Après l’affaire de l’enfant-talibé enchainé par son maitre coranique, la Fédération nationale des associations de maîtres coraniques au Sénégal (Fnamcs) a réaffirmé, hier, la nécessité d’avoir une loi qui réglemente le fonctionnement des daara (écoles coraniques). ‘‘Nous invitons le gouvernement à adopter, dans les meilleurs délais, la loi qui régit les daara au Sénégal’’, a déclaré président de la Fnamcs, Serigne Moustapha Lo, hier à un atelier d’échanges organisé par le cadre de coordination et de suivi des six directives présidentielles portant, notamment, sur le retrait durable des enfants de la rue.
D’après M. Lo, cette loi qui doit définir les critères d’ouverture et de tenue d’une école coranique est indispensable, au vu de la récurrence des faits divers relatifs aux daara. Un contexte, note-il, dans lequel les daara sont par moments ’’diabolisés, à la suite de comportement d’individus qui les détournent de leur forme originelle à des fins économiques, en faisant mendier des enfants à longueur de journée.’’
Le thème de la rencontre était d’ailleurs : ‘‘La loi sur la modernisation des daara, enjeux et perspectives’’. Elle a enregistré la participation de beaucoup de représentants de ministères sectoriels comme l’Education nationale, l’Intérieur et les Affaires étrangères, de représentants d’associations de maîtres coraniques, des ‘‘ndayou daara’’ (marraines) des 45 départements du pays. Le principal souci, pour M. Lo, est une question d’identification fiable qui servira d’interface avec les pouvoirs publics. ‘‘Le gouvernement pourrait identifier ses interlocuteurs directs et ainsi faire parvenir à ces derniers les subventions aux véritables ayant droits, au même titre que les autres établissements d’enseignement privé confessionnel.’’
Propositions pertinentes pour un retrait irréversible des enfants de rue
Mercredi, le maitre coranique Khadim Guèye a été condamné à deux ans avec sursis pour maltraitance sur un de ses pensionnaires qui avait prétendument fugué. Ce dernier a été mis aux fers et l’indignation générale qui s’en est suivie a divisé l’opinion sénégalaise sur ces pratiques tortionnaires encore fréquentes dans beaucoup de daara. Serigne Moustapha Lo estime qu’avec une législation officielle et une implication de l’Etat, ces pratiques pourraient être combattues et grandement réduites. ‘‘Avec de la volonté politique, à travers la matérialisation de cette loi qui doit être adoptée à l’Assemblée nationale dans les meilleurs délais, tous ces manquements notés par endroits dans le fonctionnement des daara pourraient trouver une solution’’, a-t-il fait remarquer, ajoutant que ces dysfonctionnements sont généralement dus à ‘‘cette libéralisation ou le laisser-aller qui caractérise jusque-là le secteur’’.
La rencontre avait également pour but d’arrondir les angles d’une problématique où toutes les parties prenantes se regardaient avec beaucoup de méfiance. Venue présider cette rencontre, la ministre de la Femme, de la Famille, du Genre et de la Protection des enfants, Ndèye Saly Diop Dieng, a déclaré qu’‘‘on ne peut pas parler du développement du capital humain au Sénégal, sans évoquer les daara et le rôle déterminant qu’ils jouent dans la formation des jeunes’’, a-t-elle insisté. Cette dernière affirme toutefois attendre de cette rencontre inclusive des propositions pertinentes allant dans le sens d’un retrait durable et irréversible des enfants et qui seront présentés au président de la République.