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Antoine Felix Abdoulaye Diome : Itinéraire d’un brillant et méticuleux magistrat, redoutable… traqueur
Publié le vendredi 6 novembre 2020  |  Le Soleil
Antoine
© Autre presse par DR
Antoine Félix Diom, agent judiciaire de l’Etat et ex substitut du procureur auprès la CREI (Cour de répression de l’Enrichissement illicite)
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En dépit du fait qu’il soit vierge de toute attache politique, sa nomination dans le Gouvernement, le 1er novembre 2020, a fait pousser des cris d’orfraie aux opposants, ceux-là qui ont pourtant réclamé de tout temps une personnalité neutre à la tête du ministère de l’Intérieur. Une frayeur tout de même non sans raison, surtout pour les karimistes et les khalifistes qui ont vu à l’œuvre le remplaçant de Aly Ngouille Ndiaye, entre juillet 2012 et mars 2018, lors des procès des anciens ministre d’Etat et maire de la Ville de Dakar poursuivis et condamnés respectivement pour enrichissement illicite et escroquerie aux deniers publics. Mais, au-delà de la perception et des clichés médiatiques, qui est véritablement Antoine Félix Abdoulaye Diome ? Les propos qui suivent sont une tentative de réponse à ce questionnement.

Il a un visage d’ange très souvent visité par un sourire avenant. Son gestuel est courtois. Le débit de son verbe est posé. Mais, derrière ce «rideau» jovial d’un homme réputé effacé, discret et secret, se cache autre chose : Antoine Félix Abdoulaye Diome est unanimement reconnu par ceux qui l’ont durablement pratiqué comme un sujet extrêmement brillant, pugnace, bête de travail ; à la limite, on dirait obsessionnellement précis dans la conduite des affaires dont il est en charge, et, au besoin, implacable.
Ses faits d’armes, avant, durant et après les deux affaires retentissantes (procès Karim Wade et Khalifa Sall) qui l’ont fait connaître des Sénégalais, sont restés, pour la plupart, dans le domaine confidentiel. Et renseignent à souhait sur le parcours d’un magistrat (aux manières de limier, disent d’aucuns), hyper discret à l’image de l’homme, Macky Sall, qui vient d’en faire son ministre de l’Intérieur.
Antoine Félix Abdoulaye Diome. A l’évocation de son nom, dimanche dernier, comme le nouveau locataire de l’imposante bâtisse de la Place Washington, siège du ministère de l’Intérieur, la surprise fut de taille. Et doublement. Parce que, quasiment personne ne s’attendait ni à sa nomination ni au départ de Aly Ngouille Ndiaye.

De Khombole à Washington en passant par Thiès, Dakar et Paris

En somme, cet acte posé par le Président de la République à trois jours du quarante-sixième anniversaire de Antoine Félix Abdoulaye Diome, fut l’une des deux grosses surprises du chef, avec l’arrivée d’un autre Thiessois, Idrissa Seck, aux commandes du Conseil économique social et environnemental (Cese).
En effet, le remplaçant de Aly Ngouille Ndiaye à la Place Washington, est un Khombolois. C’est dans cette contrée de la région de Thiès qu’il est venu au monde le 04 novembre 1974. Et c’est là- bas aussi qu’il entame (école élémentaire) et achève (Cem), entre 1981 et 1990, ses premières humanités à l’école française.
Son entrée au lycée se déroule en deux phases : la première année à Malick Sy, dans la capitale régionale ; ensuite, il débarque à Dakar, au lycée Blaise Diagne où il restera jusqu’à l’obtention du baccalauréat et son entrée à la Faculté de Droit de l’Université Cheikh Anta Diop.
Quatre années plus tard, une maîtrise (option droit des affaires) en poche, il entre au Centre de formation judiciaire (Cfj) d’où il sort diplômé et réussit son entrée à l’Enm, la réputée Ecole nationale de la magistrature, à Paris. Il y est formé à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, avec une spécialisation dans la saisie et la confiscation des avoirs criminels.

Blanchiment, terrorisme, corruption

Après la France, Antoine Félix Abdoulaye Diome fait cap sur les Etats-Unis pour subir, au Département d’Etat, deux autres formations dans des matières qui commencent à mobiliser magistrats et policiers du monde entier : la lutte contre la cybercriminalité et la corruption. Depuis, le jeune magistrat s’est passionné jusqu’à l’extrême pour la lutte contre le blanchiment, le financement du terrorisme, la cybercriminalité, la corruption.
De retour au Sénégal, le futur jeune ministre de l’Intérieur est nommé, en 2001, à l’âge de 24 ans, Substitut du Procureur près le Tribunal régional Diourbel. Il y restera cinq ans avant d’aller à Dakar occuper la même fonction au Tribunal régional Hors Classe de Dakar. L’année suivante, en 2007, il monte en grade en devenant et ce jusqu’en 2011 Substitut Général à la Cour d’Appel de Dakar. Quatre années plus tard, il est Délégué du Procureur près le Tribunal départemental de Guédiawaye. Il n’y reste qu’une seule année avant de revêtir un manteau qui le fera connaître des Sénégalais en général et du Landerneau politique en particulier.
En 2012, au lancement de la traque aux biens mal acquis qui sera symbolisée par l’arrestation, le jugement et la condamnation de Karim Wade, ancien ministre d’Etat et fils du Président de la République battu aux élections de mars de la même, Antoine Félix Abdoulaye Diome atterrit à la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei).
Second pour ne pas dire Substitut de Alioune Ndao, l’implacable Procureur spécial, le jeune magistrat qui n’est alors âgé que de 38 ans, se meut dans l’ombre, comme à son habitude. Une «couverture» qui renforce l’énorme travail d’investigation qu’il va accomplir dans cette affaire, surtout au plan international, fort de ses connaissances dans la lutte contre le blanchiment. C’est ainsi qu’il a à son actif nombre de découvertes qui ont pesé lourd sur la balance au moment de la condamnation de Karim Wade.

La Crei, l’Aje, Karim Wade, Khalifa Sall

Il reste au poste bien après le limogeage, le 11 novembre 2014, de Alioune Ndao et son remplacement par Cheikh Tidiane Mara, un magistrat ayant officié pendant 17 ans au Tribunal pénal international pour le Rwanda (Tpir) avant de revenir au Sénégal en 2013, où il occupait depuis lors la fonction de Directeur des services judiciaires au ministère de la Justice.
Après trois années à la Crei, Antoine Félix Abdoulaye Diome atterrit, en 2015, à un autre poste qui le mettra sous les feux de la rampe du fait d’un autre procès retentissant pour détournement de deniers publics. Le 17 juin 2015, le Président de la République le nomme Agent judiciaire de l’Etat.
A ce titre, il est le défenseur des intérêts de l’Etat qui poursuit le maire de la Ville de Dakar, Khalifa Ababacar Sall, arrêté le 07 mars 2017, et obtient la condamnation de ce dernier, le 30 mars 2018, pour escroquerie aux deniers publics, faux et usage de faux dans des documents administratifs, complicité en faux en écriture de commerce.
Véritable bête noire de la défense de Khalifa Sall, l’actuel ministre de l’Intérieur se révèle alors à l’opinion grâce à la maîtrise de son sujet, son calme olympien et ses réquisitoires tranchants et implacables.
Totalement discret (une seconde nature chez cet homme) sur sa situation matrimoniale, Antoine Félix Abdoulaye Diome à qui on ne connaît aucune attache politique est, par contre, et c’est un secret de Polichinelle pour les fins connaisseurs des allées du pouvoir, un homme qui pratique le Président Macky Sall depuis plus d’une décennie.
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