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Baisse des prix sur l’autoroute à péage: Le Collectif des usagers décèle une arnaque
Publié le vendredi 28 decembre 2018  |  Enquête Plus
Cheikh
© Autre presse par DR
Cheikh Oumar Sy, député à l`Assemblée nationale
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Selon le Collectif des usagers de l’autoroute à péage, la baisse des tarifs annoncée en grande pompe par le chef de l’Etat n’est rien d’autre que de l’arnaque. Du fait d’une promesse de prorogation de 10 ans du contrat liant Eiffage-Senac à l’Etat.

L’alerte est du Collectif citoyen des usagers de l’autoroute à péage (Ccuap) : l’Etat du Sénégal est en passe de se faire avoir par Eiffage pour la deuxième fois consécutive. Et cette nouvelle pilule a du mal à passer en travers de la gorge des membres du collectif. Hier, face à la presse, ils étaient dans tous leurs états. Le coordonnateur, l’ex-député Cheikhou Oumar Sy, vigoureusement, proteste : ‘’Quand j’ai appris la nouvelle concernant la baisse des tarifs sur l’autoroute, je m’en suis vite félicité. Mais, par la suite, je me suis rendu compte que c’est une pure arnaque. Car, d’abord, la baisse ne concerne que Toglou et Sébikotane, c’est-à-dire des tronçons où il n’y a pas autant de trafics qu’à Dakar et environs (Thiaroye et Keur Massar, par exemple). Des axes qui font plus de 100 fois les trafics de Toglou et Sebikotane…’’

Mais si ce n’était que ça, ce serait un moindre mal, est-on tenté de croire avec les membres du collectif. Mais le courroux, rapportent les amis de Cheikhou Oumar Sarr, c’est surtout la compensation qui aurait été faite à Eiffage et Gérard Senac pour leur faire concéder ces ‘’miettes’’. Certains ont failli tomber des nues, quand M. Sy a informé qu’il se susurre que le gouvernement aurait accordé à l’exploitant une prolongation de 10 ans de son contrat. Lequel sera ainsi porté, selon les contestataires, de 25 à 35 ans. ‘’C’est inique. C’est inimaginable. C’est scandaleux… Soit les autorités ne sont pas conscientes de ce qu’elles sont en train de faire, soit le président de la République n’a pas bien été informé de la question. C’est même une situation dégradante pour notre économie. Je me demande vraiment comment des autorités soucieuses du bien-être de leurs populations peuvent signer de tels accords’’, fulmine l’ex-député.

La colère se lit sur son visage. Et comme lui, les autres membres du collectif ont également du mal à digérer ce qu’ils considèrent comme une pilule bien amère. Président de l’organisation Leadership, éthique, gouvernance et stratégie (Legs), Elimane Haby Kane dénonce, pour sa part, le refus de l’Etat de communiquer aux Sénégalais les contours de ce contrat. Il assène : ‘’Nous sommes vraiment devant une situation inacceptable de déni des droits des citoyens, de non-respect de leurs droits les plus élémentaires.

Ceci est inimaginable dans un pays sérieux. Tu paies parfois jusqu’à 5 000 F sur cette autoroute, sans avoir ton mot à dire. Nous sommes tous interpellés. Il faut au moins que le gouvernement porte à la connaissance des Sénégalais les termes de ce contrat.’’ Pour le responsable du Programme bonne gouvernance de l’Ong Oxfam, le gouvernement n’a fait ni plus ni moins que violer la loi sur le Code de transparence des finances publiques. ‘’Cette loi, dit-il, impose à l’Etat non seulement de partager l’information sur ces contrats, mais aussi de les simplifier en vue de les rendre accessibles au grand public. Les journalistes devraient avoir accès et au contrat et à la vingtaine d’avenants qui ont été signés. Ce sont des problèmes banals qui ne devraient pas se poser dans notre pays.’’

Pour être plus imprégné du dossier, le Ccuap a toqué à toutes les portes : Présidence de la République, Assemblée nationale, Apix, Eiffage et même la Banque mondiale qui est l’un des bailleurs du projet. D’ailleurs, seule cette dernière a daigné donner suite à leur requête. Mais n’étant pas partie au contrat liant Eiffage à l’Etat par rapport à l’exploitation, la Bm n’a bien évidemment pas pu apporter toutes les réponses aux interrogations.

