Ibrahima Diagne, policier en service à l’Office central de répression du trafic illicite des stupéfiants (Ocrtis), est tombé avec des boulettes conditionnées de cocaïne. Arrêté par la Section de recherches de la gendarmerie, il était sur le point de les recycler sur le marché à l’aide d’un trafiquant nigérian. Durant son audition, il a mouillé sa hiérarchie. Cette affaire risque de replonger la police dans un nouveau scandale de drogue après les révélations de Keïta.
L’info va réveiller les démons endormis de la police depuis la radiation du commissaire Cheikhna Cheikh Saadbou Keïta. La Section de recherches de la gendarmerie a arrêté Ibrahima Diagne avant-hier avec des boulettes conditionnées de cocaïne. Et le mis en cause est un flic en service… à l’Office central de répression du trafic illicite des stupéfiants (Ocrtis). Le policier «ripoux» revendait la drogue à un Nigérian très connu du milieu interlope dakarois. Et durant son audition, le flic a mouillé ses supérieurs pour tenter de se blanchir. Dans les prochaines heures, il sera déféré sans doute pour les délits de trafic de drogue.
Stupéfiant. Cataclysme. Cette affaire ramène la police au cœur d’un scandale qui avait chahuté son image. L’arrestation de Ibrahima Diagne risque de ressurgir le débat sur la proximité entre les agents de l’Ocrtis et la drogue que ce service est censé réprimer. La radiation de Keïta, ex-patron de l’Ocrtis, et le temps avaient commencé à panser les plaies de la police. Apparemment, les faits sont têtus.
Les deals et magouilles entre policiers et narcotrafiquants sont en train de prendre les allures d’un juteux business au sein de ce service. Dans son rapport, le commissaire Keïta soutenait que des fonctionnaires de police parrainent ce business. Il mettait clairement en cause l’ex «grand flic» de l’Ocrtis, Abdoulaye Niang. Il a été finalement blanchi par la justice sénégalaise.
L’arrestation de ce fonctionnaire de l’Ocrtis met en lumière une vérité : il existe au sein de l’Ocrtis un système huilé de trafic de stupéfiants organisé et qui met en cause des fonctionnaires qui recyclent les saisies de drogue dans le marché national et international. Cheikhna Keïta a constaté que «des pratiques nébuleuses ont fini par pourrir l’atmosphère» de l’Ocrtis à cause des éléments qui s’adonnent «à des activités de corruption et de trafic de drogue».
Pour lui, les cérémonies solennelles d’incinération des drogues étaient juste un cérémonial républicain. Il citait Austin, un dealer nigérian qui lui disait : «Lors des cérémonies d’incinération des drogues, les boulettes qui sont brulées ne sont pas celles qui contenaient de la cocaïne. Les boulettes qui étaient saisies sur les trafiquants ont toujours été remplacées par d’autres que je fabriquais.»
La présence d’un Nigérian met davantage l’Ocrtis, «infesté par les dealers», au cœur de cet éclaboussant scandale. L’Ocrtis sera-t-il autant infesté par la gangrène des narcotrafiquants ? Ce nouveau dossier constitue un joli prétexte pour mesurer le degré d’implication des policiers de ce service dans des affaires de trafic international de drogue. Jusqu’où ira-t-on ? Est-on prêt à nettoyer les écuries d’Augias qui souillent la réputation de la police ? Ces questions restent essentielles pour restaurer la confiance entre la police et les citoyens.