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Atelier d’évaluation de la présidentielle: Une démocratie électorale sous haute surveillance
Publié le jeudi 16 mai 2019  |  Enquête Plus
Conférence
© aDakar.com par DF
Conférence de presse de la Direction générale des Élections
Dakar, le 18 août 2017 - Le Directeur général des Élections a tenu une conférence de presse avec ses services pour s`exprimer sur le débat sur l`organisation difficile des dernières élections législatives du 30 juillet dernier. Il a promis une réponse au livre blanc publié par la coalition gagnante Wattu Sénégal. Photo: Thiendella Fall, Directeur général des Élections (DGE)
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En conclave, hier, les acteurs de la société civile se sont penchés sur les réussites et échecs de la dernière Présidentielle qui, comme à l’accoutumée, s’est déroulée sous une vigilance particulière de la communauté internationale. Certains pays ont mis leurs billes même pour équiper les juridictions nationales dépourvues de tout.

Un éternel recommencement. C’est l’image qu’offre la démocratie sénégalaise, depuis quelques années. Les élections, dans l’ensemble, se déroulent dans la paix et la sérénité certes, mais dans une tension permanente entre les acteurs. Instaurant, à chaque fois, un climat de peur généralisé. L’élection présidentielle de 2019 n’a pas dérogé à la règle.

Responsable au programme Sunu Election, l’expert Waldiodio Ndiaye affirme : ‘’Il faut le reconnaitre, nous n’avons pas réussi à mettre en place un consensus fort entre les différents acteurs, autour des différents aspects que soulève l’organisation des élections. Les protagonistes à cette élection ont été en désaccord sur plusieurs points, dont le parrainage, le fichier électoral… On peut dire que ce fut l’une des élections où il y a eu le plus de contradictions et de divergences.’’

Toutefois, malgré les difficultés, grâce à l’action de la société civile, le pire a pu être évité. La Présidentielle, finalement, s’est déroulée dans la paix et la quiétude, se sont réjouis les membres de la société civile, au cours de leur atelier d’évaluation hier, au King Fahd Palace. Mais que ce fut âpre !

En fait, en coulisses, beaucoup de médiations ont été menées pour éviter le chaos au Sénégal. Ce qui n’était pas évident dans un tel contexte. Au summum du contentieux, le professeur Babacar Guèye et ses amis ont mené les tractations qui sont loin d’avoir été vaines. Ils rappellent leurs différentes rencontres avec l’ancien président et non moins secrétaire général du Parti démocratique sénégalais pour le faire ramener à la raison. La société civile ne s’est pas limitée à parler aux responsables politiques. Toujours pour faire changer d’avis Wade qui promettait de s’opposer par tous les moyens à la tenue du scrutin, M. Ndiaye est revenu sur leur médiation auprès du khalife général des mourides. Cela, signale-t-il, a été d’un grand apport. Les acteurs de la société civile, réunis dans le cadre de la plateforme Sunu Election, avaient également eu à rencontrer le chef de l’Etat, mais sans grand succès, à en croire leur porte-parole. ‘’Le temps de la discussion est terminée. Maintenant, c’est le temps de la campagne’’, leur avait opposé Macky Sall.

La surveillance directe européenne et indirecte anglo-saxonne

Pour la dernière élection présidentielle, ils ont donc été des milliers d’observateurs nationaux à se déployer sur le terrain, pour la surveillance du scrutin. Mais ces nationaux n’ont pas été les seuls. L’étranger était également très présent dans le processus électoral. D’abord, il y a eu la mission d’audit de l’Union européenne qui a eu à scruter de près le fichier électoral. En aval, ils étaient également nombreux les observateurs de l’Ue visibles partout à travers le territoire national. Cette présence des observateurs européens avait d’ailleurs fait l’objet de nombreuses controverses dans le passé, particulièrement en 2012.

