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Sud Quotidien N° 6306 du 7/5/2014

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Avantages sociaux et environnementaux de Diama: Le barrage a répondu aux attentes, mais…
Publié le mercredi 7 mai 2014   |  Sud Quotidien




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Selon l'étude conduite par Ousmane Thiam, expert en gestion de l'environnement et diplômé de l'Université Léopold Sédar Senghor d'Alexandrie, et publiée dans l'ouvrage, «Le Barrage de Diama: Evaluation des avantages sociaux et environnementaux de la retenue d'eau», (Harmatan, 2013, 238 pages), le barrage anti-sel de Diama a favorablement répondu aux attentes de l'Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS) et des pays membres, notamment le Sénégal et la Mauritanie.

En atteste, la disponibilité d'eau douce, qui confère à la zone d'influence un potentiel économique consistant, constitué essentiellement de la biomasse et de ressources piscicoles y compris les multiples usages notamment, de la ressource en eau. Toutefois, il existe un potentiel de risques de conflits et de compétition entre les usagers qui peuvent être à l'origine de dégradations de la ressource et de l'écosystème.

«Après deux décennies de service, le constat peut être fait que l’ouvrage de Diama a répondu favorablement aux attentes de l’OMVS et des pays membres principalement, le Sénégal et la Mauritanie», selon Ousmane Thiam, expert en gestion de l’environnement et diplômé de l’Université Léopold Sédar Senghor d’Alexandrie. Aujourd’hui, l’expert environnementaliste de l’Agetip et de l’Apix, est auteur d’une étude sur «Le Barrage de Diama: Evaluation des avantages sociaux et environnementaux de la retenue d’eau», l’Harmatan, 2013, 238 pages.

Cet ouvrage préfacé par Mohamed Salem Merzoug, ancien Haut Commissaire de l’OMVS, arrive à son heure, en ce sens qu’il est la première grande étude scientifique sur les impacts du barrage anti-sel de Diama sur les écosystèmes de la zone fluvio-deltaïque. Il vient combler un vide: celui du besoin d’inventaire économique et social, faire le point sur les impacts environnemental et écologique depuis la construction de la retenue, sur le delta du fleuve Sénégal et sa mise en service.

Dans l’ouvrage, Ousmane Thiam souligne: «à la lumière de cette étude d’évaluation économique de la valeur de la retenue de Diama ou du potentiel économique découlant de la présence de la disponibilité d’eau douce, nous avons pu constater que la zone d’influence, bien que réduite, dispose d’un potentiel économique consistant». En effet, le barrage de Diama dont la construction a duré quatre longues années (1981-1985) a été mis en service en novembre 1985. Situé sur le fleuve, dans le Delta, en amont de Saint-Louis et à 50 km environ de l’embouchure, il a pour objectifs spécifiques: «d’empêcher, en période d’étiage, la remonté des eaux salées dans le Delta et la basse vallée du fleuve Sénégal ; de permettre l’irrigation de 120.000 ha de terres dans sa zone d’influence ; de permettre la satisfaction des besoins en eau des centres urbains et ruraux ; d’améliorer les conditions de remplissage des lacs et dépressions liés au fleuve Sénégal, notamment le lacs de Guiers, le lac de R’kiz, la dépression de l’Aftout es Sahel, le parc du Djoudj, le parc de Diawling, les défluents en rive droite et en rive gauche, ainsi que de réduire les hauteurs de pompage dans la zone d’influence».

Un outil d’aide à la prise de décision

Le livre de Ousmane Thiam qui répond à plusieurs autres questions, constitue un outil d’aide à la prise de décision, la bonne décision, pour la mise en place de projets et programmes ambitieux pour repenser la contribution de ce joyau à l’économie locale et nationale. A travers des connaissances fiables, les décideurs ont à leur disposition des moyens d’une bonne maîtrise de la qualité de l’eau qui doit être une tâche permanente du fait de la multiplicité des usages, et dont dépend la survie de tous les autres usages identifiés dans l’environnement immédiat de la retenue de Diama.

