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Numérisation des titres de transport: Les chauffeurs de transport en commun dans l’ignorance totale
Publié le lundi 29 octobre 2018  |  Enquête Plus
Baux Maraîchers
© aDakar.com par DF
"Baux Maraîchers": Dakar tient sa nouvelle gare
La nouvelle Gare de Dakar a été inaugurée ce lundi. Cette infrastructure devra permettre de moderniser davantage le transport et de permettre une plus grande mobilité des voyageurs. Construite sur un site de 12 hectares, la gare des "baux maraîchers" a coûté 7,5 milliards de fCFA.
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Les chauffeurs de transport en commun ne comprennent rien au processus d’obtention du permis biométrique, encore moins aux papiers à fournir. Interpellés sur la question, aux Beaux Maraichers, chacun se lance dans des explications et tirent ses propres conclusions selon les ouï-dire. Reportage.

Si, du côté des autorités, les objectifs sont clairs et que des échéances sont fixées pour la numérisation des titres de transport, pour les chauffeurs, c’est tout le contraire. A la gare routière des Beaux Maraichers, la plupart d’entre eux ne comprennent rien de ce processus. ‘’Pour le moment, je n’ai pas d’informations précises sur le processus de remplacement des permis de conduire. Selon les échos que j’ai eus, il parait qu’il faut fournir un groupe de sang, un médical, etc. En tout cas, ça avoisine les 20 ou 30 000 F Cfa. Franchement, c’est trop coûteux pour nous chauffeurs’’, confie Mamadou Makhtar Thioye.

Assis sur un des bancs publics, attendant son tour pour effectuer son voyage, ce chauffeur, la soixantaine, soutient que si cela ne concernait que les nouveaux permis, il n’y aurait pas de problème. ‘’Imaginez qu’ils veulent changer les permis de tous les conducteurs qu’il y a au Sénégal. Ça sera difficile. Par exemple, nous qui sommes presque à la retraite, on nous demande de débourser une telle somme pour se procurer un permis. C’est presque inutile. Et par rapport au groupe sanguin (Ndlr : document médical attestant du groupe sanguin ou carte de groupe sanguin) dont ils parlent, je me demande si c’est vraiment pertinent de connaître celui du chauffeur, en ignorant celui des clients. Ça n’a aucun sens. Parce qu’en cas d’accident, si le chauffeur est blessé, forcément, ces derniers le seront aussi’’, renchérit-il.

Toutefois, vu qu’ils ont l’obligation de se moderniser, le vieux Mamadou Makhtar Thioye, qui roule sur l’axe Dakar - Karang et Dakar - Tamba depuis 1982, admet qu’ils n’auront pas le choix. ‘’Nous allons faire les choses comme ils le souhaitent. Personnellement, je n’attendrai pas le délai. Je vais le faire juste après le Magal. Mais, pour faciliter les choses, ils auraient pu créer un centre médical au sein de la gare, afin que nous puissions faire les analyses sanguines plus facilement pour qu’on n’ait pas à courir les hôpitaux. Car ceci nous fera perdre des journées de travail’’, préconise-t-il.

Néanmoins, il affirme que ces nouveaux permis ne peuvent pas ‘’servir à grand-chose’’ dans la lutte contre les accidents routiers. ‘’En fait, ce sont les mêmes chauffeurs qui auront un autre document. Les accidents ne sont pas de la faute des conducteurs. C’est plutôt lié à l’état des routes. Ce sont les mêmes infrastructures routières que nous avons, depuis l’époque coloniale. Entre-temps, les voitures ont augmenté. Donc, les accidents ne feront qu’augmenter, si rien n’est fait. Par exemple, sur l’axe Dakar - Kaolack, il est impossible de doubler un véhicule. On est obligé de suivre doucement jusqu’à destination. Si on est pressé et qu’on essaie de rouler à une vitesse supérieure, c’est la catastrophe. Donc, si les routes étaient élargies, il y aurait moins de chocs’’, dit-il.

