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Insalubrité au Senegal: Les multiples équations de la propreté
Publié le dimanche 5 janvier 2020  |  Enquête Plus
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© Ministère par DR
Opération de désencombrement au marché central de Rufisque
Rufisque, le 16 août 2019 - Le Ministre de l`Urbanisme, du Logement et de l`Hygiène publique a dirigé, ce vendredi, une opération de désencombrement d marché central de Rufisque.
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La première édition de la Journée mensuelle du nettoiement sera organisée aujourd’hui. Une initiative du chef de l’Etat pour débarrasser le pays, en particulier la capitale sénégalaise, de ses ordures. Seulement, les initiatives de ce genre n’ont pas manqué dans le passé. Sans succès.



Le constat est désolant. L’image qu’offre la capitale, vitrine du pays, à l’instar des autres régions, ne glorifie pas le Sénégal. Des tas d’immondices et autres saletés jonchant le sol, accueillent les visiteurs. Un décor hideux qui commence visiblement à tenailler les autorités. Ce qui a motivé le chef de l’Etat qui a placé la question de l’insalubrité au rang des priorités de son second mandat.

Ce 4 janvier sera organisée la journée du ‘’Cleaning Day’’ à Dakar et dans plusieurs localités du pays et ce, dans le cadre du programme ‘’Zéro déchet’’ piloté par le ministre de l’Urbanisme Abdou Karim Fofana. Un programme organisé une fois dans le mois et qui s’inspire du modèle Rwandais initié par le président Paul Kagamé. Aux yeux de Macky Sall, il s’agit d’un combat national qui nécessite une introspection collective, une mobilisation de tous les segments du corps social. ‘’Cet engagement citoyen exige un changement des comportements, de nos manières de vivre et d’occuper l’espace. J’encourage fortement la poursuite des opérations de désencombrement, de nettoiement et d’aménagement des espaces publics sur l’ensemble du territoire national’’, a déclaré le président de la République.

L’objectif est donc de lutter contre l’insalubrité et les dépôts sauvages notés à tous les coins de rue, surtout ceux de la capitale sénégalaise.

Seulement, les initiatives de ce genre n’ont pas manqué, dans le passé. On se souvient encore des challenges sur la toile pour inciter les jeunes à rendre propre et attrayant leur cadre de vie. L’idée était de s’inspirer des ‘’TrashTag Challenge’’ initiés partout à travers le monde. Pour relever le défi, des internautes prennent en photo des endroits choisis avant et après le grand nettoyage. Une manière de marquer la différence entre les deux situations et démontrer la teneur de leur action. Il y a aussi eu le programme ‘’Save Dakar’’, une initiative digitale dont le but était de pointer, d’identifier les zones insalubres et dégradantes d’un endroit de la capitale, en vue de faire réagir les autorités locales. Pour motiver les citoyens à prendre conscience de l’importance de préserver leur cadre de vie, d’autres ont mis sur la table des primes. C’était le cas pour le leader du mouvement Gueum Sa Bopp, par ailleurs Directeur général du groupe D-média. Bougane Guèye Dany n’avait pas hésité à mettre sur la table la somme de 250 mille pour inciter les jeunes à se mobiliser pour la propreté de leur quartier, à travers l’initiative ‘’Setal Sama Gox’’.

Intéresser les populations

Un ensemble de mesures qui n’ont visiblement pas porté leurs fruits. Le Sénégal, particulièrement la capitale, continue d’être asphyxié par les ordures et autres saletés. Dans une sortie dans ‘’Jeune Afrique’’, le fondateur de ‘’Save Dakar’’ se désolait du manque d’engouement et d’intérêt pour le sujet. ‘’C’est ça le vrai problème au Sénégal. C’est un challenge d’intéresser les citoyens à ces questions-là. Lorsqu’on organise des journées de nettoyage sur la plage, on voit surtout venir des Libanais et des expatriés’’, regrette l’activiste Mandione Laye Kébé qui a mis sur pied cette initiative en 2017.

Seulement, il faut reconnaitre qu’il manquait à l’ensemble de ces initiatives des mesures dissuasives pour contraindre les récalcitrants. Le chef de l’Etat a alors pensé à une brigade spéciale de lutte contre les encombrements, l’aménagement de fourrières et la modification des amendes pour encombrement de la voie publique. Ainsi, le président Macky Sall brandit à la fois le bâton et la carotte, dans ses innovations, avec l’instauration, en même temps, du Grand Prix du président de la République pour la Propreté, à l’occasion de ces journées mensuelles, afin de soutenir cet élan volontariste et l’inscrire dans la durée.

Madany Sy : ‘’Il faut éviter la politisation’’

Le secrétaire général du Syndicat des travailleurs du nettoiement ne cache pas sa satisfaction par rapport à cette journée de nettoyage. Pour Madany Sy, il était temps que l’Etat s’implique pour rendre propre le pays. ‘’Nous avons toujours demandé que les populations et les autorités nous appuient pour un changement de comportement responsable à tous les niveaux’’. Seulement, il reste dubitatif quant au procédé. Pour lui, il faut éviter de politiser l’initiative. Il invite ainsi ses collègues du nettoiement à occuper les premiers rangs, afin d’écarter toute récupération politique. ‘’Ce n’est pas une fête. Depuis hier, nous entendons des maires qui s’activent à gauche et à droite. Heureusement que le président a demandé à chacun de rester chez soi pour nettoyer son secteur, afin d’éviter une forte mobilisation à Mermoz. Sinon, les gens ne vont pas travailler. Ils seront là pour se faire voir par le président. Or, ce n’est pas l’objectif’’, a indiqué M. Sy.

A ses yeux, l’efficacité de ce programme nécessite un plan de suivi. A défaut, dit-il, ça risque de rester un slogan. Dans ce dessein, Madany pense qu’il faut une stratégie à court, moyen et long terme. ‘’Il faut des moyens financiers, humains et techniques. On ne peut comprendre qu’avec tous ces moyens, la ville continue d’être sale. Cela prouve qu’il y a quelque part une indiscipline caractérisée d’une certaine frange de la population. C’est honteux’’, s’indigne le syndicaliste.

A ses yeux, il faut un sursaut national et une conscience citoyenne pour venir à bout de ce problème. A l’en croire, le nettoiement est devenu un enjeu national, car le Sénégal ne pourra jamais émerger dans la saleté, parce que les investisseurs ne viendront jamais dans un pays sale.

Pour Madany Sy, il n’y a pas mille solutions à ce phénomène. Des sanctions s’imposent ; il faut une répression. D’après ses dires, il y a un laisser-aller dans ce pays et l’appel du chef de l’Etat, pense-t-il, doit être décortiqué pour comprendre l’insistance sur l’état d’insalubrité de nos capitales et le programme ‘’Zéro déchet’’.

Le secrétaire général des travailleurs du nettoiement estime, en outre, qu’il faut la création d’un cadre de concertation et une bonne politique de communication pour que les populations adhérent à ce programme. A ses yeux, la persistance de l’insalubrité est due, en partie, à un problème de communication et une absence de volonté politique. ‘’Il faut un processus fiable et un changement de paradigme. Il faut penser également à l’organisation des états généraux du nettoiement où il y aura l’Etat central, les collectivités locales, les populations, les travailleurs et les concessionnaires, pour qu’on ait un schéma directeur à suivre. Sans cela, ce sera toujours un éternel recommencement’’, avertit M. Sy.
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