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Itw Cire Abdoul Diallo (coordonnateur CEREEC) - ‘‘Cette convention tripartite n’aurait jamais dû exister’’
Publié le vendredi 2 novembre 2018  |  Enquête Plus
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‘’EnQuête’’ revient sur les tribulations de la convention tripartite Aser-Cereec-Energie R pour le financement du projet Dper Sud-Est Sénégal, censé éclairer 40 villages pour un montant de plus de 5 milliards de francs Cfa. Le coordonnateur de ce projet au sein du Centre de la Cedeao pour les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique (Cereec), Ciré Abdoul Diallo, et la responsable de la communication de l’Aser, Khady Ndiaye, s’expliquent après les allégations d’Energie R qui déplore la (nouvelle) convention directe Aser-Cereec.



Comment se porte le projet Dper Sud-Est Sénégal ?

Il est dans sa dernière année de mise en œuvre. Il devait se clôturer cette année même, mais vu les retards accusés, inhérents à tout projet, on a bénéficié d’une année d’extension. En novembre 2019, on devrait être à terme. Les travaux de génie civil sont terminés dans les 25 villages qu’on a retenus. Il y a 40 villages qui sont initialement concernés, mais certains villages ont sauté du fait qu’à un moment donné, il y a eu des extensions de réseau, mais également que certains villages qui avaient été retenus par les partenaires locaux ne répondaient pas aux critères du Dper. Donc, on a dû sortir ces 15 villages et nous sommes en train de finir les études pour les quinze nouveaux autres qui doivent réceptionner les mini-centrales solaires. L’Etat aussi a sa propre planification, d’autres projets d’urgence sont passés par là. Il faut reconnaitre aussi que des villages qui ne devaient pas être retenus l’ont été. Ils étaient déjà prédisposés à recevoir d’autres projets. Donc, on n’avait aucune raison de les intégrer.

Il y avait une convention tripartite Aser-Cereec-Energie R pour porter à bien ce projet. Que s’est-il passé pour qu’Energie R se sente marginalisé ?

Je parlerai d’abord du contrat de financement avant cette convention. C’est un contrat qui lie le Cereec à l’Union européenne. Le Cereec en est le codemandeur et va lister Energie R et la structure allemande Solar 23. Le Cereec est le coordonnateur, c’est-à-dire qu’il est responsable vis-à-vis des bailleurs par rapport au projet. Ce contrat de financement avec l’Ue stipule clairement les choses. Le Cereec est le seul habilité à être l’interface avec les bailleurs, le seul habilité à recevoir les financements et le seul qui répond de tout ce qui se passe dans ce projet. Energie R n’a pas eu de marché ; Energie R n’a pas été financé, qu’on soit clair ! Energie R est financé à travers une tête de pont qu’est le Cereec. Si l’Ue pouvait les financer directement, rien ne les empêchait de traiter directement avec l’instance européenne. Voilà des incohérences. Ce projet n’a pas été écrit par Energie R, c’est nous qui avons payé l’expertise de Solar 23 pour rédiger le projet. Si Energie R a écrit le projet, il doit en détenir les preuves, mais nous avons le droit, si on a un appel à candidatures, de contacter les services de quelqu’un qui travaille dans ce sens.

A Energie R, on n’en démord pas pourtant. Ils ont l’impression d’avoir été coiffés sur le poteau par le duo Aser-Cereec ?

Nous avons ce contrat de financement avec l’Ue. Il vient avec deux annexes, les conditions générales et les conditions particulières, qui stipulent en son article 12.4 les prérogatives du coordonnateur. Pour être franc, l’Ue ne s’en réfère qu’au Cereec…

Dans ce cas, pourquoi la lettre du principal bailleur, l’Ue, qui affirmait que le contrat ‘‘ne peut être modifié ou cédé à un tiers de quelque manière que ce soit’’, sans son accord préalable ?

