Jusque dans un passé récent, elle représentait l’excellence de l’enseignement supérieur sénégalais. Aujourd’hui, l’université Gaston Berger traverse une période difficile. Elle ne fait presque plus rêver et malgré d’âpres luttes, les revendications des étudiants semblent tomber dans l’oreille d’un sourd.
L’université Gaston Berger de Saint-Louis se relève difficilement de la crise de 2018. Avec la grève qui a occasionné la mort de l’étudiant Fallou Sène, les étudiants avaient décrété un mot d’ordre de grève illimitée avec plus de trois mois sans cours. Avec ce temps perdu, certaines unités de formation et de recherche (Ufr) ont eu du mal à boucler l’année académique. Certaines ont été obligées de prolonger l’année universitaire pour terminer le programme. Conséquences : une année invalidée pour certains départements et l’absence de budget pour l’université.
En effet, avec cette décision, pour 2018-2019, les étudiants ayant prolongé leur année universitaire ne vont pas payer les droits d’inscription. L’université n’a, par ailleurs, pas reçu de nouveaux bacheliers. Ceci a impacté sur le budget de l’institution, avec un retard dans le démarrage des cours, car ne pouvant pas honorer ses engagements envers les repreneurs des restaurants qui, faute de moyens, étaient dans l’incapacité d’assurer la restauration des étudiants. L’ouverture du campus a été repoussée.
Une situation difficile pour le Crous, même s’il reconnait comprendre la démarche des étudiants. ‘’Quand les étudiants ne reçoivent pas leurs bourses à la date prévue, ils sanctionnent en décrétant des Jst (journée sans tickets). Cette démarche entraine une énorme perte pour le Crous qui tire ses ressources additionnelles de ces recettes. L’achat des tickets est une manne financière qui sert parfois à payer les journaliers et beaucoup d’autres employés’’, explique Ibrahima Baldé, adjoint du chef de service au Crous.
Du côté des étudiants, les mêmes revendications qui ont emporté Fallou Sène demeurent. La situation a même empiré. En 2018, ils réclamaient la bourse. Aujourd’hui, en plus des retards de paiement de ces bourses, les conditions sociales dans le campus sont devenues très précaires. Les coupures d’eau et d’électricité sont devenues répétitives et l’accès à l’Internet un luxe. ‘’Au campus social de l’Ugb, on ne peut pas rester une semaine sans coupure d’eau. De même que l’électricité. On note des coupures répétitives. Beaucoup de matériels électroniques et électroménagers des étudiants sont gâtés à cause des coupures’’, se désole Saër Ba, ancien Président de séance de la Cesl.
Même constat pour l’accès à la connexion, indispensable pour la recherche. ‘’Il y a quelques années, on parlait de ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Maintenant, on a ajouté de l’Innovation. Je ne peux pas comprendre comment on peut faire de la recherche et de l’innovation sans l’accès à l’Internet. C’est impossible’’, estime-t-il. Son camarade Bara Kane, étudiant en Master 2 en communication, estime qu’à ‘’l’Ugb, le wifi, c’est juste un slogan’’.
En plus de ces conditions sociales difficiles, les étudiants ont encore soif de justice pour le martyr Fallou Sène. En effet, un an après sa mort, ses camarades réclament encore justice, face à des autorités, à leurs yeux, insensibles à leur réclamation. Ce 15 mai marque l’anniversaire de son décès. Ses camarades demandent que lumière soit faite sur cette affaire et que justice soit rendue.
‘’Ce qui est malheureux, c’est qu’après la mort de Fallou, il y a eu un aveu devant tout le monde, à la télévision. Ça nous fait très mal de voir que la personne qui a tué notre camarade vaque toujours à ses occupations, sans être inquiétée. Ça nous meurtrit’’, témoigne Alé Touré, Président de l’Amicale des étudiants ressortissant de Diourbel.
Pire, les doléances qui ont emporté Fallou Sène restent encore d’actualité. Au problème de non-paiement à temps des bourses, vient s’ajouter l’impérieuse question de l’assainissement avec les fosses septiques qui se déversent partout dans le campus.
Pour rendre hommage et demander une énième fois justice pour Fallou Sène, les étudiants ont organisé une marche pacifique, ce mardi.