Ce chauffeur n’est pas le seul à décrier le montant à débourser pour l’obtention du permis biométrique. Bellal Ba partage la même préoccupation, même s’il est d’accord avec ce permis, si les autorités pensent que ça peut réduire les accidents sur les routes. ‘’Mais les papiers qu’ils nous demandent coûtent cher. Seul le timbre de 10 000 F Cfa suffisait. Toutefois, il y a les 4 photos d’identité, c’est 1 000 F, le médical (carte de groupe sanguin) c’est 2 000 F, l’analyse sanguine 4 000 F. Ce qui fait un montant de 7 000 F Cfa en plus du timbre. Ah, honnêtement, c’est trop pour les débrouillards que nous sommes. Des fois, on se dit : mieux vaut ne plus conduire que fournir une telle somme, rien que pour changer un permis’’, se désole ce conducteur, la soixantaine révolue.

‘’Nous sommes des responsables et nous tenons à notre vie’’

Assis à ses côtés, Gallo Ba s’interroge, pour sa part, sur l’origine de ce changement. ‘’Personnellement, la question que je me pose c’est : pourquoi ils veulent, du jour au lendemain, nous imposer de nouveaux types de permis ? Si c’est pour plus de sécurité sur les routes, ils se fatiguent pour rien. Tant qu’il n’y a pas de changement de comportements, ces papiers ne pourront rien régler’’, lance-t-il.

Comme Gallo, Mor est aussi catégorique sur la pertinence de ce nouveau document. Pour lui, ça ne les arrange pas en tant que conducteurs. ‘’Ça réduit nos points en cas d’infraction. Aucun chauffeur ne souhaite faire un accident sur la route. Nous prions tous, au départ, d’arriver sains et saufs à destination avec nos clients. Les accidents, ce n’est pas seulement au Sénégal. Même dans les pays développés, ça existe. C’est juste une volonté divine. Les usagers n’adorent pas leur vie plus que nous. Nous sommes des responsables et nous tenons à notre vie’’, argumente ce jeune chauffeur adossé à son véhicule en partance pour Tivaouane.

Il faut noter que, pour l’obtention du permis biométrique, les autorités exigent une photocopie ou l’original d’un document médical attestant du groupe sanguin ou la carte de groupe sanguin, celle de la carte nationale d’identité ou du passeport, celle de l’ancien permis. Mais aussi la somme de 10 000 F Cfa pour le timbre. Ce qui est une condition sine qua non à l’obtention de cette nouvelle pièce pour tous les chauffeurs. Sa durée de validité pour les personnes âgées de moins de 45 ans est de dix ans. Elle est de cinq ans pour les usagers de plus de 45 ans.

15 000 permis déjà remplacés

Si les chauffeurs sont encore méfiants par rapport à la pertinence du permis biométrique, du côté des autorités, sa production suit son rythme. En fait, depuis le 3 septembre dernier, date d’ouverture des inscriptions pour l’obtention du permis biométrique, plus de 15 000 permis ont été remplacés. L’annonce a été faite hier par la coordinatrice de ce projet dénommé ‘’Capp Karangë’’, Yaye Hindou Guèye Sow. Elle prenait part à une journée de sensibilisation à la gare des Beaux Maraichers, en banlieue dakaroise. ‘’On est à 1 600 000 permis à numériser. Avec ce rythme, on est largement dans les délais. On compte ouvrir un site pour les chauffeurs professionnels de la gare des Beaux Maraichers, le 6 novembre prochain. Un jour avant, c’est-à-dire le 5, on sera à Thiès. Pour Diourbel, ce sera le 8 novembre’’, renseigne-t-elle.

Ainsi, la coordinatrice rappelle qu’à travers cette opération, les autorités veulent sécuriser les titres de transport. Ce ne sont pas seulement les permis de conduire qui sont ciblés, mais tous les titres de transport. Il s’agit notamment des cartes grises, des autorisations de transport, plus précisément les licences et agréments. Les plaques d’immatriculation sont également concernées par ce programme.

C’est pourquoi, Mme Sow souligne que l’objectif de cette visite à la gare des Beaux Maraichers était, en fait, de sensibiliser les chauffeurs sur ce processus. Car, avec le décret signé par le président de la République, les citoyens ont un an pour remplacer leur permis de conduire à partir de la date de l’ouverture du service.

MARIAMA DIEME
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