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Art et Culture

Restitution de l’art africain: "Nous avons besoin de cette mémoire"
Publié le vendredi 23 novembre 2018  |  AFP
Ouverture
© aDakar.com par SB
Ouverture de la 13ème Biennale de Dakar (Dak`Art 2018)
Dakar, le 3 mai 2018 - Le coup d`envoi de la 13ème édition de la Biennale de l`Art Africain Contemporain de Dakar (Dak`Art 2018) a été donné, ce jeudi, par le président de la République Macky Sall. La Biennale du 3 mai au 2 juin 2018.
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La remise du rapport Savoy-Sarr cette semaine
sur la restitution des objets d’art africain à leur pays d’origine a déclenché
de vives passions en France, mais en Afrique de l’Ouest, conservateurs ou
historiens préfèrent parler de "collaboration" et préparent leur retour sur le
long terme.
Le Béninois Alain Godonou, ancien directeur du département des objets
culturel pour l’UNESCO, travaille sur cette question depuis plus de 30 ans.
Il vient d’être nommé responsable des questions du patrimoine pour la
nouvelle agence nationale de promotion du tourisme du Bénin pour mener les
missions de gestion du patrimoine, dans un pays qui a déjà fait connaître son
désir de récupérer certaines de ses oeuvres.
L’expérience de sa longue carrière le fait toutefois relativiser sur le
rendu de ce rapport, commandé par Emmanuel Macron au lendemain de son discours
de Ouagadougou où il avait assuré que les pays africains qui en feraient la
demande pourraient récupérer les oeuvres pillées ou mal-acquises avant et
pendant la colonisation.
L’actuel Bénin est directement concerné. Le petit pays d’Afrique de
l’Ouest, ex-Dahomey, abritait le royaume d’Abomey (1600-1894), et des
richesses inestimables, dont le trône du roi Glélé (1858), qui fait partie des
pièces maîtresses des 70.000 objets africains désormais conservés au musée du
Quai Branly-Jacques Chirac de Paris.
"Conserver des butins de guerre dans des pays qui sont désormais amis et
qui collaborent, ça n’a pas lieu d’être", confie à l’AFP M. Godonou. "Mais ca
ne se fait pas à la va-vite, il faut s’entretenir avec les conservateurs, les
législateurs. On avance, mais il reste énormément à faire".


- Question sensible -

"Les objets, on ne veut pas les avoir pour les avoir", poursuit-il. "Il
nous faut des projets d’appropriation de notre patrimoine". Cela passe par des
projets éducatifs, mais aussi par une réhabilitation des musées.Le problème de
la conservation, qui a justifié pendant de nombreuses années le statu-quo sur
cette question sensible, n’est plus tabou et sur le continent. On reconnaît
volontiers le problème.
Mais dans de nombreux pays du continent, au Sénégal, en Côte d’Ivoire, au
Gabon, ou encore au Bénin, on prépare les plans de nouveaux musées ou leur
inauguration prochaine.
Le président Béninois Patrice Talon, qui souhaite faire du tourisme l’un
des piliers de l’économie nationale, a approuvé les chantiers de cinq musées
dont celui des Rois d’Abomey et des Amazones, en hommage à l’ancien régiment
militaire entièrement féminin du Dahomey, qui devrait ouvrir ses portes en
2020.
Ousmane Aledji, chargé du patrimoine pour la présidence béninoise, se
réjouit de voir émerger "une nouvelle forme d’échanges culturelles" avec la
France.
"Nous ne sommes pas dans la réclamation violente, mais nous voulons mettre
en place des mesures d’accompagnement pour des restitutions progressives",
assure-t-il.
Même discours à Abidjan, où la directrice du musée des Civilisations de
Côte d’Ivoire, Silvie Memel Kassi, reconnaît que "ce n’est pas un mal en soit
qu’ils aient été conservés et répertoriés en France".

- "Pièces ancestrales" -

Le musée national d’Abidjan a été rénové en 2017, mais un musée plus
important est en projet. Dans ce cas, "on pourrait commencer à parler de
restitution" définitive. Mais, "en attendant, qu’ils viennent et qu’ils
repartent, ça ne nous pose pas problème", insiste la directrice.
"L’important est de travailler ensemble. Nous voulons avoir accès à ces
objets. Nous avons besoin de cette mémoire, ces objets sont une mémoire".
A Dakar, le musée des civilisations noires (MCN), dont l’inauguration est
prévue le 6 décembre, sera prêt, un jour, à accueillir les oeuvres, assure son
directeur.
"Nous avons des réserves opérationnelles qui peuvent accueillir de pareils
objets", explique Hamady Bocoum, soulignant toutefois que les oeuvres n’ont
pas forcément vocation à finir dans un musée, mais appartiennent également à
des communautés, qui pourront "décider de les remettre dans les autels des
ancêtres".
"Ces oeuvres-là viennent de nos aïeux", raconte à l’AFP Taho Toubo, chef
traditionnel We, groupe ethnique de Côte d’Ivoire. "Je prie nos ancêtres,
dépositaires mêmes de ces pièces précieuses, ancestrales, je prie les ancêtres
pour que leurs pièces-là retournent", confie l’ancien.
Selon les recommandations du rapport, que le président Macron peut
accepter, rejeter, compléter, amender à sa guise, avant de le faire passer au
vote de l’Assemblée, la phase de restitution pourrait commencer en 2019.
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