La Cour d’appel de Thiès a confirmé lundi la condamnation de Bara Sylla et Mamadou Oury Diallo à sept et cinq ans de prison ferme respectivement, tout en ordonnant qu’un mandat d’arrêt international soit décerné contre ce dernier, un ressortissant guinéen, dans le cadre du procès des faux-médicaments de Touba Bélel.
Bara Sylla, commerçant au marché Okaz de Touba, a été arrêté à Dakar, après que deux camions transportant des faux-médicaments d’une valeur estimée à 1,3 milliard de francs CFA avaient été arrêtés le 11 novembre 2017 à Touba Bélel.
Désigné comme le destinataire de la marchandise illicite, il était poursuivi au même titre que son co-prévenu, Amadou Oury Diallo, pour association de malfaiteurs, exercice illégal de la profession de pharmacien et complicité de contrebande.
La dernière infraction avait finalement été requalifiée par le Tribunal de grande instance de Diourbel en intéressé à la fraude.
Après une condamnation en première instance, 7 ans pour Sylla et 5 ans pour Diallo, le procès en appel de l’affaire des faux-médicaments de Touba Bélel a été mis en délibéré jusqu’à ce lundi par la Cour d’appel de Thiès.
L’avocat général avait requis lors du procès en appel, une réduction de la peine de prison de Bara Sylla de sept à quatre ans et une exemption de peine pour Amadou Oury Diallo.
"Nous avons gagné sur toute la ligne", a réagi l’avocat Me Abdoulaye Babou, qui dirigeait le pool d’avocats de la partie civile, composée de l’Ordre des pharmaciens et du Syndicat dudit corps.
Il s’est réjoui de ce que la Cour d’appel a "donné raison" aux avocats de la partie civile, qui se sont "fondamentalement battus contre la grâce obtenue par Amadou Oury Diallo".
"La Cour d’appel vient de nous donner raison, en écartant la grâce accordée par le Président Macky Sall, pour dire que cette Cour est compétente pour juger Amadou Oury Diallo", a poursuivi Me Babou, ajoutant que la peine de cinq ans qui lui a été infligée, en plus d’être confirmée, a été associée à un mandat d’arrêt international.
L’avocat a encore salué l’option du président de la Cour, le juge Souleymane Téliko, de lire tout l’arrêt - chose inhabituelle -, "au regard de l’importance de ce dossier".
Me Babou a rappelé que le parquet avait requis la réduction de peine contre Bara Sylla, se disant "étonné" par une telle posture de part du procureur, censé "protéger la société", et vu que les "méfaits des faux-médicaments sont connus de tous".
Une étude de l’OMS fait état de 800.000 morts du fait des faux-médicaments par an en Afrique, a-t-il relevé, non sans préciser qu’ils tuent surtout "les plus pauvres".
"Maintenant la cause est entendue, il faut lutter par tous les moyens contre les faux-médicaments", a-t-il encore martelé, déclarant consacrer le "reste de (sa) vie" à une "bataille perpétuelle" pour cette cause qu’il entend "défendre au nom de Dieu pour protéger les plus faibles". "Jamais je ne baisserai les bras", promet-il.
Le président de l’Ordre des pharmaciens Ndiaye Sall a quant à lui préconisé l’incinération publique, de l’intégralité des faux-médicaments saisis et des camions les transportant, afin de s’assurer qu’ils ne représentent plus un danger à Diourbel.
La destruction de ce stock confié à la douane de Diourbel, a été suspendue jusqu’après le procès pour des raisons de procédure, a-t-il relevé.
Il a, dans le même moment, exhorté l’ensemble des ordres et l’inter-ordre africain à "surveiller ce trafiquant Amadou Oury Diallo contre qui un mandat d’arrêt international a été décerné, dans tous les pays où ce trafic est observé".
Se disant insatisfait du verdict, Me Khassimou Touré qui assurait la défense de Bara Sylla, annonce qu’après réflexion, il va emprunter la voie de la cassation.
Il dit regretter une "décision malheureuse dans laquelle un Sénégalais bon teint a été condamné, alors qu’un étranger qui aurait pu jouer un rôle actif dans la commission de l’infraction a été exfiltré de la procédure".
Il a dit ne pas comprendre le sens de cette décision par laquelle "un compatriote (est) sacrifié sur l’autel d’intérêts occultes". Cela, "même si les dommages intérêts alloués aux pharmaciens à hauteur de 400 millions ont été ramenés à de justes proportions, c’est-à dire 50 millions", a-t-il ajouté.