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Le juge sauve les ‘’Thiant’’
Publié le mardi 7 mai 2019  |  Rewmi
Cheikh
© Autre presse par DR
Cheikh Béthio Thioune, guide des Thiantacounes
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Les Thiantacounes ont connu des fortunes diverses pour ce qui est du verdict tombé hier. Des condamnations plafonnées à 15 ans pour les auteurs directs des délits et d’autres peines de dix ans et même moins pour les complices. Voilà ce que le juge du tribunal de première instance de Mbour a décidé hier.

Bien sûr, tout le Sénégal a retenu son souffle en se demandant quel sort sera réservé à Cheikh Béthio Thioune, le guide spirituel des Thiantacounes ?

Eh bien, il a été condamné à une peine ferme de dix ans, avec la saisie de tous ses biens, étant entendu que sa complicité par instigation (ndiguel) a été retenue par le tribunal.

Il ressort également de l’audience que, contrairement à ce qu’avait demandé le Procureur, non seulement la perpétuité n’a pas été retenue, mais le mandat d’arrêt international n’a pas été prononcé.

C’est dire que le Cheikh pourrait continuer tranquillement ses soins et rentrer au pays lorsqu’il sera guéri. Un verdict qui montre que s’il était présent, le juge n’aurait certainement pas prononcé le mandat de dépôt à l’audience qui aurait permis son incarcération.

En tout état de cause, le tribunal a certes condamné le Cheikh, mais en le laissant en liberté. Son âge et son état de santé ont dû avoir pesé sur la balance.

Manifestement, Cheikh Béthio a perdu beaucoup de poids ces derniers temps.

Un verdict qui traduit certes le courage des magistrats, surtout du parquet, qui ont pris toute leurs responsabilités, mais aussi la gêne qu’éprouve le système judiciaire à connaitre des affaires sensibles où des personnalités importantes sont impliquées.

Contrairement aux autres, il a bénéficié d’une liberté provisoire et l’instruction du dossier a tellement traîné que certains ont même douté que l’affaire soit, un jour, inscrite au rôle.

Comme me l’a dit un ami et éminent professeur, le juge, dans cette affaire, avait en face de lui, un simple citoyen, mais la réalité est plus complexe. L’égalité des citoyens devant la loi est une fiction juridique dont nous avons besoins pour un souci de stabilité sociale.

Mais, dans la pratique, il s’avère que certains citoyens ont des privilèges que les autres n’ont pas, ne serait-ce que celui d’être défendu par un pool d’avocats, et parmi les meilleurs.

Ceux qui sont défendus d’office par un avocat qui peut ne pas être très motivé, ne sont pas forcément défendus de la même façon.

Cheikh Béthio est un homme religieux, une personnalité en qui croient des centaines, voire milliers de personnes. Il n’est pas n’importe qui. Et le tribunal ne saurait ignorer cet état de fait. Cela fait partie des éléments non-mentionnés dans le dossier et qui comptent.

Si vous prenez la responsabilité de juger quelqu’un par contumace, comme on le fait pour un fugitif, vous devez prononcer le mandat d’arrêt international.

Mieux, toute sa vie a été dédiée au vénéré Cheikh Serigne Saliou Mbacké, pour lequel il organise ses fameux ‘’thiant’’ qui mobilisent du monde. Et cela aussi compte.

Si le Cheikh retourne en prison pour dix ans, ce sera la fin des ‘’thiant’’ et de toute la philosophie qui les sous-tend. Les implications socioreligieuses seront importantes. Et les magistrats ne pouvaient pas ignorer cela.

Non pas que le tribunal n’a pas dit le doit, mais il l’a dit en tenant compte du contexte, de la stature de la personne, des implications du verdict, etc.

C’est justement cela la particularité du procès pénal. Ici, on ne juge pas les faits uniquement, mais on juge la personne. Et la personne, c’est un tout dans un corps social qui a ses réalités.

Par exemple, je suis sûr que des meurtres aussi sordides, perpétués sur le sol sénégalais, suivis d’inhumation sans autorisation, auraient, en temps ‘’normal’’, valu à leurs auteurs au moins 20 ans de prison ou la perpétuité.

A ce propos, les 15 ans prononcés sont faibles au regard de la gravité des faits. Et comme tout le monde le sait, il est difficile de condamner sévèrement les coupables tout en ne le faisant pas pour les complices, surtout dans un contexte où le respect de l’ordre du supérieur est sacré.

En somme, la Justice a pris toutes ses responsabilités en donnant un verdict qui tient compte de beaucoup d’impératifs d’ordre social et religieux afin de ne pas créer les conditions d’un dysfonctionnement social important.

Cependant, il est à se demander si le Cheikh va exécuter l’autre peine qu’est l’amende de 200 millions prononcée, surtout s’il sait qu’il n’y aura pas de contrainte par corps en cas de non-exécution.

Assane Samb
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