Pour une sanction, ça semble en être une. La mise hors jeu des listes de la coalition Benno Bokk Yaakaar au cœur de la cité religieuse de Touba est une petite bombe dans le monde politique sénégalais, au regard du lieu et du contexte.
La Commission électorale nationale autonome (CENA) a rejeté la liste de Benno Bokk Yaakaar (BBY) (en principe acceptée par le Khalife général) pour la commune de Touba Mosquée. Raison avancée : elle «n'a pas respecté la parité».
Dans un communiqué transmis à nos confrères de l’Agence de presse sénégalaise, la Cena qui s’appuie sur le Code électoral, s’explique : «Après avoir étudié le rapport de la Commission départementale électorale autonome (CEDA) de Mbacké et écouté le président de cette structure décentralisée ainsi que le membre de la Cena chargé de la supervision de la région de Diourbel et enfin, mené enquête, la Cena a constaté que la liste déposée n'a pas respecté la parité comme l'exige la loi.»
Comme elle a eu à le faire auparavant dans d'autres cas, la Commission électorale nationale autonome, organe de supervision du processus électoral, prévient qu’elle «utilisera les moyens que lui confère la loi du 11 mai 2005 en ses articles L6 et L13, pour faire respecter le Code électoral de 2014".
A cet effet, le magistrat Doudou Ndir et ses collaborateurs rappellent les termes de l'article L.6 du code électoral qui stipule : «(...) En cas de non-respect des dispositions législatives et réglementaires relatives aux élections ou référendums par une autorité administrative, la Cena, après une mise en demeure, peut prendre des décisions immédiates exécutoires d'injonction, de rectification, de dessaisissement, de substitution d'action dans le cadre des opérations électorales et référendaires, nonobstant son pouvoir de saisine des juridictions compétentes.»
Contacté par EnQuête, le constitutionnaliste Babacar Guèye confirme : «Pour qu’une liste soit recevable, il faut qu’elle respecte la parité «un homme, une femme». Si cette condition n’est pas respectée, la liste est déclarée irrecevable.» Au-delà de Touba Mosquée, le Pr Guèye explique ce fort taux d’irrecevabilité des listes noté au plan national par l’impréparation des partis politiques par rapport aux élections locales.
«Ce que beaucoup de gens craignaient est en train de se produire. Beaucoup de partis n’étaient pas prêts pour confectionner les listes. Et puisque les partis n’arrivaient pas à s’entendre et que tout le monde voulait être candidat, on s’est retrouvé, du coup, avec une floraison de listes. Ce qui fait que certaines étaient mal faites», analyse cet enseignant et spécialiste du droit constitutionnel.