Après l’affaire Keïta, l’arrestation de Ibrahima Dieng doit permettre de pousser la réflexion sur l’implication de certains agents de police dans le trafic de drogue. A chaque fois, l’Ocrtis se retrouve au cœur du scandale.
Gravissime. L’arrestation d’un agent de l’Office central de répression du trafic illicite des stupéfiants (Ocrtis) ramène la Police nationale au cœur d’un scandale. L’arrestation de Ibrahima Dieng jette une lumière blafarde sur l’implication de certains agents de police dans le trafic de drogue. Mais les réactions des autorités montrent qu’il y a encore des résistances à vaincre pour vider ce débat qui vicie l’ambiance au sein de la police.
Au fonds, il s’agit de regarder froidement la situation pour se rendre compte que les faits ne sont pas aussi banals que les autorités ne le prétendent. L’affaire Keïta a fait pschitt à cause d’une gestion catastrophique de l’affaire. Avait-il raison ? C’était les termes du débat qui a été passionné par les hautes autorités de l’Etat qui ont décidé de sauver les barrettes d’une institution dont la réputation se mesure à travers les artères de Dakar.
L’Etat a raté l’occasion de percer le mystère et «d’éradiquer» les flics voyous qui gangrènent ce grand corps malade. Dès le départ, l’ex-commissaire, intrépide et faux-frère, a été promis au bûcher. Sa radiation a été une suite prévisible des évènements.
Aujourd’hui, l’affaire Ibrahima Dieng offre une seconde chance à l’Etat du Sénégal de repenser en profondeur le fonctionnement de l’Ocrtis. Car les suspicions prennent de l’épaisseur au sein de ce service dont certains confondent leur mission et leur passion. Et les réactions évasives du patron de l’Ocrtis et du ministre de l’Intérieur renferment une dose de banalisation qui fait craindre le pire. L’implication présumée de policiers, qui gèrent la sécurité nationale, dans des affaires de trafic de drogue rappelle la chute de la Guinée Bissau. Frontalier du Sénégal, ce pays est tombé sous la coupe gardée des narcotrafiquants. C’est connu de tous : ce sont évidemment les hauts gradés de l’Armée, de la police et de la gendarmerie qui parrainent le juteux business de la drogue.
A y voir de plus près, la gestion des scellés, la proximité avec la drogue et des narcotrafiquants ont fini de donner des idées d’enrichissement rapide à certains flics qui survivent dans la précarité. C’est le nid à toutes les dérives et à l’anarchie. Cela exige évidemment de l’audace, du courage et de la froideur pour mettre en branle les vraies questions liées à ce cancer. On ne peut pas éternellement occulter les vraies questions : Jusqu’où certains agents sont impliqués ? Quelles relations nouent les policiers en dehors de leurs heures de service ? Quel est le pouvoir de nuisance des narcotrafiquants ? En écoutant les réactions du ministre de l’Intérieur et du directeur de l’Ocrtis, l’omerta va continuer à entourer le trafic de drogue qui impliquerait certains agents de police. Jusqu’ici pourtant, l’Armée et la gendarmerie n’ont jamais été citées dans ces obscures affaires. Renversant !