La formation d’auxiliaire de santé communautaire proposée par l’Institut de formation paramédicale et de premiers secours (IFPPS) de Thiès va formaliser un personnel "pivot" de la santé communautaire, souvent laissé en rade, a indiqué vendredi le docteur Idrissa Tall, directeur de l’établissement.
"L’auxiliaire de santé communautaire vient formaliser un personnel de santé qui est le pivot de l’approche communautaire et qui, malheureusement, n’a pas toujours bénéficié de la considération qu’il fallait", a dit le médecin lors d’un entretien
La nouvelle notion d’auxiliaire de santé communautaire fait l’objet d’une filière de formation à l’IFPPS, ouvert depuis 2016.
"Quand nous étions jeunes médecins chefs de district, on collaborait avec ceux qu’on appelait des matrones", se souvient le docteur Talla qui rappelle qu’il s’agissait de vieilles dames reconnues dans la communauté comme aidant les femmes à accoucher et auxquelles les structures de santé donnaient des "compléments d’information" sur des aspects "protecteurs", en plus de leur "expertise traditionnelle".
Par exemple, pour éviter le tétanos néonatal, elles devaient juste couper le cordon ombilical avec des "instruments appropriés" et amener la mère et l’enfant à la structure de santé.
Les matrones suivaient aussi les grossesses, note le docteur qui a été médecin chef de district de 1985 à 1998 et médecin-chef de région de Thiès de 1998 à 2005. Jusqu’à sa retraite en 2015, il était au ministère de la Santé.
Il a été adjoint par la suite, aux matrones, des agents de santé communautaire, pour la plupart de jeunes adultes. Un rôle qui, bien que "valorisant", ne pouvait les retenir au village, puisque les structures de santé n’avaient pas de quoi les payer. La plupart d’entre eux partaient ou trouvaient une autre activité.
C’est alors que les autorités sanitaires décidèrent de dispenser aux matrones, "plus constantes", la formation d’agent de santé communautaire en plus.
Avec l’évolution, le système de santé a "migré" vers les relais, spécialisés dans la santé de la mère et de l’enfant. Leur intervention a été élargie à l’ensemble des actes de soins, a analysé le directeur IFPPS.
On parlait alors de relais polyvalents. Sous le régime de Wade, ces relais sont devenus des "médecins sans blouse" et surtout des "bajenu gox".
Ces dernières, en plus du rôle des anciennes matrones, sont formées à la prévention. Personnes ressources dans leur communauté, elles conseillent les femmes enceintes et font de la sensibilisation. Avec l’évolution du niveau des études, les anciennes matrones non scolarisées cédaient la place à des jeunes avec parfois le bac, sans emploi.
Ces agents venus pallier le déficit de personnel, ont en lieu et place d’un diplôme de qualification, juste une attestation et sont payés au prorata de différentes tâches, relève le Docteur Talla.
Pourtant, ils "jouent un rôle extrêmement important dans nos structures", souligne-t-il. "La Croix rouge s’est dit pourquoi pas formaliser cette expertise et leur donner des diplômes d’institution", en lieu place du diplôme d’école.
La reconnaissance dont jouit l’institution de la Croix rouge au plan international, s’y prêtait bien.
Une synthèse d’anciennes formations qui ont été restructurées et de curricula de l’Organisation ouest-africaine de santé (OAS) ont servi de source d’inspiration pour l’élaboration des modules, raconte le directeur, par ailleurs conseiller du président de la République en santé.
Ouvert grâce à un partenariat entre la Croix rouge sénégalaise et la Croix rouge française, l’IFPPS a mis début décembre sa première promotion d’auxiliaires de santé communautaire sur le marché de l’emploi.Elle vient de lancer il y a quelques semaines une filière en sage-femme d’Etat et infirmière d’Etat.