L’ouvrage oriente et alerte les autorités sur les usages, la pertinence et l’opportunité de l’option de l’Etat pour le «tout riziculture», le prélèvement d’eau de subsistance qui est un autre usage qui ruine les populations rurales (elles paient plus cher l’eau qui d’ailleurs n’est pas de bonne qualité, le riz sénégalais n’est pas compétitif), la rentabilité et les avantages économiques de la filière tomate industrielle de la zone d’étude. Celle-ci concerne la zone fluvio-deltaïque de la rive gauche qui borde le fleuve Sénégal entre Rosso et Diama, c’est-à-dire du côté du territoire du Sénégal. Il s’agit du moyen delta et une partie du bas delta notamment de Diama Amont à la commune de Rosso. Ce choix est guidé par le centre d’intérêt de l’étude.

La riziculture… appauvrit les populations

D’ailleurs, «annuellement, les populations rurales (environ 135 000 habitants), donc les plus démunies, paient l’équivalent de 750 000 F Cfa. (…) l’eau. Le comble de cette injustice à l’endroit des populations de la zone d’étude est bien qu’elles paient plus cher, elles reçoivent cependant une eau de très mauvaise qualité (…)

Les populations à proximité du plan d’eau n’ont aucune garantie quant à l’accès à l’eau». Mieux, «la valeur de maintien de l’équilibre écologique dépasse de loin toutes les autres valeurs d’usages réunies et constitue la première valeur économique. D’une manière générale, on trouve des usages non rentables qui appauvrissent les populations et d’autres qui le sont réellement et une troisième catégorie qui présente des manques à gagner. C’est notamment le cas de la pêche et le développement des filières agricoles à travers les spéculations qui rapportent plus» comme la tomate, renseigne le document.
L’étude relève que l’agriculture irriguée est le premier poste utilisateur d’eau parmi l’ensemble des usages identifiés dans la zone environnante de la retenue de Diama.

En revanche, «c’est le poste qui appauvrit le plus par ses déficits liés à l’excès d’eau dédié à la riziculture. Un tel excès rime indubitablement avec un gaspillage de ressources. Quant à la culture de la tomate industrielle, elle consomme moins d’eau que la riziculture et génère plus de ressources financières pour l’ensemble des deux types de riz». C’est pourquoi, dans ce contexte de non compétitivité du riz sénégalais à cause de coûts de production très élevés, Ousmane Thiam invite les autorités au sommet à un véritable courage politique en vue de «développer à la place du riz d’autres spéculations qui assurent des revenus beaucoup plus importants aux producteurs. Economique, la culture du riz n’est pas encore viable dans le cadre du libre marché».

Pêche: la concurrence déloyale des oiseaux migrateurs

Aussi, en termes de potentiel de développement, la retenue détient une grande valeur économique, constituée essentiellement de la biomasse et de ressources piscicoles. Cependant, «la plus grande part de ces poissons ichtyologiques est très importante dans la zone, environ une valeur de plus de 8 milliards F Cfa. Sur cette valeur, la pêche n’en tire que 331 000 000 F Cfa et le reste correspond à la valeur de la nourriture des oiseaux ichtyophages, notamment du Parc national des oiseaux de Djoudj. En d’autres termes, les oiseaux capturent à eu seuls 95% de la valeur des prélèvements de poissons de la zone ! La concurrence déloyale pour la nourriture que livrent les oiseaux ichtyophages (migrateurs pour la plupart) aux humains pose le problème de l’estimation de la valeur réelle de ces oiseaux. (…) Ces prélèvements importants de poissons que les oiseaux migrateurs substituent aux populations locales qui n’ont pas accès, constituent un manque à gagner certain et réelle pour l’activité de pêche».

