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Palais Ndiouga Kébé à Touba : un chantier orphelin de son concepteur
Publié le lundi 5 novembre 2018  |  Agence de Presse Africaine
Palais
© Autre presse par DR
Palais Ndiouga Kébé à Touba
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Si les Dakarois connaissent bien l’immeuble « Babacar Kébé dit Ndiouga Kébé » d’une quinzaine d’étages qui trône au centre-ville de la capitale sénégalaise, beaucoup d’entre eux ignorent que ce défunt richissime homme d’affaires mouride avait, durant son vivant, entamé à Touba (centre, 187 km de Dakar), la capitale du mouridisme, la construction d’un palais en témoignage de l'admiration qu'il vouait à son guide spirituel, Cheikh Ahmadou Bamba.

Ebauché au début des années 80, ce palais qui dans l’esprit de son concepteur devait être, au point de vue magnificence et grandeur, le troisième du genre au Sénégal après le Palais présidentiel et de Popenguine, soit la résidence secondaire de tout chef d’Etat sénégalais, est resté trente ans après un chantier inachevé. Et dans cette immense bâtisse aux murs non badigeonnés mais ne présentant aucune fissure, le temps semble s’arrêter depuis que le décès de Ndiouga Kébé en 1984.

Bâti sur plusieurs mètres carrés dans le quartier « Darou Minam » de l’actuel Khalife général des mourides, Serigne Mountakha Mbacké, l’imposant bâtiment que borde une clôture rappelle au point de vue architecturel la grande mosquée de Djenné, construite en 1907 dans la région malienne de Mopti.

Selon Amadou Guèye, un ingénieur en génie civil à la retraite depuis 2010 et dont la maison fait face au palais inachevé, feu Ndiouga Kébé rêvait d’en faire « sa résidence secondaire ». S’offrant déjà une première commodité, le richissime homme d’affaires avait financé sur fonds propres la route qui passe devant son palais et mène tout droit à la Grande moquée de la cité religieuse.

Ami d’anciens chefs d’Etat africains, Ndiouga Kébé, rappelle M. Guèye, « a également construit un forage et il avait créé diverses infrastructures pour la seule face de Serigne Touba. C’était sa mission principale. Mais Dieu en a voulu ainsi (pour son palais), il ne l’a pas terminé ».

Tout en saluant les nombreux investissements consentis à Touba par Ndiouga Kébé, Ibrahima Diop, un sociologue mouride trouvé dans le palais, soutient que son propriétaire à travers son immense chantier voulait « magnifier les rapports» qu’il avait avec la cité religieuse.




Intarissable sur la majesté du chantier, il ajoute sur le ton de la confidence : « Dans le schéma, ça devait être le troisième palais au niveau national. C'est-à-dire, à part le palais de la République (de Dakar), le palais de Popenguine (résidence secondaire située à Mbour), il y aurait le palais de Touba. (…) ».

S’expliquant sur sa présence dans ces bâtiments vides où il n’a pu s’empêcher de faire deux « rakkas », M. Diop dit être venu « célébrer » la « dimension ontologique » qui existait « entre un talibé (Ndiouga Kébé) et son marabout (Cheikh Ahmadou Bamba) ».

A la question de savoir pourquoi le palais est laissé en l’état depuis le décès de son propriétaire, Ibrahima Diop se montre évasif, soulignant qu’il n’est pas de son ressort de chercher une quelconque «explication scientifique» à cela.

Malgré tout, il ajoute : « L’explication à l’intérieur de Touba est d’ordre ontologique. Cette ville a sa science particulière que Serigne Touba a construite et qui fait qu’elle enjambe la science rationnelle. (…) C’est pourquoi, il faudrait seulement regarder, constater et magnifier… et non pas analyser selon vos sens ».

Amadou Guèye, l’ingénieur en génie civil qui travaillait au ministère de l’Urbanisme, a, lui, son explication qui porterait sur le coût faramineux des travaux de finition. Citant les superviseurs des travaux du palais, il affirme « qu’il fallait (peu après le rappel à Dieu de son propriétaire) au moins quatre milliards de FCFA pour le terminer ».

Aujourd’hui, la donne a changé car le palais est « entre les mains du khalifat mouride », un acte décidé par « les héritiers de Ndiouga Kébé » du temps du Khalife Serigne Saliou Mbacké (1990 – 2007), révèle Amadou Guèye, non sans souligner que la bâtisse peut être valorisée pour le plus grand profit de la population de Touba, estimées à prés d’un million d’âmes.




« Il y a deux ou trois années de cela des médecins que j’ai approchés m’ont dit que si le palais était affecté à la santé, il leur serait très facile de trouver un financement extérieur pour en faire un hôpital de référence », soutient le technicien, assurant que ce bâtiment « très élevé sur le plan technique (car construit) en béton armé » est doté de « quatre ascenseurs que Ndiouga Kébé avait installés ».

A défaut, suggère-t-il, « l’Etat peut proposer une solution par rapport (à son utilisation). Parce que d’aucuns disent que ça peut être une caserne de sapeurs-pompiers ou un commissariat de police ».

Partisan d’une solution à tout crin, M. Guèye avertit que « la nature a horreur du vide » et que laisser le palais en l’état représente « un danger » pour les voisins comme lui.

Pour le moment, le palais continue de baigner dans une solitude majestueuse, troublée par le sifflement du vent faisant se courber de temps en temps les herbes folles ayant poussé à la devanture. Des rumeurs d’esprits surnaturels qui hanteraient les lieux sont venus s’en mêler, mais apparemment sans apeurer la bande de gamins trouvés sur place en train de s’égailler dans les innombrables chambres du palais.


ODL/cat/APA
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