Selon Me Pierre Olivier Sur, un des membres du collectif des avocats de Karim Wade, la France ne coopère pas avec le Sénégal à propos des comptes bancaires supposés de Karim Wade en France. C’était en conférence de presse hier, sous les yeux de Viviane Wade.
Dans le dossier Karim Wade, la France refuse de coopérer avec le Sénégal qui est en quête de débloquer des comptes qui appartiendraient à l’ex-tout puissant ministre d’Etat sous l’ancien régime. C’est en substance la révélation faite hier en conférence de presse par le Bâtonnier du barreau de Paris, Me Pierre Olivier Sur, membre du collectif des avocats de Karim Wade.
A cet effet, Me Sur a brandi une lettre du Procureur de la République de Paris, François Molins, dans laquelle il est écrit qu’aucune mesure de blocage des comptes de Karim Wade n’existe en France. Une situation qui indique, selon lui, que «Dakar est sérieusement isolé». En plus clair, «cela veut dire que la France n’accepte pas de coopérer avec le Sénégal. Cela veut dire qu’on est dans un état juridique de rupture, de refus total, et je pense que c’est la première fois dans l’histoire de nos deux pays’’, s’est exclamé l’avocat français. Il s’est dit quasiment certain que la principauté de Monaco va à son tour se désolidariser du Sénégal au nom de la coopération juridique qui le lie à la France.
«Un système de saisie sans fondement juridique»
Arrêté le 15 avril 2013, l’ex-ministre de la Coopération internationale, des Transports aériens, des Infrastructures et de l’Énergie est accusé dans un premier temps d’avoir accumulé des biens divers d’environ 700 milliards de francs Cfa qui ont été ramenés plus tard à des proportions moindres. Sur la base de telles accusations, «aucun procureur de la République n’acceptera ces mauvaises rumeurs (et de) fonder des mesures de saisie sur un système juridique sans fondement’’, a soutenu Me Olivier Sur. «Je ne connais pas un procureur de la République qui acceptera de coopérer sur le fondement d’un système juridique qui ne connaît pas les voies de recours et le droit d’appel sauf pour l’accusation», a insisté le bâtonnier de Paris. Un procédé qu’il a assimilé à une «inégalité des armes».
«Otage politique»
Me Ciré Clédor Ly conclut que ’’Karim Wade n’est ni plus ni moins qu’un détenu politique’’ car ’’la traque des biens mal acquis est un programme politique autour duquel les sénégalais ont été mobilisés’’. Prenant la balle au rebond, Me Sur corrige : ’’C’est pire que cela : Karim Wade est un otage politique.’’
Avec deux mandats de dépôt sur le dos, l’ex-ministre d’Etat est en prison pour encore plusieurs mois. Mais d’après Me Ly, ’’le monde entier a acquis la certitude de l’absence de preuves contre Karim Wade et se demande alors pourquoi il est encore maintenu en prison’’. C’est fort de ce constat qu’ils ont d’ailleurs saisi la chambre d’accusation de Dakar d’une demande de liberté d’office pour détention arbitraire de Karim Wade ainsi que d’une demande d’annulation de l’ensemble de la procédure instruite par la commission d’instruction de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei). À cet effet, la loi fait, selon lui, ’’obligation à la Chambre d’accusation de statuer sur la liberté d’office de Karim Wade dans le délai d’un mois et sur la demande d’annulation de l’ensemble de la procédure dans un court délai de cinq jours’’.
’’Chacun a intérêt à ce que Karim Wade sorte de prison’’
S’attaquant lui à la légitimité de la Crei, Me Pierre Olivier Sur soutient que ’’cette institution est illégale dans la mesure où elle a été abrogée par la loi organique de 1984 et il a fallu la faire revivre de ses cendres non pas par une loi organique mais par un simple décret. Ce qui, en termes de parallélisme des formes, est insuffisant, selon lui. ’’La Crei n’existe pas et c’est sans doute la raison pour laquelle la Communauté internationale ne la reconnaît pas’’, fulmine l’avocat français. Qui met l’État en garde : ’’Chacun a intérêt à ce que Karim Wade sorte de prison.’’