Inspectrice d’académie de Dakar, Adjara Sy est formelle. Il faut évaluer le système éducatif sénégalais de fond en comble, afin de corriger les dysfonctionnements et d’améliorer l’existant, pour parvenir à une situation performante et apaisée.
Le chef de l’Etat, Macky Sall, a relevé, lors de la cérémonie de remise des prix du Concours général, la baisse du niveau des élèves. Quel commentaire en faites-vous ?
La cérémonie de remise des prix du Concours général met en exergue la qualité, l’excellence, la réussite. Heureusement qu’il a attiré notre attention et celle de tous sur ceux qui ne sont pas parvenus à cette réussite. Je crois que c’est ceux-là qui méritent notre attention. Ceux qui ont déjà réussi sont à féliciter, mais ceux que nous devons prendre en charge pour régler les problèmes de ce pays, c’est ceux qui n’ont pas pu réussir. Il faudra les encourager, les motiver et leur porter une attention particulière. C’est ensemble que nous ferons ce pays, mais ce n’est pas en laissant en rade une bonne partie de notre jeunesse.
Le président Macky Sall a appelé à une révision du contenu des programmes. Qu’en pensez-vous ?
La révision des programmes sera un aspect du problème. Il y a d’autres facteurs qui devront etre considérés. C’est un tout. C’est global. Ça demande une étude approfondie des experts de l’éducation, de tous les acteurs, de toute la communauté. Une réflexion globale qui va prendre en compte tous les aspects du problème, pour enfin trouver une solution définitive. Il faut dire que le Sénégal est un pays dans le monde et que maintenant, ce creux de l’éducation, on le retrouve partout. Même dans les pays développés, ils sont confrontés aux mêmes problèmes que nous. Ce sont les mêmes interrogations partout, les mêmes problématiques qui se posent. Il n’empêche qu’au Sénégal, nous devons essayer de nous en sortir.
Les résultats aux examens sont jugés catastrophiques, surtout cette année. Cela ne confirme-t-ils les propos du chef de l’Etat ?
Les résultats sont mitigés, compte tenu des moyens que l’Etat met en œuvre, de l’investissement des parents, des efforts des uns et des autres. Nous ne pouvons pas nous satisfaire de 50 ou de 60 %. Parce qu’il faut penser à ceux qui ont échoué et non pas à ceux qui ont réussi. Quand on échoue, c’est beaucoup de moyens qu’on a mis en œuvre qui n’ont pas donné de résultats. C’est des attentes des parents qui n’ont pas été satisfaites. Mais aussi, c’est la déception chez les apprenants. Je pense que le système éducatif gagnerait à être évalué. On doit corriger les dysfonctionnements et essayer d’améliorer l’existant. Tout n’est pas mauvais.
Quand on a 50 %, c’est bon, mais ça peut être mieux. Parce que nous devons mettre en œuvre la pédagogie de la réussite. C’est la réussite des élèves qui doit être notre credo. L’échec doit être exceptionnel. On ne peut pas accepter de mettre autant de moyens humain, financier, et matériel dans un système et se retrouver à 37 % au Bac, 52 % au Cfee. Au Bfem, à Dakar, on est à 47 %. Ça ne peut pas être satisfaisant. Nous devons faire mieux. Le pays en a besoin. Nous sommes un pays qui a certes des moyens limités, mais qui est en devenir, qui a besoin de tous les bras de ses enfants. Ces derniers doivent être bien formés pour jouer leur partition dans l’émergence de cette nation.
Est-ce que l’instabilité notée dans le front social, avec des grèves à n’en plus finir des enseignants, n’est pas pour beaucoup dans les problèmes du système éducatif ?
Je ne peux pas donner de facteurs explicatifs, parce que c’est complexe. Il faut voir tous les aspects du problème pour pouvoir en tirer des conclusions. C’est sûr que les grèves cycliques que l’on a eues, depuis l’année 2012, ont leur impact sur les résultats qu’on a aujourd’hui. Mais je crois qu’on gagnerait à étudier le problème plus en profondeur, pour essayer de trouver une solution globale pour le bien du système éducatif sénégalais.