Les professeurs d'éducation physique et sportive (EPS) veulent continuer leurs cours au même titre que leurs collègues. Selon eux, les raisons évoquées par le ministère pour suspendre les cours d'EPS ne sont pas valables. Ils se sentent stigmatisés.
La reprise des cours prévue le 2 juin pour les élèves en classes d'examen, ne concerne pas toutes les disciplines. En effet, les cours d'éducation physique n'en font pas partie. Ce qui n'est pas du goût des professeurs. Mais, précise le directeur de la Formation et de la Communication Mamadou Moustapha Diagne, " les décisions du ministère de l'Education nationale sont strictement arrimées aux recommandations du ministère de la Santé''. Il rapporte qu'il est interdit toute forme de regroupement dans les établissements scolaires. C'est pourquoi les cours d'EPS sont suspendus jusqu'à nouvel ordre. Il demande aux professeurs d'éducation physique de rejoindre les inspections d'académie, en attendant de participer à l'encadrement des enfants, surtout dans la surveillance pour le respect des réflexes et mesures barrières au sein des établissements et écoles du Sénégal.
Cela n'agrée pas les concernés. Selon eux, les raisons évoquées ne tiennent pas. Ils dénoncent un paradoxe, une stigmatisation et un manque de considération. Le coordonnateur départemental des professeurs d'éducation physique à Guinguinéo, Djiby Faye, joint par "EnQuête'', souligne ceci : "C'est plus qu'un paradoxe, parce que tout simplement l'enseignement de l'éducation physique se fait dans un espace beaucoup plus aéré, plus vaste que les salles de classe. Si les salles de classe sont en mesure de contenir 20 élèves dans un espace restreint, nous sommes en mesure de contenir 100 élèves dans un terrain de football réglementaire'', dit-il. Il considère également qu'avec cette décision, la tutelle les stigmatise. " Si on doit suspendre des cours, ce sont ceux qui se passent dans les salles de classe et non ceux qui se font à l'aire libre. Voilà le paradoxe'', insiste le coordonnateur Djiby Faye. Il informe qu'en temps normal, la règle de la distanciation physique ne se pose pas, à fortiori en période de pandémie.
Par ailleurs, il souligne qu'ils ne sont nullement impliqués, ni consultés par le ministère de l'Education nationale.
"Nous n'avons pas été impliqués''
Monsieur Faye et ses collègues ont été informés au même moment que tout le monde de la décision. "On a vu la note qui informe que les cours reprennent le 2 juin et que l'EPS est suspendue jusqu'à nouvel ordre, sans aucune explication et aucune consultation auprès de nous qui sommes des experts en la matière'', dénonce-t-il. Son collègue et point focal à Kolda, Alassane Dianor Mané, très remonté, annonce qu'ils ont appris l'information avec beaucoup de surprise, de désolation et d'amertume. Pour lui, rien ne justifie cette décision, si ce n'est pas un préjugé par rapport à la discipline. "Nous n'avons pas compris comment cette décision a été prise sans pour autant consulter les techniciens en la matière. Nous considérons que c'est un manque de respect et nous le dénonçons'', fustige M. Mané.
Pour le ministère de l'Education nationale, il n'est pas possible de reprendre les cours à cause des contacts au niveau du parcours utilisé pour la roulade, le poids, la course de vitesse. Quand on fait passer un groupe, on n'a pas le droit de faire passer un autre sur ce même parcours. "Ce qui est totalement faux ! Ils auraient dû nous demander notre avis et on leur aurait proposé un document permettant au moins aux élèves de pouvoir reprendre les cours d'EPS en respectant les mesures barrières. Les élèves peuvent prendre une distance de deux mètres'', a-t-il opposé. Il reste convaincu que le risque zéro n'existe pas, sinon les élèves ne seraient pas retournés en salles de classe. Pour lui, c'est une décision prise à la hâte. "C'est une décision unilatérale. ?a ne tient pas. Cela amène un manque de considération. ?a ne nous a pas plu que la discipline puisse être traitée ainsi. La matière est le parent pauvre. Encore que des gens prennent des décisions sans nous consulter, c'est désolant'', dénonce avec énergie M. Mané.
Ils s'opposent ainsi fermement à la décision et l'ont fait savoir aux services de M. Talla. Un argumentaire a été envoyé au ministère à cet effet, mais jusqu'à présent aucune réponse n'a été servie. Une concertation se fait pour le moment pour voir quelle stratégie adopter pour se faire entendre.