Au lendemain de sa rencontre avec la Cedeao, la junte, sous la menace d’un « embargo total », consulte tous azimuts.
La junte malienne va revoir sa copie, sous la pression de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao). Et le temps presse. Les hommes du Comité national pour le salut du peuple (CNSP) ont une semaine pour mettre en place les exigences de la Cedeao, c’est-à-dire des pays voisins. La transmission du pouvoir aux civils reste e point d’achoppement des discussions entre la junte au pouvoir et l’organisation ouest-africaine. « Nous avons dit clairement à la Cedeao que nous sommes au service du peuple. Dans la mesure où la majorité a parlé d’une transition militaire, nous avons suggéré qu’on puisse aller dans ce sens. Elle a refusé », a indiqué le colonel major Wagué, porte-parole de la junte, précisant que la Cedeao a exigé une transition politique dirigée par un civil.
La Cedeao qui demandait que la transition n’excède pas douze mois a accepté qu’elle en dure dix-huit, comme cela était voulu par la junte. Mais par ailleurs, « ils ont dit que leurs conditions ne sont pas négociables », a dit le colonel Wagué. « Ils ont même dit que, pour le moment, les sanctions ne sont pas encore dures […] Si on insiste, ils sont en mesure de faire un embargo total, c’est-à-dire fermer totalement les frontières : rien ne rentre, rien ne sort et nous serons asphyxiés rapidement », a-t-il rapporté.
La junte mobilisée sur deux fronts
« Notre intention avouée est d’être du côté de la majorité du peuple, mais cette possibilité dépendra d’autres facteurs que nous comprenons et avons intégrés », a-t-il ajouté depuis le camp de Kati, à une quinzaine de kilomètres de Bamako, où la junte a ses quartiers.
Pour lui, « il n’y a pas eu d’accord sur la transition à Accra. Ce n’était pas notre mission. Nous étions partis pour partager avec eux les résultats des concertations, mais non pour aller signer un accord », a affirmé le porte-parole du CNSP.
« Nous avons dit à la Cedeao que nous ne pouvions décider sur place et que nous allons revenir et discuter conformément à ce qui il y a dans la Charte de la transition », a-t-il poursuivi.
Le colonel major Wagué a également affirmé que le voyage à Accra « n’est pas forcément un échec, contrairement à ce qui se dit à droite et à gauche ». « Le président du CNSP a été invité expressément par le président du Ghana. C’est une forme de reconnaissance », a-t-il expliqué.
Le président du CNSP, le colonel Assimi Goïta, à la tête d’une forte délégation, s’est rendu mardi à Accra pour partager avec les chefs d’État de la Cedeao les conclusions des concertations nationales tenues à Bamako du 10 au 12 septembre et voir avec eux la levée des sanctions sur le Mali.
En vertu de la Charte de transition, adoptée par environ 500 participants de différentes forces vives de la nation au terme de trois jours de concertations, l’éventuel président de transition, qui peut être soit un militaire soit un civil, serait désigné par un collège mis en place par le CNSP.
Mais selon le communiqué final du mini-sommet tenu à Accra, les chefs d’État de la Cedeao ont exigé une transition politique dirigée par un civil et la dissolution du CNSP dès le démarrage de la transition civile.
La bataille des scénarios
Et maintenant ? La junte a commencé mercredi les discussions autour du processus de désignation de ces responsables appelés à diriger le Mali le temps d’une transition ramenant les civils définitivement au pouvoir. « Toutes les options sont sur la table », a déclaré le colonel major Wagué, quant à la nomination de personnalités militaires, comme elle le voudrait, ou civiles, comme l’exige la Cedeao.
« Il y a beaucoup de personnes qui pensent qu’on a pris trop de retard », a-t-il concédé, mais « il y a beaucoup de choses qui ont été faites » en associant les Maliens. « Il n’y a as eu de temps perdu », a-t-il assuré. Preuve en est que deux semaines après le coup de force militaire ayant conduit à la démission du président Ibrahim Boubacar Keita, les concertations nationales sur la transition se sont déroulées du 10 au 12 septembre. Une charte de transition de dix-huit mois a été adoptée à l’issue des débats. Trois organes ont été définis : un président et vice-président, un conseil national et un Premier ministre à la tête d’un gouvernement d’au moins vingt-cinq ministres.