Cet argument peut être important dans les négociations environnementales entre les défenseurs des oiseaux et du parc et des populations et pêcheurs à qui devaient revenir ces importants stocks de poissons. De même, la pêche peut aussi gagner en valeur, en faucardant les typhas qui empêchent les pêcheurs d’accéder aux lieux de regroupement des poissons. Mieux, ces plantes envahissantes peuvent être valorisées. Au-delà de l’artisanat, selon le principe environnemental consistant à transformé un problème en opportunité, elles peuvent être utilisées dans le domaine du fourrage et de la production d’énergie domestique (charbon, etc.) et électrique.

Polémique et avis divergents sur les retombées des barrages

Cependant, le chercheur reconnaît que la mesure des retombés des infrastructures de développement sur le fleuve Sénégal est souvent source de polémique et les avis, quant aux avantages ou aux inconvénients, sont jusqu’ici divergents. Et ce, selon qu’on soit producteur, décideurs nationaux, internationaux du côté de l’OMVS, bailleurs de fonds, populations locales, groupements socioprofessionnels (pasteur, paysans et pêcheurs), (…) «deux grandes catégories d’appréciation des retombées des barrages de l’OMVS se dégagent. Toutefois, loin de concilier ces avis divergents, l’objectif du chercheur est de participer modestement au travail d’évaluation de manière générale des avantages et des inconvénients entraînés par la construction de ces grands ouvrages (barrages de Diama et de Manantali) qui auront coûté en investissement en capital plus de 400 milliards de F Cfa aux Etats riverains membres de l’OMVS».

Bref, alors qu’après plus d’un quart de siècle de mise en service du barrage, une véritable évaluation économique, en termes de coûts et avantages des aménagements hydro-agricoles de l’OMVS attend d’être faite, le constat c’est qu’il est «extrêmement difficile à l’heure actuelle de se prononcer avec précision sur ce que les barrages (Diama et Manantali au Mali) ont apportés aux populations et au bassin versant sur toute sa longueur et dans sa globalité». Même si ces deux infrastructures d’envergure ont considérablement amélioré les hauteurs d’eau et facilité l’irrigation, elles ont, cependant, profondément modifié le fonctionnement hydrologique du fleuve et la qualité des eaux y compris la vie des populations.

Existence d’un potentiel de risques de conflits et de compétition…

Donc, disposer d’un potentiel est une chose certes, mais pouvoir en profiter utilement en est une autre. Dès lors, il est nécessaire d’identifier les meilleures utilisations souhaitables pour l’exploitation optimale de ce potentiel en tenant compte de la fragilité du milieu, et nonobstant les intérêts contradictoires des Etats et des populations riveraines qui partagent la même ressource. Car il existe un potentiel de risques de conflits et de compétition entre les usagers qui peuvent être à l’origine de dégradations de la ressource et de l’écosystème, conseille Ousmane Thiam dans l’ouvrage.

C’est pourquoi, le principe de la précaution doit être au centre de la méthodologie dans la gestion de la ressource en eau, la première identifiée, qui assure les principaux usages par prélèvement (agriculture irriguée, l’alimentation en eau des populations de la zone). Car, avec l’importance des plans d’aménagement sur les deux rives et le troisième objectif fondamental de l’OMVS, le transport fluvial y compris la production d’électricité par Manantali, des pénuries d’eau peuvent se présenter durablement dans le futur, même si, actuellement, l’eau est encore en mesure de satisfaire toutes les activités de prélèvement en vigueur dans la zone d’influence, prévient Ousmane Thiam, dans le livre. D’ailleurs, «la maîtrise de la qualité de l’eau doit être une tâche permanente du fait de la multiplicité des usages, la survie de tous les autres usages identifiés dans l’environnement immédiat de la retenue de Diama en dépend».

Mouhamed Salem Merzoug qui salue la démarche de l’acteur du développement de la région qu’est Ousmane Thiam, note que les «précieux résultats de ces recherches permettent, tout en assumant les choix stratégiques de l’OMVS et de ses Etats membres, de dessiner des perspectives permettant d’en mitiger, durablement les implications à tous les étages. Là réside l’originalité de ce travail de qualité comme transcription contingente de l’approche renouvelée du développement en Afrique avec comme colonne vertébrale la recherche/développement».

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