La recomposition du champ politique sénégalaise post-présidentiel, adossée à l’actualité brûlante du moment marquée par les retrouvailles Wade-Macky, la libération par grâce présidentielle de Khalifa Sall, l’affaire des 94 milliards avec Ousmane Sonko, ou encore le silence d’Idrissa Seck, etc, laisse paraitre quatre grandes tendances au sein de l’opposition. En effet, à ce jour, l’opposition compte 4 grands pôles qui cherchent à exister politiquement, à savoir celui porté par le président du parti Rewmi, celui dépendant du ”Pape du Sopi“, sans oublier le camp tiré par le président de Pastef/Les patriotes, et celui qui se cherche autour de l’ancien maire de la ville de Dakar.
La nature ayant horreur du vide, les acteurs politiques, et surtout du côté de l’opposition, s’activent pour occuper la sphère politique au risque de disparaitre. Pour ce faire, des alliances sont en gestation, tout comme des cadres d’expression commune sont envisagés. Cela, dans le but d’organiser la riposte contre le président Macky Sall et son régime qui semblent tenir les cartes en main, au vu des actes posés, notamment les retrouvailles avec le “Pape du Sopi“ après plus de 7 années de brouille, ou encore la libération par grâce présidentielle de l’ancien maire de la ville de Dakar, Khalifa Sall, sans oublier le dialogue politique en cours qu’il a lui-même initié. Toutefois, cette réorganisation des adversaires du pouvoir en place, après la débâcle de la présidentielle de février dernier, laisse paraitre 4 «grandes» tendances au sein de l’opposition sénégalaise, dispersant ainsi les forces de celle-ci.
En effet, le dernier acte vient d’être posé par des leaders politiques que sont Pape Diop de Bokk Giss Giss, Cheikh Hadjibou Soumaré , Idrissa Seck du parti Rewmi, sans oublier Madické Niang , El Hadji Issa Sall et Malick Gakou du Grand parti, qui se sont réunis, le jeudi 24 octobre dernier. Dans la note sanctionnant ladite rencontre, ces responsables politiques disent vouloir poursuivre leurs échanges et réflexions sur la situation nationale. Mieux, le communiqué indique qu’ils se sont accordés sur la nécessité de formaliser le cadre de concertations, mis en place au lendemain de l’élection présidentielle du 24 février 2019. Il apparait clairement que le candidat sorti deuxième à la présidentielle avec 20,51%, resté aphone depuis sa dernière déclaration tenue après les résultats de la présidentielle, tout comme du reste ses camarades de l’opposition qui composent ce dit cadre, veulent une entité qui leur permettra d’exister politiquement.
OUSMANE SONKO S’ISOLE POLITIQUEMENT
Au vu des noms qui composent ledit cadre, il en ressort de toute évidence que le candidat sorti 3ème à l’élection présidentielle dernière, n’est pas des leurs. Le leader de Pastef/Les patriotes, Ousmane Sonko fort de son score de15,67%, doit faire son petit bonhomme de chemin ailleurs. Lui qui est considéré par certains analystes, depuis un moment maintenant, comme le seul sur le terrain politique contre le régime du président Macky Sall, a formé une coalition nommée Coalition Jotna/Patriotes pour l’alternative qui a tenu son assemblée générale constitutive, le 31 août dernier. Pour se démarquer de ceux que l’analyste politique, Momar Diongue appelle «les politiciens classiques», Ousmane Sonko et sa coalition disent «œuvrer à l’indispensable renouvellement de la politique, dans le discours comme dans les actes, sous-tendu par les valeurs et l’éthique du patriotisme, du dévouement au peuple, de l’intérêt général et de l’exemplarité citoyenne à tous les niveaux». Mieux, ils prétendent s’inspirer des Conclusions des Assises nationales et des Recommandations de la Cnri actualisées, pour donner corps et vie à leur projet commun de transformation sociale, entre autres.
KHALIFA SALL SE CHERCHE
Par ces références aux Conclusions des Assises nationales, le camp d’Ousmane Sonko semble se rapprocher de celui de l’ancien maire de la ville de Dakar, Khalifa Sall qui se cherche. En effet, lors de sa première sortie officielle après son élargissement de prison par grâce présidentielle, Khalifa Sall avait prétendu vouloir engager une politique adossée aux dites conclusions. Il avait indiqué que «les conclusions des Assises nationales constituent un document de référence de notre projet», non sans estimer qu’il était nécessaire de les adapter au contexte et aux évolutions de notre pays, de l’Afrique et du monde. Dans le but de créer une plateforme autour de sa personne, Khalifa Sall n’a pas manqué de faire un appel du pied aux Socialistes, mais aussi à la gauche. Pour ce faire, il avait laissé entendre que «nous sommes de gauche, nous sommes des socialistes. Nous sommes les héritiers d’une histoire vivante forgée dans l’alliance entre la démocratie et le progrès». Toutefois, la perte de son éligibilité semble tant soit peu avoir calmé ses ardeurs, obligé qu’il est de mettre de l’eau dans son « bissap » afin d’espérer une amnistie.
ME WADE ET SON PROJET DE REHABILITATION DE SON... KARIM
A côté de ces trois premières tendances citées ci-dessus, il convient de noter celle qui gravite autour de l’ancien président de la République, Me Abdoulaye Wade. Même si celle-ci est coordonnée par Moctar Sourang, il convient de préciser que la locomotive du Front de résistance nationale (Fnr) reste sans conteste le Parti démocratique sénégalais (Pds) de Me Wade. Cette tendance de l’opposition est en plein dans le dialogue politique, même si le Pds avait boycotté au début ledit dialogue pour accepter par la suite de rejoindre la table des concertations, après les retrouvailles entre Abdoulaye Wade et le président Macky Sall. Pour ce bloc de l’opposition, le recouvrement de l’intégralité des droits civils et politiques de Karim Wade fait partie des objectifs fixés. C’est en réalité cet objectif qui les éloigne des autres camps de l’opposition, déterminés à consolider leurs acquis en l’absence du fils de l’ancien président.
Il convient de noter qu’à coté de ses «grandes» tendances au sein de l’opposition, il existe d’autres plateformes qui cherchent à se faire une place dans le landerneau politique. Il en est ainsi du Congrès de la renaissance démocratique (Crd) qui regroupe le Mouvement Tekki, l’Alliance pour la citoyenneté et le travail (Act), le Parti de l’Émergence citoyenne, le Mouvement pour la République des Valeurs, Taxaw Temm, la Ld Debout et Ensemble. A ceux-là s’ajoutent certains partis de gauche en embuscade. Ces derniers peinent à se réunifier, même s’il reste évident que ce sont eux les «Faiseurs de roi», au vu des deux alternances connues dans ce pays.