Décidément, le marché de l’eau ne brille toujours pas par sa transparence dans les pays où il est assuré par des sociétés privées qui sont loin d’être des modèles de gestion. Le site français capital.fr, visité par Rewmi Quotidien, a publié en novembre 2017, un article intitulé « Arrangements entre élus et gestionnaires: le scandale du prix de l’eau », dans lequel des sociétés privés, dont Suez et Veolia, sont impliquées. Corruption, abus de bien social, surfacturations, emplois fictifs, financement occulte de partis politiques… Tout y passait, ou presque. Et c’était les usagers qui réglaient la note.
Les géants de l’eau, Suez et Veolia ; sont accusés en France, dans le cadre du marché de l’eau, de faire toujours leurs petites affaires avec les élus… sur le dos des usagers.
Selon le site français capital.fr consulté par Rewmi, lors d’un premier contrôle, en 2010, la chambre régionale des comptes avait dénoncé l’illégalité du marché passé avec Veolia par ce regroupement de communes pour l’assainissement et la distribution d’eau, épinglé la “comptabilité tronquée” de l’entreprise prestataire et obtenu du Sedif la promesse d’y mettre bon ordre.
Sept ans plus tard, les robes d’hermine ont remis le couvert, histoire de voir si les choses s’étaient améliorées.
Eh bien, pas du tout. Cette fois, elles ont découvert que la rémunération nette de Veolia avait été discrètement triplée par le Sedif entre 2011 et 2014 (de 7 à 21 millions d’euros par an), au mépris de clauses du contrat initial que l’entreprise facturait de surcroît 7 millions d’euros de frais de siège sans aucun justificatif, et que les 4,5 millions d’habitants concernés payaient leur eau 20% plus cher que leurs voisins parisiens (4,20 euros le mètre cube, contre 3,50).
Les méthodes de fraude des trois sœurs ennemies, Veolia, Suez et la Saur.
Coup sur coup, trois grandes lois ont donc été votées par la gauche, puis par la droite (Sapin en 1993, Barnier et Mazeaud en 1995), pour renforcer le cadre réglementaire et remettre un peu de morale dans le système. Deux décennies plus tard, force est de constater que ça n’a pas marché. Dans beaucoup des communes qui n’ont pas choisi de municipaliser le service, les petits arrangements avec les sociétés prestataires restent monnaie courante. Et pour une bonne partie des abonnés, l’enquête réalisé par le site Français capital.fr montre que la facture est toujours bien plus salée qu’elle ne le devrait.
Nos confrères révèlent que les liens incestueux entre les collectivités locales et les sociétés privées n’ont jamais été rompus. Tout autant qu’il y a vingt ans, les trois sœurs ennemies du secteur, Veolia, Suez et la Saur, ont recours à toutes les méthodes imaginables pour entretenir l’amitié avec les élus et les fonctionnaires territoriaux. Du légal, comme le sponsoring du club de sport local ou la caisse de champagne envoyée à Noël, au plus contestable, comme les invitations à déjeuner dans les grands restaurants, les voyages d’études sous le soleil ou les matchs de football à répétition dans la loge VIP de l’entreprise.
Selon toujours le site, ce climat d’amitié sincère est certainement très bon pour les comptes des entreprises. Mais il l’est beaucoup moins pour le portefeuille des abonnés. Déjà trop peu contrôlés sur le terrain, les opérateurs privés en profitent en effet pour faire du gras sur le dos des usagers, avec le consentement tacite des collectivités locales.
Première astuce, facturer des services imaginaires ou des travaux inutiles. A Lourdes, par exemple, Suez s’est longtemps fait payer le remplacement des branchements de tuyaux de plomb, alors que l’entreprise s’était engagée à prendre ces travaux à sa charge lors du renouvellement de son contrat de délégation de service public (DSP).
Dans l’Essonne, Suez usait d’une autre tactique : il adressait à tous les usagers une taxe sur les eaux pluviales qui n’était due, en réalité, que par les entreprises. C’est Wissous, une petite commune limitrophe de l’aéroport d’Orly, qui a débusqué le loup en 2016, à l’occasion de son changement d’intercommunalité. Pour cette seule citée de 5.000 habitants, ce sont plusieurs centaines de milliers d’euros qui ont été versés en trop à Suez en deux ou trois ans !
Comment les habitants de Lourdes se sont fait avoir par Suez
Un rapport de police portant notamment sur la gestion de l’eau à Lourdes a été transmis début 2017 au parquet de Tarbes, qui pourrait décider d’ouvrir une information. Pendant des années, le marché de l’assainissement et de la distribution de l’eau dans la ville mariale, confié à Suez, a été vérolé par les petits arrangements et les surfacturations, renseigne la même source
Dans un rapport publié en janvier dernier, la Cour des comptes en France indique ainsi que, sur un lot de dix factures datées de 2013, les enquêteurs en ont trouvé trois qui ne correspondaient à aucune prestation. Ces pratiques, qui se seraient poursuivies jusqu’en 2015, après le changement de majorité de 2014, ne datent pas d’hier.
Dès 2008, un technicien de la ville avait calculé que, si l’on mettait fin à toutes ces dérives, on pourrait baisser les tarifs de 60% ! Dans le nouveau contrat signé l’année suivante avec Suez, Jean-Pierre Artiganave, le maire UMP de l’époque, n’a cependant accepté de les réduire que de 25%. « Il craignait que les habitants ne lui reprochent de s’être fait voler pendant toutes les années précédentes », témoigne un ancien élu.
Au reste, la foire aux factures a continué de plus belle. Bien qu’il se soit formellement engagé à les prendre à sa charge, Suez a, par exemple, facturé à la mairie le coût du remplacement des branchements en plomb. Et cette dernière a payé les yeux fermés.