole du jour Amary Diouf, par ailleurs Secrétaire général de la CNTS/FC. Et comme Louis Lamotte, il n'a pas loupé les bénéficiaires des Dipa qu'il assimile à des ‘’vautours’’.
Amary Diouf de préciser que cette marche est l'acte 2 du combat des centrales syndicales. Si rien n'est fait, le troisième sera déroulé à Dakar. "Des informations fidèles indiquent qu'au moins 150 000 t de sucre sont déversées dans le marché, transformant ainsi notre pays en un souk. Ces pilleurs de l'industrie locale, bien protégés, ont un seul objectif : le gain facile bassement acquis", a-t-il fulminé. Faisant remarquer que si la CSS ferme, ce sont plus de 100 000 habitants qui seront impactés, 8 500 emplois perdus et 8 500 candidats à l'émigration clandestine de plus, au moment où la relance économique est d'actualité.
Pour lui, en évoquant, en Conseil des ministres, la régulation du marché du sucre, le chef de l'État a pris la juste mesure des enjeux. Cependant, prévient-il, ‘’nous attendons que de grandes mesures urgentes permettant la reprise immédiate de nos ventes soient prises. Autrement, il sera trop tard."