C’est le statu quo ante. Malgré la volonté du Ministre de l’Intérieur d’ouvrir à la consultation le fichier électoral à l’opposition qui y a mandaté ses experts, rien n’a changé. Le doute persiste.
Le Parti démocratique sénégalais (Pds) a d’ailleurs boudé la salle, hier, estimant que le fichier qui leur a été proposé n’est pas le bon. Même son de cloche chez le représentant du Grand Parti et du côté de nombre d’autres formations politiques.
Les plénipotentiaires estiment, pratiquement tous, qu’ils s’attendaient à une meilleure ouverture de la part des autorités pour accéder aux informations qui leur permettraient d’auditer le fichier qui leur est présenté.
Ils ont été nombreux en effet à estimer qu’ils ne savent pas s’ils sont en présence du vrai fichier ou pas.
Comme quoi, le contrôle ainsi exercé leur semble inutile. Pis, ils ne veulent pas avaliser une supercherie, une duperie.
C’est donc le retour à la case de départ. La suspicion qui pesait sur le fichier électoral est restée la même. Et l’incompréhension et le manque de dialogue continuent ainsi à persister entre opposition et pouvoir.
Or, si chaque camp campe dans ses positions, il en sera ainsi jusqu’à la présidentielle avec son cortège de risques sur la stabilité du pays.
En conséquence, il est important qu’il y ait arbitrage comme dans toutes les situations de crise persistante.
Si en interne, les mécanismes de médiation sont incapables de réunir les parties autour d’une table pour discuter, il est important que les mécanismes extérieurs agissent. La Cedeao, l’Union africaine et même les Nations-Unies, dans un souci de prévention et d’anticipation, devraient pouvoir créer les conditions idoines d’une confiance mutuelle entre acteurs sur les règles du jeu.
Il serait maladroit d’attendre que la situation empire pour intervenir. C’est le moment de le faire.
Même si la loi électorale dit que le fichier doit être mis à la disposition des candidats quinze jours avant le scrutin, il n’en est pas moins important que l’administration chargée des élections fasse davantage preuve d’ouverture et de bonne foi en livrant le fichier à ceux qui le réclament.
Certes, sa consultation sur place est un acte important, mais il n’a pas suffi à dissiper les malentendus, il faudra poser des actes supplémentaires. La paix sociale n’ayant pas de prix.
La réalité est qu’il pèse entre Macky et son opposition une incompréhension notoire accentuée par la manière dont les législatives avaient été organisées en 2017 : Des disfonctionnements graves que rien n’explique, sinon la volonté qu’il en soit ainsi. Car, l’administration qui organise les élections a acquis une expérience séculaire qui ne laisse pas de place à l’amateurisme observé lors de ces législatives.
Pis, la révision du fichier avec l’inscription pour le moins chaotique des électeurs, est venue conforter les théoriciens de la fraude électorale. Et comble de malheur, le Ministre de l’Intérieur a enfourché ses habits de partisan pour dire ouvertement que ceux qui vont voter pour son candidat auront leurs cartes.
On ne peut pas, dans un pays comme le Sénégal, à culture politique avancée de la part des populations, assister à tout cela et ne pas nourrir un doute légitime. Voilà le contexte et ses justifications.
Si l’opposition est intransigeante sur cette question, c’est que le pouvoir a prêté le flan. Il l’a d’autant plus fait qu’il refuse de nommer une personnalité indépendante comme une bonne partie de ses adversaires ne cesse de le réclamer.
Alors, va-t-on continuer à observer ces acteurs politiques se crêper le chignon sans intervenir ? Ce serait en tout cas risqué de penser ‘’qu’il ne va rien se passer’’.
L’Union européenne avait déjà audité le fichier. Son concours peut alors être de taille à clarifier le débat qui se passionne.
Personne ne doute du fait que pratiquement toutes les crises en Afriques sont nées d’élections.
Or, tout se passe dans notre pays comme si on avait envie que ça dégénère.