La convention tripartite Aser-Cereec-Energie R ne concerne l’Ue en rien. C’est ce qu’elle est en train de dire dans cette lettre. Que cette convention change ou pas, vous avez des engagements que vous avez pris vis-à-vis de nous et vis-à-vis des codemandeurs. Donc, la donne ne change pas. Ce que vous avez signé avec nous, l’Ue, reste intact. C’est ce que dit l’instance européenne exactement dans cette lettre. Le changement dans la convention tripartite que vous avez faite ne change en rien ce que nous, Ue, attendons de vous. Si vous avez pris des engagements vis-à-vis des autres codemandeurs, nous nous attendons juste à ce que vous les remplissiez. De là à aller s’imaginer des choses… L’Ue nous rappelle simplement les engagements du Cereec vis-à-vis d’elle, en tant que bailleur. Nous pouvons aller signer n’importe quel contrat ou convention dans le cadre de la mise en œuvre de ce projet, s’il respecte les règles en place, procédures de passation de marchés, etc. Nous n’avons jamais saisi l’Ue en lui disant qu’on va mettre Energie R dehors, alors que cela fait partie de nos prérogatives. C’est Energie R qui a saisi l’Ue en pensant qu’il serait mis dehors. Il a fait dans la fuite en avant.

Mais le fait est qu’on est passé d’une convention tripartite à une convention directe Aser-Cereec. Comment l’expliquer ?

La convention tripartie n’aurait jamais dû exister. On aurait dû commencer par la convention directe et en rester là. Dans la convention qu’on a signée avec l’Ue, il n’y a ni la signature de Solar 23 ni d’Energie R, mais celle du Cereec. L’Aser, qui est du même titre que l’Ue, devait signer une convention de financement avec nous pour apporter la contrepartie qui nous a été exigée. Je n’étais pas coordonnateur en ce moment, mais tout le travail préalable a été fait avec Cereec et Aser. Seul le coordonnateur est habilité à signer. Je ne sais pas par quelle péripétie Energie R a été signataire. Les conditions suspensives de cette convention tripartite étaient que l’Aser allait apporter la contrepartie, à travers un financement de la Banque islamique de développement (Bid). Cette dernière nous a dit qu’elle allait le faire et que nous pourrions capter les 24 % de financements résiduels. Il s’est trouvé que, finalement, la Bid et l’Ue n’ont pas les mêmes procédures. Par exemple, avec les règles d’origine de l’Ue, on ne peut pas utiliser leurs fonds pour acquérir des services ou des produits de certains pays, notamment la Chine. Donc, les points de vue des bailleurs étant irréconciliables, les choses ont commencé à tirer en longueur. L’Aser s’est proposée pour tirer ce financement du budget de l’Etat. Ce qui fait que les prémices sur lesquelles la convention tripartite reposait n’étaient plus valables, n’existaient plus. Ce n’est plus le financement de la Bid qui est utilisé, mais le budget consolidé de l’Etat.

L’avez-vous notifié aux différentes parties, à Energie R notamment ?

Il y a des procès-verbaux de réunion et des lettres qui matérialisent cette décision. Quand bien même ça n’a pas été notifié, notre dernière lettre à Energie R les amenant à penser qu’on voulait les expulser, c’était pour leur dire que la convention tripartite qui avait été signée n’est plus valable. Etant donné que ça ne l’était plus, parce que l’argent de la Bid n’a pas été utilisé dans ce programme, une nouvelle convention de cofinancement a été signée. Tout ce qui faisait que cette convention tripartite a été d’actualité, est caduc. Plus grave, il y est écrit quelque part qu’Energie R va hériter des mini-centrales solaires. Quand l’Etat engage l’argent du contribuable, il exige des procédures de passation de marchés. Donc, on ne peut en entente directe, soi-disant qu’Energie R déjà partie prenante du projet hérite immédiatement des centrales.

Les règles sont là. Il y a une Commission de régulation du secteur de l’énergie (Crse) qui est là. Quand bien même les fonds de la Bid étaient engagés et que la convention tripartite fût toujours valable, on serait arrivé à un moment où il serait impossible de l’appliquer dans le cadre règlementaire. Cela a peut-être échappé à ceux qui l’ont rédigée, mais on ne peut pas faire de l’entente directe avec une entreprise privée comme ça sur des fonds qui dépassent 5 milliards. Quel que soit le montant d’ailleurs, les règles de l’Uemoa, à ce sujet, sont claires. Quand il y a eu changement d’administration à l’Aser, on a dû revoir ça. Moi aussi, à mon arrivée au Cereec, en 2017, on a dû procéder à quelques réglages. Je me suis dit que : puisque l’argent de la Bid n’a pas été engagé, aucune convention ne nous lie et qu’il fallait en signer une nouvelle. Donc, c’est cette note d’information qui a certainement fait penser à Energie R qu’il allait être exclu.