Si les Européens choisissent, eux, de déployer habituellement leurs propres citoyens pour l’observation des élections dans les pays africains et au Sénégal en particulier, les Américains, en ce qui les concerne, ont opté pour une démarche totalement différente. Lors de la Présidentielle, il s’est agi, pour ces derniers, d’armer la société civile sénégalaise ainsi que les magistrats, afin de renforcer la crédibilité du scrutin. C’est dans ce cadre que le partenariat avec l’Usaid a permis d’équiper les juridictions du Sénégal presque dépourvues de tout. Ainsi, c’est pas moins de 40 ordinateurs Pc, 40 imprimantes, 20 scanners et 5 vidéoprojecteurs et 5 photocopieurs. Toujours grâce à ce programme, 270 magistrats ont pu bénéficier d’une formation. Certains ne manqueront certainement pas de relever le paradoxe entre la véhémente décision de l’Etat d’interdire une cérémonie de don de gilets à des journalistes - des privés - tout en admettant que ses propres agents, les magistrats soient équipés par un pays étranger. Un aveu puissant de faiblesse.

Dans tous les cas, indépendamment des questions de souveraineté qui peuvent être évoquées, cet appui de l’Usaid et du programme Sunu Election semble être le bienvenu pour les magistrats qui, autrefois, rencontraient d’énormes difficultés. ‘’Certaines juridictions, souligne le président de l’Union des magistrats sénégalais, sont tellement démunies qu’elles retardaient le travail de la Commission nationale de recensement des votes’’. Et pour preuve, il cite la réduction drastique du nombre de Pv redressés. Avant, il pouvait atteindre plus de 60 %. Cette fois, seulement 10 redressements. Avec l’élaboration d’un guide qui a permis d’harmoniser les méthodes de redressement.

Même les juridictions en partie équipées grâce à l’Usaid

Toutefois, tient-il à préciser, ‘’cette formation a toujours eu lieu à la veille des scrutins. Mais le problème c’est que le budget qui permettait à la Cnrv de procéder à cette formation arrivait tardivement, à la veille de l’élection. Résultat : le temps était vraiment limite. C’était plus une journée d’information qu’une réelle formation’’.

Par rapport à l’impact de cette composante du programme Sunu Election, Souleymane Téliko explique que cela a permis plus de célérité dans l’établissement des procès-verbaux. Les commissions départementales, à l’en croire, ont pu donner en temps réel les résultats à la Cnrv. Mieux, fait-il remarquer, dans les juridictions éloignées, les responsables ont pu scanner et transmettre les Pv pour aller plus vite.

La question qui s’est dès lors posée est de savoir pourquoi tant de retards dans la proclamation des résultats provisoires ? Le président de l’Ums souligne : ‘’C’est, d’une part, à cause du vote des Sénégalais de l’étranger. Il faut préciser que dans l’établissement de ces Pv, aucun magistrat n’intervient. Et c’est un vrai problème à ce niveau, car il peut arriver qu’un Pv mette 10 jours avant de parvenir à la Cnrv. D’autre part, les raisons de cette lenteur, c’est que la commission se prononce uniquement sur la base des Pv originaux. Donc, même si les juridictions font le scanne, la Cnrv a certes une base sur laquelle travailler, mais avant de proclamer, elle doit attendre les originaux. Cet aspect de la règlementation, je pense qu’il faut évoluer’’.

Le casse-tête du parrainage

Lors de ce conclave de la société civile, le mécanisme de parrainage qui avait cristallisé les débats tout au long du processus, était également au centre de toutes les discussions. Pour le leader de l’Ong 3D, Moundiaye Cissé, il faut tout bonnement dessaisir le Conseil constitutionnel de la vérification du système. M. Cissé se dit convaincu que le rôle de cette haute juridiction doit se trouver ailleurs.

Dans son schéma, trois options ont été avancées. D’abord, créer une commission chargée de cette mission d’évaluation et faire de sorte qu’elle soit représentée partout sur le territoire. La deuxième proposition, qui permettrait d’éviter toutes confusions, est d’accorder cette prérogative à la Commission électorale nationale autonome qui a déjà un bon maillage du territoire national. Enfin, si ces deux premières options n’agréent pas les décideurs, ils pourraient maintenir le système actuel non sans renforcer le dispositif au niveau du Conseil constitutionnel.

Selon lui, cette institution, en l’état actuel, ne peut pas jouer un tel rôle, dans la mesure où elle n’est même pas responsable de la détermination de la fiche de parrainage.

