A Dakar, où vivent près de 4 millions d’habitants sur une superficie totale de 550 km2, l’acquisition d’un toit est un véritable chemin de croix à cause principalement de la cherté des terrains et des obstacles pour l’obtention d’un prêt bancaire.Cheikh Tidiane Diaby, la trentaine, longe le hall du Centre de Conférences Abdou Diouf de Diamniadio (périphérie de Dakar) où se tient le Salon international de l’habitat de Dakar. L’espoir de ce visiteur, comme de tant d’autres, est d’avoir accès à un logement.
« Quand on n’a pas de maison, on n’a rien. Pour le moment, je n’en ai pas. A Dakar, c’est quasiment impossible de trouver un terrain. Les prix sont trop chers. Le principal problème, c’est la surenchère », fustige cet agent d’une banque.
En compagnie d’un collègue, il pénètre dans un stand et écoute attentivement les explications de la gérante.
« Dans notre coopérative, chaque personne cotise 11.000 F CFA pour l’adhésion : 5000 F CFA de part sociale et 6000 F CFA de cotisation annuelle. Ainsi, on fournit à l’adhérant nos numéros de compte bancaire où il peut déposer de l’argent en fonction de ses revenus. Quand on a un site, on informe les membres du prix des terrains. S’ils ont déjà épargné le montant nécessaire, ils vont en bénéficier. Au cas contraire, ils complètent leurs versements », détaille Amy Guèye, trésorière de la Coopérative d’habitat et de construction Siggil Jigeen (Honorer la femme, en langue wolof).
En tout cas, dans la capitale sénégalaise, le prix du loyer reste très élevé malgré l’avènement récent d’une loi pour le juguler.
« Il y a clairement de l’abus. Parfois, il ne te reste plus rien si on défalque le loyer de ton salaire. C’est extrêmement difficile pour les pères de famille. Les bailleurs avaient revu les prix à la baisse. Maintenant, c’est un retour à la case départ. S’il y avait une commission de contrôle, ce serait mieux », préconise Cheikh Tidiane Diaby.
De l’avis de Mamadou Faye, « au Sénégal, les jeunes ont un problème d’informations et d’orientation pour l’accès au logement ». Pour y remédier, ce travailleur des Industries Chimiques du Sénégal (ICS) recommande aux banques, comme la BHS (Banque de l’Habitat du Sénégal), des visites régulières dans les entreprises pour discuter avec les salariés.
Le programme 100.000 logements n’est pas la première initiative de l’Etat du Sénégal afin de permettre au plus grand nombre de citoyens d’accéder à la propriété.
« La SN HLM et la Sicap (Société immobilière du Cap-Vert) étaient là pour aider les salariés à avoir des maisons. Actuellement, ces deux sociétés ne sont pas si performantes que ça », tranche Faye.
En effet, entre 2014 et 2018, le Sénégal n’a construit en moyenne que près de 5000 unités d’habitations. « A ce rythme, le déficit de logement, estimé aujourd’hui à 325.000, ne pourrait jamais être comblé surtout lorsqu’il se creuse à concurrence de 12.000 unités chaque année. Si rien n’est fait, l’accès à un logement décent restera impossible pour la majorité des Sénégalais, surtout ceux à revenus faibles », conclut l’ancien Premier ministre Mouhammad Boun Abdallah Dionne.
Au Sénégal, des promoteurs immobiliers participent à l’effort de résorption du déficit en logement. Sur toute l’étendue du territoire national, ils font sortir de terre des villas. « On a signé un protocole d’accord avec la mairie de Mont Rolland (84 km à l’est de Dakar). Aujourd’hui, on est à 2000 ventes sur les 3000 maisons à construire. Sur le site, il y a déjà des villas témoins F3, F4 et F5 (social et standing) », informe Claude Thouvenin, le Président Directeur Général du groupe Enekio, issu du Centre européen des entreprises innovantes de Montpellier (France).
Après avoir constaté que la construction d’une maison au Sénégal dure en moyenne 2 ou 3 ans, cette entreprise a élaboré des techniques de pointe lui permettant de livrer ses villas F3 ou F4 au bout de six mois seulement.
« A Mont-Rolland, on va créer entre 500 et 1000 emplois locaux. On va les former à nos techniques de construction. On veut démontrer au Sénégal que cela fonctionne pour ensuite exporter ce modèle en Afrique », promet M. Thouvenin.
Les villas bioclimatiques d’Enekio sont commercialisées entre 11 et 48 millions F CFA. Après Mont-Rolland, ce groupe compte étendre ses tentacules notamment à Touba Toul (près de 100 km à l’est de Dakar).