Pendant ce temps, le gouvernement fait le mort. L’ex-parlementaire estime de ce fait que, dans cette affaire, l’Etat fait tout sauf défendre les intérêts de ses citoyens. Il cite les habitants de Thiaroye, de Keur Massar, de Rufisque et de Guédiawaye qui, à l’en croire, souffrent divers maux à cause de l’autoroute.

Toutefois, l’espoir est encore permis, à en croire le coordonnateur, car le chef de l’Etat n’a pas encore signé le document, selon ses sources. Et en lui il fonde un dernier espoir. ‘’Nous lui (le chef de l’Etat) demandons de ne pas signer ce contrat clairement léonin. Si le gouvernement ne peut pas imposer à Senac une baisse significative des tarifs, il n’a qu’à laisser le contrat tel quel. A la fin des 25 ans, on reprend notre autoroute et on pratiquera les prix que nous voulons, qui ne léseront pas les usagers’’.

Mais au-delà du président de la République et son gouvernement, le Ccuap en veut également aux candidats à la présidentielle qui ne s’intéressent pas assez, à leur goût, à cette lancinante question. Les amis de Cheikh Oumar Sy protestent : ‘’On parle beaucoup de pétrole et de gaz. Ça, c’est dans 4 à 5 ans. L’autoroute, c’est maintenant. Les gens doivent aussi en parler. C’est bien de parler des élections, du fichier, mais cette question interpelle davantage les Sénégalais et il faut que les gens en parlent.’’

Par ailleurs, les amis de Cheikhou Oumar Sy réclament également plus de sécurité et l’installation d’un système d’éclairage pour une meilleure visibilité nocturne sur l’infrastructure. Ils n’ont pas non plus oublié les communes traversées par l’autoroute qui, à les en croire, doivent recevoir des redevances. Last but not least, le Ccuap demande au président de la République de renoncer ‘’immédiatement à la signature d’un nouveau contrat qui implique une rallonge de la durée de la concession et exige une réduction substantielle des tarifs en respectant la limite maximale proposée ci-dessus sur la base d’une évaluation comparative des pratiques dans le monde’’.

Dans la troisième phase de leur plan d’action, ils promettent ‘’une mobilisation populaire’’. S’engageant à poursuivre la lutte jusqu’à la satisfaction totale des demandes citoyennes.

REACTIONS DES TRANSPORTEURS

Un goût d’inachevé

Pendant que les activistes ruent dans les brancards, les syndicats des transporteurs, eux, saluent la baisse, tout en exigeant plus d’efforts de la part de l’Etat et de Eiffage. Pierre Mbakhane Gomis est le patron du Syndicat des transports routiers de la région de Thiès, affilié à la Cnts. Il se prononce : ‘’D’abord, nous saluons la baisse qui a été enregistrée. Pour nous qui quittons Mbour pour aller à Dakar, on a noté une baisse de 1 000 F dans la catégorie que j’ai (les véhicules de tourisme). Avant, je payais 3 000 F de Mbour à Dakar. Maintenant, c’est 2 000 F. Mais la baisse doit être globale. On ne doit pas se limiter uniquement aux usagers de Mbour. Je suis dans un syndicat national, je souhaite donc que la baisse soit élargie, surtout à Thiaroye, Keur Massar et environs. Ce sont les axes les plus empruntés.’’

Cependant, contrairement aux gens du collectif, lui ne semble pas voir d’inconvénients sur une possible prorogation. Mais à une ou deux conditions : ‘’Que les prix subissent une baisse drastique. Que les intérêts des Sénégalais soient préservés.’’ Pour lui, le combat pour une baisse des tarifs sur l’autoroute ne doit pas être la lutte d’un groupe : ‘’L’autoroute appartient à tous les usagers, Sénégalais ou étrangers. Nous voulons que tous s’impliquent dans les négociations. Nous saluons également la lutte menée par le collectif.’’

Modou Dia, lui, est responsable au Syndicat démocratique des chauffeurs de taxis du Sénégal. Il porte son témoignage : ‘’Pas plus tard qu’hier, je me suis rendu à l’aéroport Aibd. La baisse ne concerne que le dernier guichet où l’on payait 1 600 F Cfa. Maintenant, c’est à 600 F. C’est une bonne chose, mais ce serait encore mieux si les sorties de Thiaroye et Keur Massar étaient aussi concernées. Cela aurait plus d’impact. Les prix restent excessivement chers. Cette baisse, on a l’impression que c’est seulement pour ceux qui se rendent à l’aéroport. Certains disent même que c’est juste de façade, vu que la durée du contrat va être prorogée de 10 ans.’’
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