‘’Mane mane’’, un nouvel album exaltant le ‘’savoir faire’’ africain, fruit d’un duo entre le koriste sénégalais Ablaye Cissoko et le défunt bassiste Habib Faye, est présenté comme un hommage au célèbre instrumentiste décédé le 25 avril 2018.
Cette production, dont la sortie est prévue le 19 avril prochain, a été présentée à la presse, jeudi, lors d’une séance d’écoute en présence de nombreux artistes parmi lesquels Falou Dieng, Djiby Guissé, Ibou Cissé du Super Etoile et Vieux Mac Faye, grand frère de Habib.
Son originalité est quelle place les instruments musicaux africains au cœur des diverses mélodies distillés à travers les dix morceaux qui la composent.
Pour le koriste Ablaye Cissoko, le nom de l’album ‘’Mane mane’’, choisi par Habib Faye dès le début du projet, renvoie à ce savoir-faire et à cette possibilité de se servir du patrimoine pour exceller.
‘’Habib disait qu’à travers nos instruments traditionnels, kora, balafon, ngoni, flûte, calebasse, etc., on pouvait faire des musiques avec des harmonies sans avoir besoin d’autres instruments. C’était juste pour lui une manière de dire qu’on a cette possibilité, cette force qui est là et il faut les mettre en avant. Les instruments traditionnels africains ont été mis en avant’’, explique l’artiste.
La sortie de cette oeuvre commune dont la réalisation a duré pendant plusieurs années, sonne comme un ‘’devoir’’ chez Ablaye Cissoko.
‘’Si j’étais à la place de Habib Faye, il aurait fait la même chose’’, lance le koriste qui dit avoir eu aussi l’aval de la veuve de l’artiste, présente à la cérémonie, et de sa famille pour faire aboutir ce projet.
L’album ‘’Mane mane’’ charrie divers rythmes allant du jazz pop, aux sonorités mandingues en passant par les mélodies du sud du Sénégal.
Le duo Ablaye Cissoko et Habib Faye donne ainsi un autre ‘’souffle’’ au répertoire traditionnel dans des morceaux comme ‘’Mami Niang’’, ou encore ‘’Africa Molu’’, ‘’Haïti’’, ‘’Hivernage’’.
‘’On a rejoué, retravaillé ces pièces en les représentant d’une autre manière. C’était une façon de donner un autre souffle à notre patrimoine traditionnel. Car nous avons une responsabilité à transmettre ce qui nous a été légué’’, estime le chanteur et koriste.
‘’Mane mane’’ aborde des thématiques liées à l’Afrique, invite au travail, rend hommage à la mère, chante la paix, l’hivernage, l’humanité de façon plus large.
‘’On aborde beaucoup de sujets ; il y a la générosité, la vie, l’amitié, les tragédies, l’importance de l’hivernage, la reconnaissance, la place du Seigneur, cette paix nécessaire entre les peuples et le culte du travail. Car si l’on ne travaille pas, on ne pourra pas réussir demain’’, affirme l’artiste.
Pour lui, ‘’Mane mane’’ n’est pas un album ‘’posthume’’ pour Habib Faye, car au-delà des dix morceaux sortis, il y a une vingtaine qui restent et qui peuvent aussi être diffusés selon la volonté de la famille.
‘’Cet album est symbolique. Il tenait à ce projet qui est devenu son dernier. Il disait toujours qu’il avait trouvé la voie. Je ne pouvais pas faire autrement que de le présenter’’, dit-il.
L’album parle de ‘’l’humanité’’ de Habib Faye. ‘’Il était toujours dans la perfection, mais il était un humain, il chantait, jouait des moments où il était en forme et d’autres où il ne l’était pas’’.
Après plusieurs collaborations internationales qui lui ont ouvert des portes, Ablaye Cissoko estime que son travail avec Habib Faye est différent.
‘’Je ne fais pas quelque chose que je n’aime pas, je refuse de faire de la musique dans la souffrance. Les collaborations internationales m’ont ouvert des portes. Mais avec Habib c’était différent, car pour quelqu’un que tu avais le plaisir de regarder, d’écouter, si tu as la chance d’être à ses côtés, c’est un bonheur et un challenge’’, confie Ablaye Cissoko.
Pour lui, travailler aux côtés de Habib Faye pousse donc à se remettre en cause.
‘’Je me suis beaucoup remis en cause malgré les nombreuses expériences que j’ai eues. Il m’a appris, c’était un maître, un monument dans son art ; tous les bassistes que vous allez croiser dans le monde vont vous parler de Habib. Ici, on ne connaît qu’une facette de lui. C’est un arbre qui a été arraché à nous’’, témoigne l’artiste, ému, en se remémorant les moments passés.
Plusieurs musiciens ont collaboré dans cet album. Moktar Samba (Maroc/Sénégal) à la batterie, le Français Jean Philippe Rykiel (pinao), Djiby Diabaté balafon), Wilfried et Jules Guèye (au cuivre saxophone et trompette), Ibrahima Ndir (calebasse), Ousmane Ba (flûte).
La production ‘’Mane Mane’’, considérée comme un ‘’collector’’ (une édition spéciale pour collection), ne sera pas distribuée.
Deux concerts sont prévus pour sa diffusion, le premier le 19 avril prochain à l’Institut français de Dakar, et le second le 24 avril à Saint-Louis, dans les locaux dudit institut.
FKS/ASG