Si on vous suit bien, les prétentions d’Energie R ne reposent sur rien de concret ?

Pas plus tard que juillet ou août, on a viré de l’argent dans les comptes d’Energie R pour qu’ils assurent la formation dans les zones du projet. Mais la note leur a été envoyée bien avant. Donc, si on a envoyé cette lettre en mai ou juin, dans l’intention de l’écarter, pourquoi lui envoyer de l’argent pas plus tard qu’en août ? Il faut savoir que les institutions ont des procédures, des exigences, les mains liées, mais également des prérogatives. On a à faire à beaucoup plus d’acteurs qu’Energie R, mais on ne peut pas se permettre certaines choses. L’Aser non plus. C’est dommage qu’en voulant faire les choses dans les règles, que ce soit vous journalistes qui nous attaquiez sur ça. Energie R n’était pas signataire de la convention-mère avec l’Ue et ne peut pas être signataire de la convention avec le deuxième bailleur. J’aurais été coordonnateur dès le départ, Energie R n’aurait jamais signé n’importe quel papier de ce projet. On ne serait jamais arrivé à ce stade de devoir rectifier les choses, après coup. Je l’ai toujours dit à Energie R et à l’Aser. On peut reconnaitre qu’il y a erreur. Là-dessus, on ne peut pas se voiler la face. La convention tripartite n’aurait jamais dû exister. Initialement, c’est le Cereec qui est responsable et ça devait rester uniforme avec les bailleurs.

KHADY NDIAYE, DIRECTRICE COMMUNICATION ASER

‘’Je ne sais pas d’où vient la faille’’

‘‘C’est de bonne guerre pour Energie R. Mais il doit savoir que lorsqu’il s’agira de faire un autre projet, ce ne sera pas possible de le lui attribuer directement. On sera obligé de passer par des procédures de passation de marchés et on fera intervenir forcément d’autres opérateurs privés qui peuvent faire le projet au même titre que lui. Je ne sais pas d’où vient la faille, car je n’ai pas participé à la signature, mais quand on a vu la convention, on s’est dit qu’elle n’aurait jamais dû exister. Energie R étant coopté comme assistant technique, c’était juste dans la phase de déblocage des fonds, le montage pour le financement du projet par l’Ue. Cette assistance technique a été payée par le Cereec ; le rôle d’Energie R aurait dû s’arrêter là : assistance technique et formation du personnel. Je ne sais pas comment ils se sont débrouillés pour avoir cette convention tripartite.

Le Cereec l’a sollicité pour l’assistance technique, dans le but de décrocher les fonds. Quant à la mise en œuvre du projet, on est forcément obligé de respecter les procédures de passation de marchés. Energie R ne peut pas faire partie de cette phase. A moins qu’il ne postule et gagne le marché. Nous n’avons pas compétence à l’empêcher de prendre part au marché, d’ailleurs. Du moment que l’Aser s’est substituée à la Bid pour le financement résiduel, c’est de l’argent public. On est obligé d’avoir recours aux procédures de passation de marchés.

C’est dans ce cadre qu’Energie R a voulu se prévaloir de cette convention (tripartite) pour dire qu’il ne doit pas y avoir d’appels d’offres ou de consultation restreinte. Même si cette convention était passée entre les mailles, l’agent comptable particulier (Acp) n’allait pas payer, car s’il s’aperçoit qu’il n’y a pas eu passation de marchés, l’argent ne sera pas débloqué. Ce n’est pas parce que cette convention tripartite a existé qu’on va continuer dans cette fausseté. A l’avènement de la nouvelle administration de l’Aser, on s’est rendu compte que même si Energie R fait le boulot, il ne sera pas payé. Il fallait corriger.’’

OUSMANE LAYE DIOP
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