M. Cissé a également fait des propositions pour éviter les doubles parrainages, tout comme à propos de la rationalisation des partis politiques, du financement des partis, du statut de chef de l’opposition…

Sur ce dernier point, certains ont défendu que ce statut doit revenir normalement à Idrissa Seck, puisque le Sénégal est maintenant bien ancré dans le cadre d’un régime présidentiel. Dans un régime parlementaire, par contre, certains auteurs préconisent que le chef de l’opposition doit revenir à la minorité parlementaire.

Plus de 2 millions de cartes d’électeur échappent à la Cena

Et si l’opposition ne devait en vouloir qu’à elle-même ? En tout cas, on pourrait tenter de le croire, si l’on sait que, rarement, ils posent les véritables questions quand il le faut. La rencontre organisée hier, par la société civile, a montré les failles dans le processus électoral. En fait, avec la refonte de 2017, les cartes nationales d’identité et d’électeur ont été fusionnées en une seule carte. Djibril Gningue de constater : ‘’Avec l’article L54 qui institue la distribution permanente, on permet la distribution des cartes d’électeur sans la présence des membres de la Cena, sans la présence des partis politiques. C’est ainsi que plus de 2 millions ont été distribuées. C’est un problème auquel il faudra trouver des solutions à l’avenir.’’ Il regrette également que le fichier n’ait pas été stabilisé plus tôt. ‘’Le fichier, dit-il, a continué à bouger jusqu’à la veille de l’élection. Or, il n’est pas censé bouger pendant cette période. Pour ce faire, il faut éviter les audits à la veille des scrutins’’.

Monsieur Gningue a terminé son allocution avec le dialogue. Devant l’ambassadeur Saidou Nourou Ba qui a rejoint la Cena, il a mis en exergue l’échec des concertations qu’il a eues à piloter entre 2017 et 2019. D’après lui, trois modèles de pilotage ont jusque-là été expérimentés au Sénégal. En 1992 comme en 2004, selon lui, c’était une commission cellulaire qui était chargée de cette mission. En 2010, c’était au tour d’un comité indépendant dirigé par la société civile. Pour lui, depuis 2016, le format a été semi-indépendant, puisque dirigé par un indépendant, mais assisté par l’Administration.

THIENDELLA FALL

Parrainage, report des élections locales, révision des listes électorales… Le directeur général des Elections, Thiendella Fall, fait dans le clair-obscur.

C’était hier, en marge de l’atelier d’évaluation de la participation de la société civile à la dernière Présidentielle. Thiendella Fall, interpellé sur la faisabilité technique du parrainage aux élections locales, affirme : ‘’Il faut savoir que le parrainage est là pour toutes les élections, aussi bien présidentielle, législatives que locales. Aujourd’hui, il est question de concertations entre les acteurs politiques. Cette question du parrainage sera certainement un des points les plus importants de ces concertations. A cette occasion, on va voir la question de sa mise en œuvre.’’

A propos de la date de la révision des listes électorales à la veille de ces locales, il rétorque : ‘’Cela dépendra également de ce que les politiques en diront. Ce qu’il faut savoir, c’est que la loi ne prévoit pas de délai. Elle dit simplement qu’il faut une révision exceptionnelle avant cette élection et c’est à l’Administration de juger de l’opportunité de le faire à un moment déterminé.’’

Par ailleurs, le directeur général des Elections salue l’implication de la société civile dans le cadre du dernier scrutin. ‘’La société civile, dit-il, a aussi joué un rôle important dans la facilitation du dialogue entre les acteurs politiques, la sensibilisation citoyenne, dans le retrait des cartes… Elle a donc bien rempli le rôle qui est le sien et nous nous en félicitons’’.

Pour lui, il est tout à fait normal que cette rencontre ait été tenue pour procéder à l’évaluation. ‘’Tout le monde a suivi les efforts de la société civile tout au long du processus électoral, notamment à l’occasion de la Présidentielle du 24 février dernier. C’est donc tout à fait normal que ce travail soit évalué. Nous étions venus non seulement pour lancer ces travaux, mais aussi participer activement à cette évaluation’’, s’est-il réjoui.

MOR AMAR
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